Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 18 mai 2011 à 14h30
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Article 2

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

La question de la participation des citoyens au fonctionnement de la justice est tout à fait raisonnable et sensée. Elle est malheureusement déviée et déformée par le Gouvernement, qui s’en sert, tout simplement, pour instrumentaliser la justice à des fins qui, elles, sont bien moins fondées.

En effet, l’association étroite des citoyens aux jugements peut constituer une réponse adaptée à l’interrogation fondamentale qui porte sur la légitimité démocratique de la justice.

L’élection des juges a été avancée dans certains cas, mais elle est extrêmement dangereuse, en ce sens qu’elle porte atteinte à l’indépendance et à l’impartialité de la justice et remet totalement en cause son exercice démocratique. L’échevinage ou l’association de citoyens volontaires et compétents à l’exercice de la fonction de juger, aux côtés de professionnels, permet de rendre le peuple acteur d’une certaine justice.

Cette solution apparaît comme une manière de renforcer la légitimité démocratique de la justice sans pour autant porter atteinte à son indépendance. Loin de là l’idée du Gouvernement ! S’il communique beaucoup là-dessus, il utilise surtout cette idée pour faire des citoyens le bras armé d’une justice qu’il souhaite – il faut bien le dire – de plus en plus répressive. Comme si l’augmentation des mesures de répression n’avait pas déjà démontré l’ampleur de son inefficacité ! Une fois de plus, il poursuit dans cette voie, mais par d’autres moyens, continuant ainsi une certaine surenchère.

Ainsi, le choix des tribunaux et l’affectation en leur sein d’affaires précises auxquels seront associés ces deux citoyens assesseurs sont marqués par cette vision biaisée de la société. Ces citoyens seront associés aux jugements des tribunaux d’application des peines et aux jugements des délits des tribunaux correctionnels. Mais que l’on se rassure, ils ne seront pas associés à tous les délits ! Dans l’esprit même du Gouvernement, les délits économiques et financiers n’intéressent en rien les citoyens, lesquels seraient, en revanche, particulièrement au fait des atteintes aux personnes…

L’exclusion de ces délits économiques ne saurait se justifier par une quelconque complexité qui rendrait illusoire, voire dangereuse, la participation des citoyens à de tels jugements. En effet, en matière d’application des peines, les citoyens seraient amenés à participer alors que les professionnels eux-mêmes constatent une grande augmentation de la complexité de ces jugements.

Voilà quel est l’enjeu de la participation des citoyens : l’augmentation de l’enfermement et de la sévérité pour des affaires « graves », qui « portent quotidiennement atteinte à la sécurité et à la tranquillité » des Français ; comme si les délits économiques et financiers n’étaient pas aussi graves et ne portaient pas atteinte aux citoyens…

Loin de nous inscrire dans cette vision dangereuse, nous nous prononçons pour une participation des citoyens qui prenne modèle sur l’existant : des citoyens experts comme les assesseurs qui siègent au sein des tribunaux pour enfants ou bien les représentants syndicaux au sein des tribunaux prud’homaux.

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