Plus qu’une explication de vote, je voudrais faire une observation générale à la suite des avis exprimés par M. le rapporteur et M. le ministre.
À propos de la liste des délits entrant ou non dans le champ de compétence de ce tribunal, on a beaucoup parlé de « cohérence ». Vous-même, monsieur le rapporteur, avez tenté de rendre le dispositif plus cohérent. Mais il y a tout de même une certaine cohérence, et elle est déjà présente dans le projet initial.
Ainsi les délits visés sont-ils très connotés socialement et touchent-ils particulièrement les catégories populaires. Parce qu’ils sont fortement médiatisés par les journaux locaux, et surtout par la télévision – certains de ses journalistes ou animateurs se font quotidiennement les spécialistes de ce genre de « sujets » –, ces délits courants ternissent le « vivre ensemble » dans les quartiers populaires. Évidemment, dans les quartiers qui le sont beaucoup moins, c’est bien connu, on ne vit pas beaucoup ensemble : on vit entre soi !
Votre refus de sortir de cette logique est manifeste. Ainsi, lorsque nous proposons d’ajouter les délits financiers ou le trafic de stupéfiants à la liste – vous pouvez certes y voir de la provocation de notre part puisque nous sommes hostiles au principe ! –, vous ne nous donnez aucune raison valable pour vous y opposer.
Notre collègue Jacques Mézard soulève le problème des infractions connexes aux infractions entrant dans le champ de compétences du tribunal correctionnel citoyen. Ces dispositions nous entraînent dans une complexité très grande et aboutissent à de multiples incohérences puisque les infractions connexes peuvent être extrêmement diverses.
Vous vous préoccupez de la façon dont la société apprécie les décisions de justice. Toutefois, il faudrait se demander comment les auteurs d’infractions, qui sont aussi nos concitoyens, comprendront qu’ils soient renvoyés soit devant le tribunal correctionnel dit « citoyen » – avec tout ce que cette qualification peut avoir d’ambigu, cela a été dit –, soit devant le tribunal correctionnel composé uniquement de magistrats professionnels, ou encore devant le tribunal correctionnel comprenant d’ex-juges de proximité.
Quid de l’égalité des citoyens devant la justice ? Ces dispositions ne font que complexifier le fonctionnement de la justice aux yeux de nos concitoyens.