Intervention de Catherine Tasca

Réunion du 18 mai 2011 à 14h30
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Article 3

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca :

Cet amendement de suppression de l’article 3, qui introduit dans le code de procédure pénale des dispositions applicables devant le tribunal correctionnel citoyen, traduit notre opposition fondamentale à la création d’un tribunal comprenant des citoyens assesseurs.

Nous entrons là dans le déroulement concret de l’audience.

Toute l’ambiguïté du projet de loi tient à ce qu’il ne modifie pas en profondeur la procédure actuelle, et cela pour des considérations tenant au rendement de la justice : la procédure correctionnelle continue à reposer sur l’examen d’un dossier relatant une procédure d’enquête écrite, à laquelle vient s’ajouter une dose d’oralité, obligatoire pour permettre aux citoyens assesseurs de comprendre et de suivre les débats.

Selon l’étude d’impact, « les citoyens assesseurs seront accueillis au sein de la juridiction par le personnel de justice (magistrats, greffiers, fonctionnaires). Ils bénéficieront de sessions de présentation du fonctionnement de la justice pénale. » Mme Klès nous a décrit, avec humour, leur probable déroulement…

« Après cette familiarisation avec la chaîne pénale, les citoyens assesseurs seront amenés à exercer leur responsabilité éminente qui est celle de juger ».

À l’issue de cette familiarisation, les citoyens assesseurs sont donc convoqués pour siéger à l’audience. Avant l’ouverture des débats relatifs à la première affaire qu’ils sont amenés à juger, l’article 3 prévoit que, le président rappelle aux citoyens assesseurs qu’ils sont tenus de respecter les prescriptions de l’article 304 du code de procédure pénale : il s’agit du serment des jurés d’assises, que l’on n’a pas cru bon de faire prêter aux citoyens assesseurs, mais auquel ils doivent se conformer !

Puis, après avoir constaté l’identité du prévenu, donné connaissance de l’acte qui a saisi le tribunal et ordonné aux témoins de se retirer, le président ou le juge désigné par lui « expose » – c’est l’alinéa 6 –, « de façon concise, les faits reprochés au prévenu et les éléments à charge et à décharge figurant dans le dossier ».

La procédure change donc un peu de nature : elle devient plus orale, même si, selon l’alinéa 11, le président doit veiller « à ce que citoyens assesseurs puissent prendre utilement connaissance du dossier ».

Toutefois, rien n’est prévu pour que les citoyens assesseurs prennent connaissance du dossier en dehors du temps de l’audience. L’accès au dossier aura lieu pendant le temps de l’audience, ce qui pourra avoir deux conséquences : soit le temps de l’audience sera considérablement rallongé pour permettre aux citoyens assesseurs de comprendre le dossier ; soit, pour ne pas rallonger les débats, cet accès au dossier sera réduit à sa plus simple expression.

Dans la seconde hypothèse, les citoyens assesseurs seront très démunis par rapport aux magistrats professionnels et ne seront pas à même d’apporter un concours éclairé. Or c’est plutôt cette solution qui sera la règle, car le temps d’audience ne pourra pas être indéfiniment rallongé, sauf à risquer de paralyser complètement le système : Jean-Paul Garraud, responsable de la justice à l’UMP, a d’ailleurs exprimé cette crainte dans son rapport sur le sujet.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion