C’est le cas de le dire !
Plus sérieusement, monsieur le garde des sceaux, le fait que le délibéré intervienne directement après l’audience est, quelles que soient les configurations, tout à fait ordinaire, et pas simplement dans le cadre d’une comparution immédiate. Là n’est donc pas le problème.
La difficulté soulevée par cet article est liée à la « formation », par le président, des citoyens assesseurs, lesquels, je le rappelle, siégeront au maximum huit jours par an. Ces derniers devront ainsi être instruits « des éléments constitutifs et, le cas échéant, des circonstances aggravantes de l’infraction devant être établis pour que la culpabilité puisse être retenue dans les termes de la prévention. »
Vous imaginez ce que cela peut représenter pour des citoyens assesseurs qui n’ont aucune expérience ni compétence en ce domaine !
De la même manière, le président sera chargé d’expliquer les problèmes juridiques liés à la tentative. Il n’est pas toujours simple de comprendre la sanction de la tentative par rapport à celle de l’acte. Lorsque le prévenu est poursuivi en qualité de complice, il revient encore au président d’éclairer les citoyens assesseurs. Qu’est-ce qu’un complice ? Par rapport à l’auteur principal, quelle sanction risque-t-il ? À chaque fois, à chaque audience, il faudra expliquer aux malheureux citoyens assesseurs l’ensemble de ces principes.
Monsieur le garde des sceaux, vous êtes, j’en suis convaincu, un homme de bon sens. Vous savez quelle est la situation des tribunaux correctionnels : les dossiers s’y accumulent et les magistrats rencontrent des difficultés pour les répartir et cherchent par tous les moyens à les orienter vers le juge unique, la comparution immédiate ou toute autre procédure particulière !
Comment pouvez-vous prétendre vouloir améliorer le fonctionnement de la justice avec un mécanisme aussi lourd, qui concernera, chaque année, des dizaines de milliers d’affaires ? À moins que les moyens dont vous allez disposer ne soient affectés qu’aux deux cours d’appel désignées pour expérimenter ces nouvelles dispositions !
Le système que vous voulez mettre en place n’a strictement aucun sens, il ne répond pas aux besoins de nos magistrats ni à ceux de la justice. La réalité, c’est que les magistrats, dans bien des cas, demandent aux avocats et au procureur de faire preuve de concision parce que les dossiers s’accumulent ! Et vous décidez que toute une série d’affaires, pas forcément les plus graves, celles qui vous paraissent les plus médiatiques, bénéficieront d’une procédure beaucoup plus longue.
Tout cela n’est pas sérieux, et je pèse mes mots.