Monsieur le garde des sceaux, tout à l’heure, vous nous avez indiqué que nous partagions le constat suivant : la justice va mal. J’en suis d’accord. Mais un fossé d’incompréhension se creuse ensuite. Malgré vos conclusions, vous ne voulez rien entreprendre.
Permettez-moi d’utiliser une métaphore employée dans le monde médical, milieu que je connais mieux que celui de la justice. J’arriverai peut-être ainsi à vous faire comprendre ce que nous ressentons à propos du présent projet de loi.
La justice va mal, très mal même. Elle est exsangue, en état de choc.
En matière médicale, lorsqu’une personne est en état de choc, on ne fait pas rien, mais, en tout cas, on ne la bouge surtout pas. Sur place, le cas échéant, on arrête l’hémorragie, on rétablit sa volémie en lui injectant par perfusion du sang, des sérums hyperglucosés, on la met sous oxygène. Une fois son état stabilisé et passé l’état de choc, on la transporte alors à l’hôpital. Éventuellement, on tente la greffe de foie, de rein, de cœur, on met en place une thérapie expérimentale si on la pense utile.
Aujourd’hui, je le répète, la justice va très mal ; elle est en état de choc. Ne tentons pas une greffe sans avoir réalisé au préalable les tests nécessaires. Une telle intervention se prépare et ne se fait pas sur un sujet en état de choc. Mettons la justice sous perfusion. Donnons-lui les moyens permettant de stabiliser son état. Après, oui, monsieur le garde des sceaux, on peut envisager des réformes, mais en prenant le temps d’organiser la concertation, d’avancer avec précaution, et en s’assurant que les mesures retenues soient réellement efficaces et bénéfiques.