Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 18 mai 2011 à 21h30
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Article 17

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Mon collègue vient de le souligner, nous parvenons ici à un volet important du projet de loi, celui du jugement des mineurs, d'autant plus qu'il est resté assez ignoré, notamment des médias, ce que nous regrettons.

L’article 41 de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite « LOPPSI 2 », a introduit un article 8–3 au sein de l’ordonnance de 1945 prévoyant que « le procureur de la République peut poursuivre un mineur devant le tribunal pour enfants selon la procédure prévue à l’article 390–1 du code de procédure pénale » – citation à personne par greffier ou officier de police judiciaire sur instruction du procureur de la République – « si des investigations supplémentaires sur les faits ne sont pas nécessaires et que des investigations sur la personnalité du mineur ont été accomplies, le cas échéant à l’occasion d’une procédure engagée dans les six mois précédents ou d’une procédure ayant donné lieu à une condamnation dans les six mois précédents. »

Le Conseil constitutionnel a considéré, dans sa décision du 10 mars 2011, que « ces dispositions sont applicables à tout mineur quels que soient son âge, l’état de son casier judiciaire et la gravité des infractions poursuivies ; qu’elles ne garantissent pas que le tribunal disposera d’informations récentes sur la personnalité du mineur lui permettant de rechercher son relèvement éducatif et moral ; que, par suite, elles méconnaissent les exigences constitutionnelles en matière de justice pénale des mineurs ; que l’article 41 doit être déclaré contraire à la Constitution ».

Le présent article propose une nouvelle procédure censée tenir compte des observations de la décision du Conseil constitutionnel. Elle prévoit que le procureur de la République peut poursuivre devant le tribunal pour enfants, toujours selon les formes de l’article 390–1 du code de procédure pénale, des mineurs âgés d’au moins treize ans lorsqu’il leur est reproché d’avoir commis des délits punis de cinq ans d’emprisonnement et des mineurs d’au moins seize ans quand il leur est reproché d’avoir commis des délits punis de trois ans d’emprisonnement.

La convocation est délivrée au mineur par un officier de police judiciaire dans les locaux du commissariat, soit directement après une période de garde à vue, soit après que le mineur a été invité à s’y présenter pour la recevoir.

La convocation ne peut être délivrée que si des investigations sur les faits ne sont pas nécessaires et que des investigations sur la personnalité du mineur ont été accomplies à l’occasion de la procédure en cours ou d’une procédure antérieure à un an, le cas échéant en application de l’article 12 de l’ordonnance de 1945, aux termes duquel le « service de la protection judiciaire de la jeunesse compétent établit, à la demande du procureur de la République, du juge des enfants ou de la juridiction d’instruction, un rapport écrit contenant tous renseignements utiles sur la situation du mineur ainsi qu’une proposition éducative ».

Le mineur doit être assisté d’un avocat désigné par lui ou commis d’office. La convocation est adressée au mineur et aux parents, au tuteur, à la personne ou au service auquel le mineur est confié. Quant à l’audience, elle doit se tenir dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours et supérieur à deux mois.

Cette procédure, qui existe pour les majeurs, consiste, pour le parquet, à faire convoquer en justice un mineur âgé d’au moins treize ans lorsqu’il lui est reproché d’avoir commis un délit puni de cinq ans d’emprisonnement. Si le procureur choisit ce mode de saisine du tribunal, c’est dans le but de favoriser une comparution immédiate du mineur, puisque, je le répète, l’audience doit se tenir dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours et supérieur à deux mois.

Le dispositif se calque donc sur la procédure pénale applicable aux majeurs : à l’évidence, l’excuse de minorité n’existe plus.

Par ailleurs, le recueil de renseignements prévu à l’article 12 de l’ordonnance de 1945 est le fruit non pas d’une investigation, mais d’une simple enquête rapide, se résumant à un entretien sommaire avec le mineur au dépôt et à une rencontre avec ses parents. Très « judicieusement », monsieur le rapporteur, vous avez préféré au recueil de renseignements de l’article 12 celui de l’article 8 de la même ordonnance, plus complet. Nous ne pouvons que le regretter.

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