Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 18 mai 2011 à 21h30
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Article 29

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Il faut dire que, depuis cinq ans, le Gouvernement et sa majorité ne cessent de montrer du doigt les jeunes, et même les tout jeunes, dès l’âge de trois ans !

« Préférer le terme “enfant” à celui de “mineur” » ?... Raté !

« Considérer les mineurs “dangereux” d’abord comme des enfants en danger » ?... Raté !

« Défendre les grands principes de l’ordonnance » et, surtout, « préserver son esprit » ?... Raté !

Même si vous prétendez conserver à la justice des mineurs ses spécificités, monsieur le ministre, comment pouvez-vous en préserver l’esprit dès lors que vous vous éloignez des principes qui la fondent en cassant l’unité entre le juge des enfants et le tribunal pour enfants et en créant, en plus, un tribunal correctionnel pour mineurs semblable au tribunal correctionnel des majeurs ?

« Fixer l’âge de la responsabilité pénale au-dessus du seuil de l’inacceptable » ?... Raté ! La majorité des pays européens ont fixé l’âge de la responsabilité pénale à quatorze ans ou plus.

« Défendre une justice spécialisée jusqu’à 18 ans » ?... Raté ! Vous vous apprêtez à retourner au droit commun, donc non spécifique, à partir de l’âge de seize ans.

« Déployer les moyens nécessaires » ?... Raté ! Il suffit de voir la misère à laquelle est confrontée la PJJ, par exemple, mais nous aurons l’occasion de reparler de cette question.

« Soutenir les parents plutôt que les accabler » ? … Raté ! Vous faites même tout le contraire ! On n’arrête pas de les culpabiliser ! Et certains s’insurgent même contre ceux qui vivent de l’assistance…

« Enfin, instaurer une politique volontaire de prévention de la jeunesse » ?... Raté ! La prévention, ça suffit, nous répondez-vous, il est temps de passer à la sanction !

Tout cela est bien dommage, d’autant que la France a été l’initiatrice, en quelque sorte, de principes ô combien généreux pour la jeunesse, qui ont été, au fil du temps, repris au niveau international, et il reste encore beaucoup à faire en la matière. Mais nous, enfin, vous, devrais-je dire, vous faites marche arrière !

Vous avez voulu une fois encore nous prouver que vous étiez « dans les clous ». Mais non ! Le Conseil constitutionnel s’est prononcé tant sur la procédure que sur les tribunaux, et vous modifiez la procédure s’agissant de la justice des mineurs, en la rapprochant de celle des majeurs ; si vous gardez le tribunal pour enfants – vous ne pouviez tout de même pas le rayer de la carte des tribunaux ! –, vous lui ajoutez un tribunal correctionnel pour mineurs, compétent pour juger les infractions commises par les mineurs récidivistes âgés de plus de seize ans.

Ce tribunal correctionnel pour mineurs sera donc amené à juger de très nombreux jeunes, mais cette justice des mineurs-là ressemblera à s’y méprendre à la justice des majeurs !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion