L’article 29 constitue l’un des points forts de ce texte, avec la création du tribunal correctionnel pour mineurs.
Si l’on en croit l’exposé des motifs, cette création est justifiée par la volonté de « faire comprendre aux intéressés la nécessité de sortir de l’engrenage de la délinquance ».
Passons sur l’angélisme et voyons le postulat : il faut réprimer !
Pour notre part, nous estimons que cet article ouvre une nouvelle brèche dans la spécificité du droit pénal des mineurs. L’oralité des débats, y compris en séance publique dans cette enceinte, c’est bien, mais il est toujours fort intéressant de lire, et de lire en particulier l’étude d’impact d’un projet de loi, où figure, très objectivement exposé, ce que le Gouvernement entend faire.
Or à la page 83 de l’étude d’impact du présent texte, on peut lire, monsieur le garde des sceaux, que la création d’un tribunal correctionnel pour mineurs « résulte d’une préconisation de la commission de réforme de l’ordonnance du 2 février 1945 présidée par le recteur Varinard ». Pour expliquer votre objectif, vous poursuivez en ces termes : « à la progressivité des sanctions doit correspondre une même progression dans les formations de jugement compétentes pour connaître des mineurs jusqu’à afficher une plus grande sévérité avec la comparution du mineur devant un tribunal correctionnel, dont la charge symbolique et la solennité apparaissent nécessairement plus fortes. »
Selon vous, cette option est la seule envisageable au regard du principe de spécialisation des juridictions des mineurs. « Aussi […], la composition de la juridiction de droit commun a été adaptée afin de prévoir la présence d’au moins un juge des enfants. »
« Le renvoi de certains mineurs devant cette juridiction présente l’avantage de permettre dans ces cas de juger également les coauteurs et complices majeurs. ». Là encore, c’est tout à fait révélateur !
Le dernier paragraphe se termine de la façon suivante : « Il paraissait donc assez justifié que ces mineurs, qui peuvent se voir infliger des peines suivant le régime applicable aux majeurs, comparaissent également devant une juridiction propre aux majeurs. ».
Les mineurs de plus de seize ans ont une situation particulière dans notre ordre juridique. En effet, pour eux, l’excuse de minorité peut être écartée à titre exceptionnel. Mais on vous fait confiance pour que, dérive aidant, l’exceptionnel devienne l’habituel !
Aux pages 83 et 84 de l’étude d’impact, on trouve donc la caractérisation des objectifs réels qui sont les vôtres, puisque c’est vous qui les avez écrites.
Voilà la réalité !
Le tribunal correctionnel pour mineurs ne comptera donc qu’un seul juge des enfants, les deux juges qui étaient des personnes d’expérience dans le domaine des enfants étant remplacés par deux juges professionnels. Mais on comprend mal l’objectif. Dans certains cas, vous ajoutez deux citoyens assesseurs qui, eux, sauf cas exceptionnel, n’auront bien évidemment strictement aucune compétence particulière dans ce domaine particulier !
Pour couronner le tout, le douzième alinéa de l’article 29 précise : « Le service de la protection judiciaire de la jeunesse est consulté ». Malheureusement, nous connaissons l’état de la protection judiciaire de la jeunesse et le grand manque de moyens qui la caractérise aujourd’hui !