Dire de l’industrie textile française qu’elle est en crise est une véritable évidence.
Les appétits des actionnaires, qui demandent des taux de rentabilité à deux chiffres, conduisent à une multiplication sans précédent des fermetures d’usines et autres délocalisations. Aujourd’hui, la situation est telle que les grossistes en textile s’inquiètent d’une possible flambée du prix des vêtements en raison des revendications sociales des salariés des pays producteurs.
C’est dire le niveau de la dépendance économique de la France et celui de la désindustrialisation dans notre pays.
À Rillieux-la-Pape, par exemple, près de Lyon, les ouvrières de Lejaby, que Guy Fischer est allé rencontrer, occupent le siège du fabricant de lingerie de luxe qui les emploie. En effet, leur employeur prévoit la suppression à partir du mois de novembre de 197 postes sur 653 et la fermeture de trois sites de production en Rhône-Alpes, dans l’Ain et en Ardèche.
Chez Playtex – autre exemple, cette fois dans mon département de l’Isère –, ce sont 71 postes qui vont être supprimés, et l’usine de La Tour-du-Pin risque d’être prochainement fermée. Voilà quelques jours, j’étais avec les salariés de cette usine à la sous-préfecture de La Tour-du-Pin pour négocier la convention de revitalisation mise en place à la suite de cette fermeture, et je peux vous garantir que la détresse de ces femmes était flagrante. Être témoin de leur incompréhension face à la fermeture de leur entreprise, alors qu’elles ont contribué pendant des années à la richesse de l’établissement, était assez douloureux.
Malheureusement, la liste pourrait être longue et les exemples nombreux. À chaque fois, les salariés nous font part des mêmes craintes quant à leur avenir et à l’impossibilité pour une grande partie d’entre elles – la plupart sont des femmes –, souvent proches de l’âge de la retraite, de trouver un emploi dans quelque branche que ce soit.
Je pense par exemple au témoignage de certaines femmes, notamment à celui d’un membre de la fédération CGT textile : beaucoup de ses collègues pensent qu’il n’y a plus rien pour elles après leur licenciement. Je pense aux inquiétudes des « filles de Lejaby », comme les appelle Guy Fischer, qui ont en moyenne 52 ans et plus de dix ans de maison et savent qu’elles auront du mal à trouver un nouvel emploi.
En 2003, plus de 200 postes avaient déjà été supprimés. Les licenciés, à cette époque, avaient cru à un reclassement possible. Sept ans plus tard, toutes ces filles – toutes ces « copines », comme elles disent – sont pour la plupart encore au chômage ou occupent un emploi à temps partiel dans le secteur des services à la personne, car c’est ce type de postes que vous leur proposez, monsieur le ministre ! Elles ont pourtant un vrai savoir-faire, elles peuvent apporter une vraie valeur ajoutée, mais les entreprises de notre pays refusent de reconnaître ces atouts à leur juste valeur et de rémunérer ces salariées comme elles devraient l’être.