Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 14 octobre 2010 à 9h30
Réforme des retraites — Article 4

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Cet amendement vise de façon plus générale le contenu de l’article 4. Il s’agit, en pratique, de supprimer l’alinéa 4 de ce texte, qui dispose : « Pour les assurés nés en 1953 ou en 1954, la durée d’assurance ou de services et bonifications permettant d’assurer le respect de la règle énoncée au I est fixée par un décret publié avant le 31 décembre 2010. »

En fait, il s’agit d’étendre, en utilisant cette fois la voie réglementaire, le principe d’accroissement du nombre des annuités permettant l’exercice du droit à la retraite aux membres de deux générations. Cette orientation conduira, naturellement, à accroître de quelques mois supplémentaires leur durée de cotisation.

Ceux qui sont nés en 1953 devront valider 40, 5 annuités et ceux qui sont nés en 1954, 41 annuités, avant que les retraités nés à partir de 1955 ne soient contraints de valider 41, 5 annuités, c’est-à-dire 166 trimestres.

Une telle démarche revient à demander aux personnes nées en 1953 d’avoir commencé de travailler à 20, 5 ans au plus tard, c’est-à-dire en 1973-1974, pour pouvoir, aux alentours de 2025, jouir de leur droit à la retraite, et, au cas où leur carrière ne serait pas complète, d’attendre quelques mois encore entre 2025 et 2030.

Or les générations nées en 1953 et 1954 n’ont pas échappé aux conséquences de la crise économique des années soixante-dix, une de ces crises qui n’a pas encore cessé de produire ses effets. Les générations des années cinquante subiront donc, comme les premières du baby-boom, celles de la fin de la Seconde Guerre mondiale et celles de la Libération, les premiers effets de la nouvelle règle à calcul mise en place par le projet de loi.

Cette règle veut que, de manière quasi annuelle, on procède à un nouvel ajustement de la durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d’une retraite à taux plein à concurrence de l’avancée constatée de l’espérance de vie moyenne de la population.

Rappelons tout de même, à ce stade du débat, qu’au train où vont les choses, ce principe peut conduire les générations des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix à devoir cotiser encore 20 à 30 trimestres de plus que le niveau auquel nous nous arrêterons, avec ce projet de loi, pour pouvoir jouir d’une retraite méritée.

Les personnes nées en 1953 et en 1954 sont, respectivement, au nombre de 804 700 et de 810 800. Quelle est l’espérance de vie de ces deux classes d’âge, puisque tel est le paramètre sur lequel vous fondez, monsieur le ministre, les nouvelles conditions de fixation de l’âge légal de départ en retraite ? Elle est respectivement, pour les hommes, de 64, 3 et 65 ans, et, pour les femmes, de 70, 3 et 71, 2 ans.

C’est dire qu’il ne faut abuser personne avec l’indicateur que représenterait l’espérance de vie. Vous faites payer au monde du travail l’allongement général de l’espérance de vie. La retraite devient comme la ligne d’horizon : on la voit devant soi, mais on ne la rattrape jamais.

Vous comprendrez donc aisément pourquoi nous refusons la mise en place de votre règle à calcul des annuités nécessaires, qui s’apparente, en réalité, à une scandaleuse spéculation sur la survie des générations !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion