L’agriculture a été, jusqu’à une période récente, très concernée par le dispositif des préretraites. Cette situation se justifiait par au moins deux raisons qu’il n’est pas inutile de rappeler, à cet instant, parce qu’elles constituent les meilleurs arguments en faveur du maintien de la possibilité, pour les agriculteurs, de partir à la retraite dès l’âge de 60 ans : la situation constatée de difficulté économique, d’une part, un état de santé dégradé ou précaire, d’autre part.
Or, aujourd’hui, la conjoncture économique est très défavorable, souvent même franchement mauvaise. Dans de nombreuses productions, beaucoup d’agriculteurs sont acculés à la cessation de leur activité.
S’il est heureusement envisageable de donner à sa carrière professionnelle une nouvelle orientation quand on est jeune, cela devient très difficile, voire impossible, après 55 ans.
Dès lors, l’âge de 60 ans n’est pas simplement la borne symbolique de la cessation de l’activité ; il est aussi un but que les agriculteurs en difficulté financière ou réglementaire doivent atteindre pour se libérer du carcan qui les enserre. Cet âge fatidique représente une limite difficilement dépassable pour ceux qui souhaitent arrêter leur activité dans des conditions à peu près décentes, à défaut d’être satisfaisantes.
À cet égard, je pense aussi à ceux qui doivent réaliser des mises aux normes environnementales de leurs bâtiments et pour qui effectuer ces travaux est économiquement peu réaliste. S’ils peuvent espérer s’en sortir « au bénéfice de l’âge », en partant à la retraite à 60 ans, leur infliger deux années supplémentaires d’activité les acculerait à cette alternative : s’endetter au risque de se mettre en difficulté ou cesser leur activité de façon anticipée.
Dans le contexte économique que nous connaissons, dégradé par plusieurs années consécutives de crise, ces situations sont beaucoup plus fréquentes qu’on ne le pense.
En outre, à l’usure physique vient s’ajouter la fatigue psychologique de personnes qui ont commencé jeunes leur carrière professionnelle et qui appartiennent à des générations ayant travaillé durement et presque sans répit. La plupart des agriculteurs qui arrivent aujourd'hui à l’âge de la retraite n’ont jamais pris de vacances. Ils ont parfois été malmenés par les crises agricoles, qui n’ont pas manqué de laisser des traces.
Pour être exhaustif dans la description des situations rencontrées, il faut évoquer les agriculteurs, parfois les agricultrices, qui sont seuls sur leur exploitation et ne peuvent compter que sur eux-mêmes, craignant la maladie ou l’accident, qui aurait pour eux des conséquences personnelles et économiques irréversibles. Le président de la FNSEA, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, M. Lemétayer, s’en est lui-même ému : il défend l’idée que l’on ne peut admettre le recul de l’âge de la retraite au-delà de 60 ans dans le domaine de l’agriculture.
Toutes ces raisons qui, en quelque sorte, ne sont que le reflet d’une réalité concrète me conduisent à souligner l’importance de l’amendement que défendra le groupe socialiste, visant à maintenir l’âge du départ à la retraite à 60 ans pour les agriculteurs.