Intervention de Odette Terrade

Réunion du 14 octobre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Article 7

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Sur cet article, notre vote sera cohérent avec notre position sur le relèvement de l’âge de départ à la retraite et de l’âge du bénéfice d’une retraite à taux plein, qui fait l’objet des articles 5 et 6 du projet de loi.

La crise que connaît aujourd’hui le monde rural n’est plus à démontrer. La situation économique et sociale des agriculteurs se dégrade de façon dramatique, nous en avons largement discuté au cours du débat sur la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Je rappellerai quelques chiffres, mes chers collègues, pour vous rafraîchir la mémoire : depuis juin 2009, plus de 40 200 dossiers ont été acceptés au titre du RSA, alors que la Mutualité sociale agricole, en raison d’une baisse de 34 % du revenu agricole, évalue à 75 000 le nombre des agriculteurs éligibles à cette prestation.

« Un paysan français se suicide chaque jour » titrait Le Figaro en avril dernier. Comme l’a rappelé à l’instant notre collègue Guy Fischer, le taux de suicide le plus élevé de toutes les catégories socioprofessionnelles est celui des agriculteurs.

Les conditions de travail dans ces secteurs sont particulièrement difficiles : pénibilité, exposition à des produits dangereux, risques professionnels importants, stress, charge de travail, absence de loisirs, paperasserie administrative de plus en plus importante, et ce sans avoir la possibilité de dégager des revenus ou des loisirs. Tout au long de leur vie, les paysans consacrent leur temps et leur énergie à un travail rude et mal reconnu, se levant tôt chaque matin, quel que soit le temps.

La modestie de leurs pensions, les plus basses de notre pays, d’un montant mensuel d’environ 500 euros, rend le report de l’âge du bénéfice d’une retraite à taux plein à 67 ans encore plus insupportable, en particulier pour les agricultrices.

Et pourtant, le 23 février 2008, le Président de la République s’était engagé à maintenir le pouvoir d’achat des retraités agricoles et à réduire les « poches de pauvreté », en s’attachant, en particulier, à améliorer la situation des conjointes et des veuves d’agriculteurs.

Pour ce qui concerne le monde agricole, le prétexte de l’allongement de l’espérance de vie n’a aucun sens, nous vous l’avons longuement rappelé. En effet, 40 ans d’activité dans cette profession contraignante usent autant aujourd’hui qu’il y a vingt ou trente ans.

Le comportement inflexible du Gouvernement à la suite des nombreuses et massives mobilisations de la rue démontre à quel point il est guidé par des orientations dogmatiques fondées sur l’iniquité sociale et le refus de dialogue.

Monsieur le ministre, vous avez abandonné depuis longtemps le monde paysan, désormais seul face à ses difficultés. Cela a été dit, la présidence de Nicolas Sarkozy sera celle des riches. Mais elle sera plus que cela, elle sera la fin d’un modèle envié en Europe et dans le monde. Il n’y a pas de mot pour qualifier ce grand gâchis.

En affaiblissant le niveau des retraites, en rendant inatteignable le nombre d’annuités, en fragilisant les plus démunis, vous ouvrez le champ aux assurances individuelles, complémentaires, aux retraites individualisées contre la retraite par répartition.

Vous ne pouvez refuser d’écarter du débat public ceux qui n’acceptent pas la précarisation et la paupérisation : ces manifestants qui, par millions, veulent défendre un modèle qui les protégerait contre les subprimes, les hedge funds, les paradis fiscaux comme les îles Caïmans, rongées par l’inflation et par la spéculation.

Parmi eux se trouvent les travailleurs agricoles qui, trop souvent, ont été les oubliés du Gouvernement, et parfois même les boucs émissaires dans les différents débats. Ils devraient, au contraire, être en première ligne tant ils participent à la conservation de notre patrimoine et de nos territoires.

C’est pourquoi notre groupe vous demande d’adopter cet amendement, mes chers collègues.

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