Je m’en voudrais de ne pas répondre à ces interventions, au moment même où nous entamons la discussion des articles ayant trait à la fonction publique. Je souhaite ardemment, mesdames et messieurs les sénateurs, que nous puissions aborder ces articles dans un esprit constructif ; je vous en remercie par avance.
Une question simple est à l’origine des dispositions des articles 8 à 24, relatifs à la fonction publique. Existe-t-il une raison objective d’écarter la fonction publique des mesures que nous prenons pour l’ensemble des autres catégories professionnelles de la Nation ? La convergence entre les régimes public et privé est-elle une nécessité ?
Certains répondent à cette question par la négative. Au contraire, loin de dire « non », je donne une réponse différente. Il convient, à mon avis, de trouver le juste milieu entre, d’un côté, des mesures qui donneraient aux fonctionnaires l’impression d’être stigmatisés, et, de l’autre, l’absence de mesures qui offrirait aux salariés du secteur privé un sentiment d’iniquité.
Très honnêtement, je suis frappé de constater que les déclarations de politique générale entendues récemment à l’Assemblée nationale, où nous abordons la fonction publique, se veulent pour la plupart favorables à la convergence des régimes. Loin de moi toute envie de polémiquer ! Toutefois, hormis les éléments de notre projet, je n’ai jusqu’à présent entendu aucune proposition émanant de l’opposition qui me conduise à penser que nous ayons omis une mesure évidente.
Je tiens à dire, au préalable d’une discussion qui devrait durer plusieurs heures – c’est très bien ainsi – que je n’ai aucun a priori sur votre capacité de proposition. Simplement, puisque nous sommes convaincus, comme je le suis, que l’équité préside à la convergence entre les régimes, je suis ouvert à toute idée qui, par mégarde, ne nous serait pas apparue lors de la rédaction du projet.
Je ferai plusieurs remarques pour répondre aux interventions des uns et des autres. La première d’entre elles porte sur les catégories actives, objet de l’article 8. On peut considérer, à juste titre, comme Mme Schillinger et M. Domeizel, que les catégories actives sont, en quelque sorte, la reconnaissance de la pénibilité dans le secteur public. Historiquement, ce n’est pas faux.
Vous avez d’ailleurs noté en commission que j’ai immédiatement défendu cette position afin de justifier l’absence de mesures radicales concernant la fonction publique – « radicales » signifie ici que nous ne remettons pas en cause l’existence des catégories actives.
Cela étant dit, je tiens à souligner que les catégories actives ont été en grande partie définies à partir des années 1850, c’est-à-dire il y a approximativement 170 ans ! Aussi, le fait d’avoir, aujourd’hui, une réflexion sur l’évolution des catégories actives ne me semble pas particulièrement révolutionnaire. En effet, madame Schillinger, notre appréciation des catégories actives évolue nécessairement.
Par ailleurs, la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, que j’ai défendue ici aux côtés d’Éric Woerth voilà quelques mois, offre au « stock » des infirmières – pardonnez-moi cette expression triviale – le choix d’appartenir à la catégorie A ou à la catégorie B de la fonction publique, la première supposant de quitter en quelque sorte la catégorie active.
Ce choix revient aux infirmières du stock. Plutôt que de polémiquer en préjugeant de ce choix, attendons qu’il soit effectué pour savoir de quoi il retourne. Nous serons à même de voir si les infirmières préfèrent appartenir à la catégorie A ou B de la fonction publique.
Je le dis d’autant plus volontiers que les chiffres de la CNRACL montrent que l’espérance de vie des infirmières, critère de pénibilité, est identique à celui de l’ensemble des Françaises. Si nous prenions pour référence, pour cette catégorie professionnelle, un chiffre émanant de vos propres services, monsieur Domeizel, il serait évident que certaines mesures devraient être prises. Offrir aux infirmières un droit d’option est un exemple même de nuance.
En outre, je n’apprendrai à personne que les infirmières sont nombreuses à bénéficier du dispositif « quinze ans, trois enfants », qui leur permet de partir à la retraite plus tôt, avec une pension à jouissance immédiate, et de reprendre une activité professionnelle après liquidation de leur pension, dans le secteur privé cette fois.
Vous connaissez comme moi les chiffres qui ont été établis à cet égard. D’après la CNAV, près de 58 % des infirmières exercent une activité salariée après la liquidation de leur pension, tandis que 12 % à 15 % d’entre elles épousent par la suite une profession libérale. Ainsi, 70 % à 75 % des infirmières continuent d’exercer une activité professionnelle après leur passage dans la fonction publique.
Ainsi, je rappelle que l’espérance de vie de cette catégorie professionnelle est la même que celle des Françaises, qu’elles exercent une activité professionnelle après avoir liquidé leur retraite et qu’enfin nous leur proposons une option plutôt que de leur imposer un choix. De ce point de vue, nous sommes plutôt dans la nuance que dans la coercition.
Madame Schillinger, je suis très sensible à la question que vous avez soulevée à propos des activités des sapeurs-pompiers. Nous sommes, toutes opinions politiques confondues, particulièrement attachés et reconnaissants à cette catégorie professionnelle, qui exerce un métier pénible, voire dangereux.
Je m’empresse de vous dire que, dans le cadre de fonctions antérieures à celle que j’ai l’honneur d’exercer aujourd’hui, j’ai pu recevoir, en tant que président de la MEC à l’Assemblée nationale, pendant près de trois mois, tous les syndicats de sapeurs-pompiers et écouter leurs doléances…