Cet amendement découle de notre opposition de principe à l'allongement de la carrière des agents du secteur public qui, soumis à des sujétions spécifiques, disposent aujourd'hui de modalités propres de leur départ à la retraite.
Toujours plein d'imagination, le projet de loi prévoit de porter à 57 ans l'âge à partir duquel certains agents, nés après le 1er janvier 1961, pourraient faire valoir leurs droits à pension.
Par construction, le dispositif mis en place est évidemment appelé à s’amplifier année après année. Il s'agit en fait d'un dispositif inflationniste, au sens où le nombre d’agents touchés par son application augmentera de manière régulière jusqu'au 1er janvier 2018, qui sera la première date concernant pleinement les agents intéressés.
Notons toutefois qu’certains fonctionnaires pourraient être contraints à faire valoir leurs droits à pension avant cette date, quitte à supporter évidemment le poids éventuel d'une décote plus ou moins importante.
On rappellera tout de même que les professions visées ici présentent des caractéristiques de pénibilité avérées, puisqu’il s’agit des sapeurs-pompiers professionnels, des agents de salubrité des collectivités territoriales, ou encore des ouvriers professionnels et des aides soignantes de nos hôpitaux.
Ces personnels connaissent de manière générale des conditions de travail très spécifiques et contraignantes. Ainsi, nombre d’entre eux sont soumis à des contraintes de nuit ou des astreintes de sécurité. De fait, ces contraintes spécifiques participent d’une pénibilité qu’il convient de reconnaître.
On peut d'ailleurs s'étonner que le Gouvernement, qui se vante de faire entrer par la grande porte la prise en compte de la pénibilité dans le calcul de la retraite, commence par imposer à ses propres agents – et aux fonctionnaires des deux autres fonctions publiques – deux ans de services supplémentaires.
Nous sommes évidemment opposés à une telle approche qui néglige, entre autres choses, le fait que travailler dans un milieu insalubre ou dans l'obscurité – je pense par exemple aux égoutiers – est un facteur avéré de réduction de l'espérance de vie.
Ainsi, une étude du comité d'hygiène et de sécurité de la Régie autonome des transports parisiens avait montré que ses personnels employés à l'entretien des installations souterraines du métro – par exemple ceux affectés aux réseaux électriques ou au renouvellement de l’air – avaient une espérance de vie inférieure de cinq ans à la moyenne.
Nous constatons qu’aucune partie du rapport ne fait appel à la moindre statistique pour justifier de la mesure prise en direction des fonctionnaires en service actif. Faut-il croire que ces derniers sont tous en bonne santé ? Il y a dans cet hémicycle un certain nombre d’élus qui connaissent bien les métiers dont il s’agit, et ils savent que la réponse à cette question est malheureusement négative. Ils peuvent témoigner des nombreuses demandes de reclassement professionnel faites, avant leur départ à la retraite, par ces agents de la fonction publique.
Nous ne pouvons évidemment pas accepter une telle orientation du projet de loi et invitons le Sénat à voter notre amendement.