Intervention de Michel Thiollière

Réunion du 4 février 2009 à 15h00
Communication audiovisuelle — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Michel ThiollièreMichel Thiollière, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à la suite de Mme Catherine Morin-Desailly, dont je salue la force des convictions et la qualité de la contribution, je reviendrai sur quelques-unes des étapes ayant jalonné nos travaux, notamment pour l’établissement des conclusions de la commission mixte paritaire.

Je reviendrai sur les thèmes de l’indépendance, de la diversité et de la confiance.

Le mot « indépendance » a souvent été utilisé et débattu, à juste titre, au long de nos discussions. Pour ce qui concerne les journalistes, nous avions souhaité – et la CMP nous a suivis sur ce point important – inscrire dans la loi des dispositions fondamentales de leurs conventions collectives garantissant leur indépendance.

Nous avons également beaucoup parlé de la nomination des présidents des sociétés nationales de programme. Nous avions souhaité qu’elle s’effectue dans la transparence et dans un esprit de responsabilité.

La nomination par le Président de la République nous a semblé source de transparence et d’efficacité, mais elle doit être accompagnée de deux garanties supplémentaires, qui ont été consacrées par la CMP : la nécessité d’un avis conforme du Conseil supérieur de l’audiovisuel et un avis des commissions des affaires culturelles du Sénat et de l’Assemblée nationale, qui, par le biais d’auditions publiques, pourront juger de la pertinence des candidatures présentées et des projets les sous-tendant et pourront s’y opposer à la majorité des trois cinquièmes de leurs membres.

Nous avons par ailleurs beaucoup débattu du problème de la révocation des présidents des sociétés nationales de programme. Fort heureusement, la révocation est loin d’être une mesure fréquente, mais il faut prévoir un encadrement suffisant, ce que ne fait pas la Constitution, dont l’article 13 ne vise que la nomination par le Président de la République, sans nullement évoquer la révocation.

C’est la raison pour laquelle nous avions souhaité, ici au Sénat, proposer des avancées par rapport à la rédaction initiale du projet de loi, qui ne faisait aucune mention du rôle du Parlement dans la procédure de révocation.

Nous avons donc essayé d’échafauder un système novateur. Cela étant, eu égard au risque d’anticonstitutionnalité qu’il présentait, nous avons préféré, pour éviter de retomber dans une forme de néant juridique, nous ranger en CMP à l’avis de l’Assemblée nationale, tout en conservant l’exigence, introduite par le biais de l’adoption d’un amendement déposé par M. Michel Mercier, d’un vote à la majorité absolue au sein du CSA.

En ce qui concerne maintenant la diversité, il s’agit d’une valeur forte que l’on doit retrouver, faire entendre et faire voir à travers tous les programmes de radio ou de télévision, lesquels doivent en outre répondre à la diversité de nos concitoyens.

Je ne reviendrai pas sur la création de l’entreprise unique, qu’a évoquée Catherine Morin-Desailly. Cette institution sera à la fois garantie dans son fonctionnement et garante d’une forme de communauté nouvelle. Des échanges et des partenariats entre les différentes chaînes composant l’entreprise France Télévisions, notamment, seront mis en place. De ce point de vue, l’architecture de France Télévisions se rapproche de celle qui prévaut à Radio France depuis maintenant bon nombre d’années, à la satisfaction tant du personnel que des auditeurs.

Nous avons souhaité promouvoir le multilinguisme dans les programmes de France Télévisions, en rendant systématiquement accessible la version originale des œuvres étrangères. D’une certaine manière, les nouveaux programmes de la télévision publique devront être une fenêtre ouverte sur le monde tel qu’il est aujourd’hui, dans sa diversité linguistique.

Il a souvent été question de média global. C’est dans cette perspective que se construit aujourd’hui la nouvelle entreprise France Télévisions. Le média global doit être un service nouveau apporté à nos concitoyens. Nous avons notamment choisi de rendre gratuite la télévision de rattrapage publique, qui permettra pendant une semaine à tous nos concitoyens de revoir sur internet les différents programmes de France Télévisions.

Parallèlement à la suppression de la publicité, nous avons souhaité l’émergence du parrainage des programmes, qui est à la télévision ce que le mécénat est aux arts plastiques. Ce parrainage ne doit pas, pour autant, devenir un tunnel publicitaire accompagnant les émissions. Il constitue une forme de signature, donnant la possibilité à des entreprises de soutenir une identité et une qualité nouvelles des programmes.

Nous avons également voulu associer les téléspectateurs à l’évaluation des programmes. C’est pourquoi nous avons mis en place un conseil des programmes, chargé d’évaluer l’évolution des programmes, leur densité et leur qualité. Nous tenions à cette mesure, qui a été inscrite dans les conclusions de la CMP.

Nous avions en outre pour objectif de permettre au Parlement de jouer un rôle encore plus actif, notamment en ce qui concerne la définition des contrats d’objectifs et de moyens et des cahiers des charges. Il aura ainsi une mission d’évaluation et de validation des orientations prises par les chaînes. Ces mesures ont elles aussi été acceptées par la CMP.

Dans le même esprit, nous avons tenu à renforcer les pouvoirs du CSA, qui pourra notamment saisir l’autorité de la concurrence, émettre un avis sur les textes réglementaires. Il disposera par ailleurs d’une possibilité d’astreinte étendue. Le texte du Sénat a été maintenu sur tous ces points.

Comme l’a rappelé Catherine Morin-Desailly, nous avions souhaité que le financement de l’audiovisuel public soit contrôlé et évalué par le CSA. La CMP n’a pas retenu cette proposition, estimant que cette mission relevait de la compétence du Parlement, qui s’en chargera chaque année.

En outre, la CMP a suivi nos préconisations quant à la transposition de la directive européenne.

Pour rendre service à nos concitoyens, qui doivent pouvoir se repérer dans le foisonnement des nouvelles chaînes offertes, nous étions favorables au maintien de la numérotation logique des chaînes de la télévision numérique terrestre, la TNT. La CMP a retenu ce principe.

Enfin, la CMP a rétabli la suppression de la publicité sur Réseau France Outre-mer, RFO, revenant sur une décision qui avait été prise au Sénat. En effet, il convient de respecter une forme d’équité entre la métropole et les territoires ultramarins, qui devront également bénéficier du passage au numérique.

Voilà donc, résumées très brièvement, les conclusions de la CMP, qui ont été établies principalement sur la base du texte issu des travaux du Sénat. Les échanges avec nos collègues députés ont été constructifs et ont permis de déboucher sur un accord.

Au terme d’une dizaine de jours de discussions, le Sénat a bâti un projet de loi qui permet d’aller plus loin. Après des mois de débats, marqués parfois d’incertitudes et d’inquiétudes, le Sénat, par son vote d’aujourd’hui, doit à mon sens accorder à l’audiovisuel public et à ses personnels toute sa confiance pour la mise en œuvre de la réforme et la construction de ce média global que nous appelons de nos vœux.

De la même manière, nos concitoyens doivent faire confiance aux chaînes de télévision et aux sociétés nationales de programme pour mettre en place un service public de qualité.

Nous avons mis en exergue des principes et des valeurs par le biais d’amendements et de propositions. Nous avons ainsi beaucoup insisté sur l’importance de la création, sur le fait que les valeurs de la République doivent se retrouver dans l’audiovisuel public, lien fort dans notre société, et sur la notion de proximité, quels que soient les territoires et les populations considérés.

Dans cette perspective, les nouvelles technologies ne sont pas une tyrannie qu’il faut subir, elles constituent au contraire un outil nouveau au service de nos concitoyens, en permettant de nouvelles pratiques et de nouveaux usages.

En définitive, seul le public jugera du travail accompli, seul le public tranchera ! On peut déjà observer que la suppression de la publicité et la qualité des programmes sont appréciées de nos concitoyens. Si nous avons été utiles à la mise en place de cette réforme, si le public est satisfait, nous aurons le sentiment d’avoir, ni plus ni moins, rempli notre devoir de parlementaires.

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