Intervention de Rachida Dati

Réunion du 13 janvier 2009 à 10h00
Questions orales — Suicides dans les prisons

Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice :

Madame la sénatrice, vous appelez mon attention sur les suicides en prison, ce qui est un vrai problème et l’a toujours été. Les cas ne sont pas plus nombreux qu’autrefois, mais nous sommes aujourd’hui beaucoup plus vigilants sur ce sujet. Le nombre de suicides en prison a toujours été considéré comme un drame pour le Gouvernement, quel qu’il soit, et pour son garde des sceaux.

Vous m’interrogez sur la suite que le Gouvernement entend réserver au rapport de l’Académie nationale de médecine qui s’est réunie le 21 octobre dernier.

La volonté de réduire le nombre de suicides dans les établissements pénitentiaires est générale : c’est une préoccupation de l’administration pénitentiaire et du ministère de la justice. D’ailleurs le projet de loi pénitentiaire qui sera débattu devant la Haute Assemblée dès le mois de février permettra aussi de prendre des mesures pour réduire le nombre des suicides en prison.

Le programme national de prévention du suicide en milieu pénitentiaire comprend plusieurs axes : la formation des personnels à l’intervention de crise, l’amélioration du repérage du risque suicidaire et de l’accueil des personnes écrouées, des préconisations relatives à l’aménagement des cellules et au renforcement de la pluridisciplinarité et l’accompagnement nécessaire des personnels, des codétenus et des familles après un suicide.

Sur les 23 000 surveillants, 12 500 membres des personnels pénitentiaires ont été formés aux programmes de prévention du suicide.

Le ministère de la santé participe à ces efforts de formation à la prévention du suicide via les directions générales des affaires sanitaires et sociales, les DRASS, en organisant des formations continues pluridisciplinaires, en région, de personnels sanitaires travaillant en établissement pénitentiaire et de personnels pénitentiaires.

Depuis la loi du 18 janvier 1994, la prise en charge sanitaire des personnes détenues a été transférée du service public pénitentiaire au service public hospitalier.

En matière de soins psychiatriques, 26 établissements pénitentiaires disposent de services médico-psychologiques régionaux qui peuvent recevoir en hospitalisation des personnes détenues des établissements pénitentiaires du ressort de ce service régional. Les autres établissements pénitentiaires bénéficient de l’intervention des secteurs de psychiatrie définis dans les protocoles par l’intermédiaire des 175 unités de consultations et de soins ambulatoires. Ce dispositif a considérablement amélioré la prise en charge des pathologies et troubles mentaux, même s’il se révèle encore insuffisant, du fait surtout de l’ampleur grandissante des besoins en prison. Mais il y a tout de même une avancée sur ces sujets.

On observe que tous ces efforts conjugués ont permis de diminuer le nombre de suicides qui, rapporté à la population pénale, est pour 2007 de 15, 2 pour 10 000 détenus, au lieu de 22, 8 pour 10 000 en 2002. Cependant, ce taux reste trop élevé. Nous faisons tout pour le diminuer, grâce à une prise en charge efficace et de qualité.

Si les progrès en ce domaine sont donc réels, les événements récents nous rappellent qu’ils sont fragiles. En 2008, 115 suicides ont été dénombrés, contre 96 en 2007, 93 en 2006 et 122 en 2005.

Le dispositif de prévention à l’égard des mineurs détenus a été renforcé au moyen d’une procédure spécifique de détection mise en place dès le 1er novembre 2008 et l’amélioration de la couverture psychiatrique des établissements pénitentiaires pour mineurs et des quartiers mineurs est assurée par la désignation d’un médecin pédopsychiatre référent.

Par ailleurs, un film de formation qui explicite les méthodes d’évaluation du potentiel suicidaire, réalisé à la demande du directeur de l’administration pénitentiaire, viendra compléter la formation initiale et continue des personnels pénitentiaires.

Enfin, j’ai confié le 3 novembre dernier au Dr Louis Albrand, médecin expert agréé par la Cour de cassation, la présidence d’une commission de professionnels et d’experts chargée d’établir, en lien avec le ministère de la santé, le bilan de l’action conduite en matière de lutte contre le suicide en milieu carcéral et de proposer de nouvelles actions concrètes d’amélioration du dispositif. Les conclusions de cette commission seront rendues très prochainement.

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