Si ce transfert devait être confirmé dans le texte définitif, il faudrait en tirer les conséquences sur le plan budgétaire. En effet, une dotation de plus de 110 millions d'euros est inscrite dans le projet de loi de finances pour permettre aux régions de financer ce dispositif.
J'aimerais que le Gouvernement nous indique, dans cette éventualité, à quel usage il compte réaffecter ces crédits.
Par ailleurs, la mesure phare du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale reste la création du contrat d'avenir, qui s'adresse aux bénéficiaires de minima sociaux.
Il s'agit d'un contrat d'une durée maximale de trois ans, signé avec des employeurs du secteur non marchand. Il comprend un accompagnement personnalisé pour son bénéficiaire et débouche sur une qualification. Dans le projet de budget, 383 millions d'euros sont inscrits pour financer cette mesure.
La seconde mesure centrale du plan de cohésion sociale porte sur la création des Maisons de l'emploi. Elles doivent favoriser la coordination entre les différents acteurs du service public de l'emploi, l'ANPE, l'UNEDIC, les missions locales, l'AFPA, etc.
En 2005, 75 millions d'euros seront consacrés au fonctionnement de ces nouvelles structures, notamment pour assurer le recrutement de 7 500 agents supplémentaires, et 45 millions d'euros seront affectés aux investissements nécessaires à leur mise en place.
L'autre nouveauté de ce projet de budget réside dans le recentrage du dispositif d'allégements de charges sociales, qui absorbe plus de la moitié des crédits disponibles.
La politique d'allégement du coût du travail peu qualifié, menée depuis une dizaine d'années, a produit des résultats positifs. Les estimations varient, mais l'on peut estimer qu'au bas mot 250 000 emplois ont été créés ou sauvegardés grâce à cette politique.
La loi « Fillon » du 17 janvier 2003 lui a donné une nouvelle impulsion en créant un mécanisme d'allégement dégressif de cotisations sociales pour les salaires compris entre 1 et 1, 7 SMIC. Ce dispositif a permis d'atténuer de 60 % l'impact de l'augmentation rapide du salaire minimum, décidée par le Gouvernement, pour sortir du système, que l'on peut qualifier d'aberrant, des SMIC multiples. La convergence des SMIC sera achevée l'an prochain : le SMIC horaire aura, au total, progressé de 18 % en trois ans.
Il n'est pas question de remettre en cause aujourd'hui cette orientation, mais simplement de recentrer le dispositif sur sa cible privilégiée, c'est-à-dire sur les plus basses rémunérations. L'expérience comme la théorie montrent en effet que c'est pour les postes les moins qualifiés, rémunérés autour du SMIC, que le coût du travail est un facteur déterminant de la création d'emplois.
Le projet de loi de finances prévoit donc de limiter le bénéfice de l'allégement de cotisations aux rémunérations inférieures à 1, 6 SMIC, au lieu de 1, 7 SMIC actuellement. Cette mesure permettra à l'Etat d'économiser 1, 2 milliard d'euros.
J'ajoute que la charge supplémentaire qui en résultera pour les entreprises sera compensée par d'autres mesures, notamment la suppression de la majoration de l'impôt sur les sociétés décidée en 1995.
Toujours dans le but de mieux cibler la politique d'allégement du coût du travail, le Gouvernement a décidé de consacrer 550 millions d'euros à une nouvelle aide à l'emploi destinée aux secteurs de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration. Ces secteurs rencontrent en effet des difficultés de recrutement particulièrement aiguës en raison de la faiblesse des rémunérations et de la dureté du travail.
Cette mesure n'est que transitoire, dans l'attente d'une dérogation européenne pour appliquer un taux réduit de TVA à ces entreprises. Je serais heureux, monsieur le ministre, que le Gouvernement puisse nous apporter quelques indications sur l'état d'avancement de ces négociations.
Pour terminer mon propos, je souhaiterais évoquer la maquette budgétaire que le Gouvernement a présentée pour préparer l'entrée en vigueur, l'an prochain, de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF.
Les crédits du travail seront répartis en cinq « programmes », eux-mêmes subdivisés en une vingtaine « d'actions ». Ils seront accompagnés de plusieurs dizaines d'indicateurs de performance, qui doivent nous permettre de mieux évaluer l'efficacité des politiques publiques.
A ce propos, j'aimerais vous faire part de quelques commentaires.
D'abord, la variété des indicateurs retenus permet bien de couvrir l'ensemble des politiques de l'emploi et du travail. Ils sont à la fois quantitatifs, fondés sur des données statistiques, et qualitatifs, construits à partir « d'enquêtes-qualité », menées régulièrement auprès des usagers du service public. Quelques-uns, toutefois, seront difficiles à interpréter, comme celui, par exemple, mesurant le pourcentage d'emplois situés dans les secteurs « délocalisables ». L'idée est séduisante, mais de multiples facteurs, notamment fiscaux, entraînant la délocalisation, il sera malaisé d'isoler l'impact propre de la politique de l'emploi.
Ensuite, certains indicateurs sont davantage des indicateurs de moyens que des indicateurs de performance : il est utile d'informer les parlementaires du nombre de maisons de l'emploi, mais, pour juger de la bonne utilisation des crédits, il serait plus instructif de connaître le taux de retour vers l'emploi des personnes concernées.
Ces quelques réserves ne ternissent cependant pas le jugement globalement positif que la commission a porté sur cette maquette budgétaire. Les quelques défauts de jeunesse que j'ai pu discerner pourront sans doute être corrigés d'ici à la présentation du prochain budget.
Au total, messieurs les ministres, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur l'adoption des crédits du travail pour 2005, ainsi que sur les articles 75 et 76 qui y sont rattachés, sous réserve, pour le second, de l'adoption d'un amendement que je vous présenterai à l'issue de la discussion générale.