II faut faire bénéficier les éducateurs, les formateurs, les enseignants d'une formation continue périodique pour qu'eux aussi s'adaptent aux nouvelles techniques et technologies. D'ailleurs, notre Haute Assemblée a fait une proposition en ce sens dans le texte de cohésion sociale.
Sur le plan financier, monsieur le ministre, votre budget s'accompagne une fois encore d'une pression financière accrue sur les entreprises pour alimenter le fonds d'apprentissage. N'allons-nous pas trop loin ? Le crédit d'impôt de 1 600 euros par apprenti, avec lequel nous souhaitons les appâter, ne doit pas, à mon sens, être affaibli par votre proposition de suspendre les exonérations de cotisations si le diplôme est obtenu rapidement. Nous risquons de décourager les entreprises qui se seront investies dans des référents ou des tuteurs de l'apprentissage et obtenir l'effet inverse du but recherché.
L'apprentissage est une filière de réussite dans laquelle les élèves, notamment ceux qui sont en difficulté scolaire, peuvent trouver une voie valorisante. Il faut encourager cette façon de s'élever par sa compétence et son savoir.
Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous faire part de notre rencontre, à Orléans, avec les jeunes du centre de formation des apprentis du bâtiment, à laquelle participait M. Laurent Hénart. Une trentaine de ces jeunes sont venus témoigner de leur travail, de leurs espoirs et de la joie que leur procurait leur réussite. Certains étaient là pour apprendre un métier après des études universitaires qui ne leur convenaient pas. Tous ont dit ? et M. le secrétaire d'Etat en était presque agacé ? qu'ils n'avaient pas été écoutés et qu'ils avaient été mal orientés à l'école, uniquement parce qu'ils n'étaient pas de mauvais élèves...
Nous avons également reçu ce même jour le témoignage de la fédération des bâtiments et travaux publics, qui souffrait de besoins criants de main-d'oeuvre et était prête à consentir beaucoup d'efforts pour améliorer la situation matérielle des apprentis, notamment par une adaptation des structures d'accueil pour les filles et par un développement des internats.
Le « Papy boom » va priver la France d'une main- d'oeuvre de qualité. Des milliers d'entreprises vont disparaître faute d'employés formés et motivés. La fédération des BTP, celle de la métallurgie et bien d'autres sont prêtes à s'investir. Ne les démotivons pas. ! Elles souhaitent donner aux hommes de demain la passion de ce qu'ils font et le goût de bien faire.
Bien évidemment, certains de mes collègues ont pu dire que votre réforme, monsieur le ministre, inquiétait les prestataires de formation comme les organismes privés ou l'AFPA. J'ai auditionné les plus hauts responsables de ces structures et, à ma grande surprise, j'ai rencontré des gens attentifs, intéressés, motivés et sereins.
Evidemment, la régionalisation de l'AFPA doit être bien préparée. D'ici à 2008, cette dernière bénéficiera de subventions publiques pour lui permettre de faire face à la concurrence des autres établissements privés. Le climat est, selon ses représentants, « calme et grave » puisqu'ils doivent envisager avec lucidité des licenciements inévitables.
Pour ce qui est de l'ANPE, qui approuve les contrats de professionnalisation, elle souhaite qu'une communication étroite s'installe avec l'UNEDIC, grâce aux technologies informatiques.
S'agissant des nombreuses associations qui gravitent autour de l'emploi, il faudrait établir un contrôle d'efficacité et de rentabilité pour encourager celles qui se mobilisent pour l'emploi et non pas celles qui vivent du manque d'emploi.
Pour conclure, messieurs les ministres, mes chers collègues, je traduirai ici les recommandations de la commission des affaires sociale : aucune insertion durable dans l'emploi ne peut réussir sans un accompagnement et/ou un temps de formation ; les organismes de formation ne doivent pas orienter la demande, mais répondre aux besoins des entreprises, je pense notamment à l'hôtellerie, au bâtiment ; il faut assouplir et revoir la durée et les horaires de travail des apprentis au moment où la branche BTP notamment s'est engagée à relever substantiellement leurs rémunérations ; il faut aussi améliorer la lisibilité des aides et organiser une mise en réseau de l'ensemble des acteurs de la formation et de l'insertion ; il faut que les futures maisons de l'emploi favorisent cette mise en réseau et qu'elles ne soient pas une « maison des chômeurs », mais « une niche pour l'emploi » ; il convient, enfin, de ne pas renforcer la pression financière sur les entreprises, c'est la raison pour laquelle je présenterai un amendement de suppression de l'article 75 rattaché.
Telles sont les inflexions que nous suggérons au projet volontariste que vous soutenez, monsieur le ministre, et auquel vous affectez les moyens financiers nécessaires. Nous gagnerons ainsi la bataille de l'emploi, car celui qui veut et entreprend trouve toujours un moyen, celui qui ne fait rien trouve toujours une excuse.