Intervention de Gaston Flosse

Réunion du 8 décembre 2008 à 22h00
Loi de finances pour 2009 — Article 43

Photo de Gaston FlosseGaston Flosse :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, décidément, les projets du Gouvernement concernant l’outre-mer ont au moins une qualité : la cohérence.

Qu’il s’agisse de la réforme de l’indemnité temporaire de retraite, l’ITR, du budget de l’outre-mer ou de la défiscalisation, tout va dans le même sens, celui du désengagement de l’État.

J’ai déjà eu l’occasion d’intervenir, voilà quinze jours, pour protester contre la sévère diminution du niveau de vie de nos fonctionnaires, puis, la semaine dernière, pour dénoncer un budget en trompe-l’œil, qui masque un réel désengagement de l’État en Polynésie française. Je dois aujourd’hui intervenir pour vous demander, mes chers collègues, de rejeter l’article 43 modifiant la loi de défiscalisation que nous avons votée il y a quatre ans.

Je connais, comme vous tous, l’argumentation développée par le Gouvernement. De grosses fortunes, grâce à la défiscalisation de leurs investissements outre-mer, s’exonéraient totalement de l’impôt sur le revenu. C’est immoral ; il faut mettre fin immédiatement à ce scandale !

Qui pourrait contester cela ? Personne, évidemment !

Je comprends que le Gouvernement veuille rendre impossible une totale exonération de la charge fiscale des citoyens les plus fortunés et j’approuve le principe de la démarche. Mais le meilleur moyen de parvenir à ce résultat est-il de pénaliser lourdement les 2 millions de citoyens qui vivent outre-mer ?

En effet, en jouant sur l’indignation, on se dispense de poser les vraies questions. Combien de gros contribuables ont-ils échappé totalement à l’impôt sur le revenu ? M. le secrétaire d’État parle de 1 200 foyers ; c’est assez modeste par rapport à une population de plus de 63 millions de Français…

Il existe 486 « niches » recensées, et le coupable serait l’investissement outre-mer ? M. Jégo veut-il faire de l’outre-mer un bouc émissaire pour ce qui ne va pas en métropole ? Ou peut-être ambitionne-t-il d’obtenir le titre de secrétaire d’État « contre » l’outre-mer ?

Nous avons déjà vu cette technique à l’œuvre lors de la réforme des retraites. On a mis en avant le scandale que constitueraient des pensions majorées de 40 000 euros par an, en oubliant de préciser que seule une poignée d’anciens préfets, amiraux ou trésoriers-payeurs généraux pouvaient se prévaloir de tels montants, et on a prétexté ces quelques exemples pour réduire de moitié – puis pour supprimer complètement pour les jeunes – les revenus de tous nos fonctionnaires d’État retraités.

Je crains que le plafonnement de la défiscalisation ne soit fondé sur les mêmes prétextes, pour atteindre les mêmes objectifs.

Le groupe de l’outre-mer du Conseil économique et social a étudié en détail ce projet de loi et a essayé de déterminer dans quel cas un riche contribuable pouvait échapper totalement à l’impôt sur le revenu des personnes physiques, l’IRPP. Il a donc pris l’exemple d’un salarié célibataire gagnant 266 000 euros par an, l’une des tranches de revenus les plus élevées. Son IRPP atteindrait environ 89 000 euros. Il peut être tenté de chercher à le réduire. S’il choisit l’investissement outre-mer, la réduction d’impôt à laquelle il aura droit sera de 50 % de « l’investissement » qu’il aura effectué. Pour éliminer complètement son impôt, il devra donc financer un projet outre-mer à hauteur de 178 000 euros, soit 67 % de son revenu. Cela paraît-il raisonnable, même en empruntant ? Évidemment non !

De surcroît, aux termes de la loi, il devra laisser outre-mer la plus grande partie de son apport. En définitive, son exonération d’impôt se limitera à un avantage net d’environ 35 000 euros, si tout s’est bien passé. Il n’aura donc pas économisé 100 % de l’impôt qu’il devait, mais seulement moins de 40 %.

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