Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 9 janvier 2007 à 21h45
Prévention de la délinquance — Demande de renvoi à la commission

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai l'honneur de présenter, au nom du groupe socialiste et des Verts, la motion tendant au renvoi à la commission du projet de loi relatif à la prévention de la délinquance.

Quatre mois après son examen en première lecture par le Sénat, nous nous retrouvons face aux mêmes conditions de discussion. Le Gouvernement continue à se complaire dans un affichage politique et médiatique. M. Sarkozy nous propose une énième série de mesures supposées être la panacée pour des maux qu'il n'a pas été capable d'endiguer en près de cinq ans, mais il ne dit rien, ou si peu, sur ce qui a été fait. Il persiste à ne pas évaluer les structures et les dispositifs existants, tels les centres d'éducation fermés.

Lorsque les chiffres et leur manipulation vous avantagent, vous brandissez ces chiffres comme un étendard. Mais lorsque les données relatives à la délinquance révèlent l'échec de votre politique, vous devenez avare de faits et de nombres.

Les raisons qui motivent le dépôt de cette motion tendant au renvoi à la commission sont diverses.

Tout d'abord, le temps imparti n'a pas permis aux parlementaires de procéder à des auditions satisfaisantes, notamment pour cette deuxième lecture, au regard des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

Même si nous avons pu rencontrer, lors de la première lecture, des syndicats de police et de travailleurs sociaux ainsi que les diverses associations des maires de France, lesquels ne sont d'ailleurs jamais parvenus à trouver un consensus, ce n'est pas suffisant.

Comme vous l'avez déclaré, monsieur le ministre, la prévention de la délinquance est une question extrêmement importante. Aussi, nous ne pouvons pas traiter ce projet de loi dans de telles conditions, simplement en raison des échéances électorales.

Ce texte va profondément modifier la vie de millions de personnes et dénaturer la nature des relations, d'une part, entre le maire et ses administrés, d'autre part, entre les travailleurs sociaux et les familles qu'ils suivent.

Entre les première et deuxième lectures, ce projet de loi a été sensiblement modifié. Le Gouvernement comme les députés de la majorité parlementaire ont largement profité des débats à l'Assemblée nationale pour proposer et faire adopter des mesures qui s'avèrent, au mieux, totalement superflues et simplement démagogiques, au pire, dangereuses pour les libertés individuelles et publiques.

Ce sujet est trop grave et les dispositions que vous proposez sont trop préoccupantes en termes de droits fondamentaux pour que la commission des lois se limite à un travail précipité.

Le simple fait que le chapitre III ait été complété par onze nouveaux articles traitant pêle-mêle de la résiliation du bail en cas de trouble de voisinage, de la transposition d'une décision-cadre européenne et de l'évacuation forcée en cas de violation des règles sur le stationnement des gens du voyage suffit à justifier le renvoi à la commission.

Les membres de la majorité parlementaire ont renforcé le caractère fourre-tout de ce projet de loi en y faisant cohabiter des mesures relatives à des domaines qui n'ont rien à voir avec la prévention de la délinquance.

Ces confusions et ces amalgames sont loin d'être anodins ; ils sont voulus et calculés. L'objectif n'est rien de moins que d'amalgamer prévention et répression, protection sociale et contrôle social, et de précariser ainsi les plus faibles.

D'ailleurs, le présent projet de loi présente des contradictions avec le texte réformant la protection de l'enfance, actuellement en discussion à l'Assemblée nationale.

Une fois encore apparaît la volonté de préemption du ministère de l'intérieur sur les autres ministères. Ainsi, celui-ci impose sa vision dans les domaines des affaires étrangères, de la justice, de la santé et des affaires sociales.

Notre demande de renvoi à la commission s'impose, d'autant qu'il est impératif que la commission des affaires sociales puisse, elle aussi, apporter un supplément d'analyses et de réflexions. Or elle n'a pas été invitée à participer aux dernières auditions.

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