Sans revenir sur les arguments qui viennent d'être développés, j'insisterai sur les points qui nous paraissent peu acceptables s'agissant de la définition des pouvoirs du maire, ainsi que sur certains dysfonctionnements qui nous semblent subsister.
En ce qui concerne tout d'abord les pouvoirs de police du maire, ce dernier, aux termes de l'article 1er, concourra non plus seulement à l'exercice des missions de sécurité publique, mais aussi à des actions de prévention de la délinquance.
Chacun a bien conscience, je crois, que cet ajout est avant tout symbolique, car l'étendue des pouvoirs de police du maire, qui peut déjà prendre des arrêtés de police aux fins de prévention, ne se trouve pas modifiée.
Par ailleurs - je souscris à l'analyse de Mme Assassi -, si cet article tend à confier au maire un rôle d'animateur et de coordonnateur de la politique de prévention de la délinquance sur le territoire de sa commune, il ne prévoit en réalité aucun transfert de compétences au profit des communes. Ce rôle d'animation et de coordination du maire est d'ailleurs limité, puisqu'il ne peut être rempli que « sous réserve des pouvoirs de l'autorité judiciaire et dans le respect des compétences du représentant de l'État ». Un cadre extrêmement précis est donc posé, de telle sorte que le pouvoir nouveau attribué au maire est essentiellement symbolique.
En outre, le projet de loi prévoit que les maires soient informés sans délai par les responsables locaux de la police ou de la gendarmerie nationales des infractions commises sur le territoire de leur commune.
Or il convient de rappeler que le principe de l'information des maires figurait déjà dans un décret de juillet 2002 et a été consacré par la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, s'agissant d'infractions causant un trouble grave à l'ordre public. Au travers de l'article considéré, cette notion de gravité disparaît et les maires seront désormais informés de l'ensemble des infractions causant un trouble à l'ordre public. Je crains donc une « surinformation » des maires, conduisant à priver de sa portée une mesure en apparence intéressante.
L'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, un amendement de la commission tendant à permettre aux maires d'être informés par le procureur de la République, sur leur demande, des suites judiciaires données aux infractions commises sur le territoire de leur commune.
Cependant, l'article 40-2 du code de procédure pénale fait déjà obligation au procureur de la République d'aviser le maire des poursuites décidées à la suite de leur signalement en application de l'article 40 du même code. De plus, le garde des sceaux a publié une circulaire, le 14 octobre 2004, visant à mettre en place un code de bonne conduite en matière de circulation de l'information entre le maire et le ministère public. Dans ces conditions, l'ajout de l'Assemblée nationale ne me semble pas très pertinent.
En ce qui concerne maintenant les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD, la rédaction du texte issue des débats au Sénat prévoyait de donner aux communes de plus de 10 000 habitants la faculté de créer un conseil de ce type. La généralisation des CLSPD par l'Assemblée nationale aux communes de moins de 10 000 habitants comprenant une zone urbaine sensible, au motif que, dans ce cas, la mise en place d'une politique coordonnée de prévention de la délinquance est nécessaire, peut se comprendre, toutefois son caractère obligatoire nous inquiète.
En effet, nous avons la conviction que les CLSPD ne peuvent avoir de véritable efficacité que lorsque leur création résulte d'une volonté exprimée par les maires et les acteurs de terrain. Autant que possible, ils doivent être animés par une équipe. Par conséquent, imposer la création de telles structures ne permettra pas d'obtenir des résultats satisfaisants.
Enfin, s'agissant des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, qui interviennent dans la prévention de la délinquance, nous nous interrogeons quant à la lisibilité du dispositif.
En effet, si le texte permet au président de l'intercommunalité de se substituer au maire dans ce domaine, puisqu'il présidera le conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance, il prévoit en même temps que le maire conservera l'intégralité de ses pouvoirs de police. Nous aimerions recevoir quelques éclaircissements sur ce point, car il y a là une contradiction.
Telles sont quelques-unes des raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de cet article, dont j'aurais pu critiquer chacun des alinéas.