Ainsi que mon ami Roland Muzeau vient de l'exprimer à l'instant même, il y a urgence à agir, au nom de l'emploi, du pouvoir d'achat des ménages les plus modestes, de notre indépendance énergétique et de la préservation de notre environnement.
Oui, il y a véritablement urgence à agir, mais pas de la manière que vous nous proposez, monsieur le ministre. Ce dont nous avons besoin, c'est non pas d'un palliatif, d'une échéance bien incertaine, mais bel et bien de l'arrêt du processus de privatisation de notre secteur énergétique.
D'autant que la rustine que vous nous suggérez est inacceptable. Après nous avoir chanté les saintes louanges de la concurrence, vous nous soumettez un dispositif qui permettra à certaines entreprises ayant fait jouer leur éligibilité de bénéficier d'un nouveau tarif intermédiaire entre les tarifs régulés et le marché libre de l'électricité. Et pour ne pas pénaliser les fournisseurs d'électricité non producteurs, vous décidez de faire peser cette baisse forcée des tarifs sur les gros producteurs d'électricité, c'est-à-dire sur EDF. Selon cette dernière, un tel système lui coûtera plusieurs centaines de millions d'euros par an en 2007 et en 2008. Bien entendu, ce sont les consommateurs, c'est-à-dire nous tous, qui paieront les dérapages du libéralisme.
Voilà où nous mène la main invisible, que les libéraux affectionnent tant. Pourtant, en dépit de ces effets pervers clairement démontrés, certains députés ont voulu aller plus loin en cherchant à privatiser de manière déguisée nos centrales nucléaires. C'est ainsi que des députés ultralibéraux, MM. Novelli et Bouvard, ont proposé à leurs collègues un amendement tendant à contraindre EDF à mettre à la disposition de ses concurrents un volume d'électricité au prix de revient du nucléaire et de l'hydraulique, léguant ainsi aux opérateurs les bénéfices d'un investissement national.
Cette solution irraisonnée est proprement scandaleuse ! Permettre à des fournisseurs privés d'avoir l'électricité des centrales nucléaires à prix coûtant sous prétexte que leur propriétaire ne doit pas être le seul à bénéficier de la rente du nucléaire et à faire du bénéfice sur la distribution est un raisonnement extrêmement simpliste. C'est oublier qu'EDF garantit l'accès à l'électricité aux ménages à moindre coût grâce à la rente nucléaire et qu'elle permet de financer le démantèlement des anciennes centrales et la construction de nouvelles. La sphère privée serait-elle en mesure d'en faire autant ? La réponse est indiscutablement non.
De même, une telle mesure, qui est contraire à l'intérêt de la nation, aurait été une source d'effets d'aubaine, annihilant tout investissement. En effet, les opérateurs privés auraient certainement été tentés d'acheter l'électricité au prix le plus bas pour la vendre plus cher à l'étranger, tout en laissant le soin à EDF de réaliser tous les efforts de production et de planification.
Fort heureusement, l'amendement en question a été rejeté à l'Assemblée nationale, mais je souhaitais souligner au sein de notre hémicycle l'indignation des parlementaires communistes, qui sont profondément attachés au secteur public de l'énergie, face aux tentatives sournoises et dangereuses de certains parlementaires.
Au regard des enjeux sociaux, environnementaux et économiques, la rente nucléaire est et doit rester la propriété de la nation. Elle est notre patrimoine commun.
L'article 3 ter organise ni plus ni moins que le pillage des ressources publiques. Nous ne pouvons évidemment que nous y opposer.