Tout à l'heure, la majorité du Sénat a adopté l'article 3 bis, article un peu bâtard, fruit amer, un peu poisseux, pour ne pas utiliser l'expression plus triviale que chacun a à l'esprit, non pas seulement d'un héritage, mais d'un libéralisme exacerbé dont on prétend qu'il ne peut pas s'appliquer en matière d'énergie.
À l'évidence, il faut bien trouver une solution ! Si nous fixons un tarif d'ajustement en baisse par rapport au prix du marché, il faut compenser la différence. À cette fin, on aurait pu se tourner vers l'ensemble des entreprises. L'Assemblée nationale a décidé de mettre à contribution les petits fournisseurs d'énergie, souvent de jeunes entreprises non productrices qui se contentent de faire du négoce, mais aussi et surtout le producteur historique, à hauteur de 95 %. Ce dispositif était somme toute assez logique.
Dans l'amendement n° 66, M. Longuet se demandait, avec beaucoup de subtilité, pourquoi on n'ouvrirait pas les tarifs dits « à prix coûtants » du parc nucléaire français à certains fournisseurs négociants ; nous avons tous à l'esprit les deux négociants qui souhaitent ardemment qu'une telle décision soit prise.
J'ai lu dans la presse les déclarations des patrons de ces sociétés de négoce se demandant pourquoi ils ne pourraient pas avoir accès au prix coûtant d'EDF. Ces demandes m'ont paru assez scandaleuses. Il est tellement facile de demander à bénéficier du prix coûtant alors que l'on utilise des infrastructures qui ont été réalisées grâce aux investissements de l'entreprise historique, c'est-à-dire de la nation tout entière !
Gérard Longuet a finalement retiré son amendement parce qu'une solution de compensation a été trouvée. Nous vous laissons face à vos responsabilités !
S'agissant de l'utilisation de la CSPE, j'avoue que je rejoins les interrogations de nos collègues centristes.
Permettez-moi un bref rappel historique. La CSPE a été créée en 2000. À l'origine, elle n'était payée que par les fournisseurs d'électricité - c'est-à-dire, à l'époque, essentiellement EDF - qui pouvaient éventuellement la répercuter sur leurs prix de vente.
Mais, en 2003, vous avez modifié ce dispositif et reporté une partie du financement sur le consommateur final en créant une taxe supplémentaire. Aujourd'hui, le financement de cette contribution incombe pour 60 % aux entreprises et pour 40 % aux usagers.
Cette contribution est destinée à soutenir l'achat d'électricité aux petits producteurs, à développer les énergies renouvelables, mais aussi, et j'insiste sur ce point, à financer les tarifs sociaux.
J'ignore le montant exact de cette contribution. Il semble qu'il se situe entre un milliard et un milliard et demi d'euros. Il s'agit, en tout état de cause, d'une somme colossale, dont l'essentiel est destiné aux producteurs alternatifs, très largement à la cogénération et très peu à l'éolien. Surtout, il semble qu'à peine 50 millions d'euros soient consacrés au financement des tarifs sociaux.
On nous dit qu'il existe une « cagnotte » et qu'on va l'utiliser. Comme si on ne savait pas quoi en faire ! C'est quelque peu scandaleux.
Tout à l'heure, lors de la discussion de l'article 3, on a lésiné : on ne voulait pas multiplier le nombre des personnes ayant droit au tarif social, alors que seul un tiers des bénéficiaires potentiels y a réellement accès. On a lésiné sur la puissance accordée aux bénéficiaires du tarif social, sur le montant de l'aide octroyée, sur les critères d'attribution. Pour notre part, nous demandions que l'on retienne les revenus ouvrant droit à la CMU, par exemple, ce qui aurait constitué une amélioration.
Nous sommes malvenus d'utiliser aujourd'hui des sommes disponibles qui auraient pu être mieux employées.
Cette opération arithmétique permettra de diminuer la charge d'EDF - et loin de nous l'idée de peser plus encore sur l'entreprise publique ! -, mais elle vous met, mes chers collègues, dans une situation un peu difficile.
La question mérite peut-être une autre réflexion que celle que nous venons d'avoir aujourd'hui.