Intervention de Jean-Marie Bockel

Réunion du 9 septembre 2010 à 9h30
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Article 17 A

Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État :

Permettez-moi de vous livrer mon témoignage. Il se trouve en effet que j’ai été il y a très longtemps l’un des pionniers dans les grandes villes françaises de ce que l’on appelait à l’époque la « vidéosurveillance ». Je m’y suis engagé en y consacrant bien entendu des moyens à fois financiers et humains. À cet égard, les montants qui ont été cités sur certaines travées m’intéressent parce que, chez moi, c’est beaucoup plus cher. Si l’on veut que la vidéosurveillance fonctionne, un suivi par des agents municipaux, en lien vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec le commissariat central, est bien sûr nécessaire.

Je me souviens que, lorsque nous avions lancé la vidéosurveillance, après avoir pris quelques éléments de comparaison en France et à l’étranger, des débats, y compris au sein de mon équipe municipale, avaient déjà opposé ceux qui étaient totalement hostiles à cette démarche, la considérant à la fois comme liberticide et inefficace, et les autres. Il y avait également eu un débat sur les limites de l’exercice.

En ce qui me concerne, comme d’ailleurs tous les maires ayant opté pour la vidéosurveillance, quelle que soit la taille de leur commune, je n’ai jamais fait croire à mes concitoyens que la vidéosurveillance – aujourd'hui, la vidéoprotection – était la réponse à tous les problèmes, loin s’en faut. Mais c’est un élément de réponse aux problèmes de sécurité et de prévention. La présence physique sur le terrain, évoquée par M. Gautier, constitue également un élément de réponse.

Je me souviens très bien que mon premier pas dans ce domaine a été l’équipement des transports publics – bus et tramways –, où des problèmes considérables existaient. Les actes de délinquance ont alors diminué de 80 %, puis de 95 %, et cela a changé la vie des gens. C’est ce qui s’est également passé à la gare de Saint-Denis, dont l’exemple a été évoqué tout à l’heure.

Certains considèrent que l’on ne fait que déplacer les problèmes. C’est mécaniquement vrai, car la vidéoprotection ne change pas l’état d’esprit de ceux qui commettent des actes de délinquance.

J’ajouterai un argument, que je tire beaucoup plus de l’expérience que d’idées préconçues ou préétablies : au fur et à mesure que le dispositif se met en place sur l’espace public, on constate une déstabilisation des délinquants. Certes, cette déstabilisation ne règle pas tous les problèmes, mais elle constitue un argument en faveur de la vidéoprotection.

Vous avez dit, madame Assassi, que, dans les pays où la vidéoprotection a été mise en place, elle est un échec. Ce n’est pas vrai ! Ceux qui ont parfois prétendu qu’elle constituait « la » réponse sont aujourd'hui revenus à une position plus équilibrée, qui a toujours été la mienne. Mais encore une fois, la vidéoprotection n’est qu’un élément du dispositif. C’est un sujet qui concerne nos concitoyens, un sujet qu’ils connaissent, dont ils sont demandeurs et dont ils voient les limites.

Permettez-moi de faire une dernière remarque, mesdames, messieurs les sénateurs. La mise en place de dispositifs de vidéoprotection se fait de manière extrêmement stricte et encadrée – j’en ai fait l’expérience – dans notre État de droit. Le dialogue qui s’instaure avec le procureur de la République pour examiner les conditions dans lesquelles la vidéoprotection peut être mise en œuvre est extrêmement approfondi. On ne peut pas faire n’importe quoi ! Par ailleurs, il y a le souci de la préservation de la vie privée. Ainsi, des systèmes de cache permettent de ne pas filmer par inadvertance certains espaces privés. Les choses sont tout de même faites de manière très sérieuse en France.

Le terme « vidéoprotection » reflète ce que sont devenus les dispositifs de vidéosurveillance, notamment dans l’espace public. La vidéoprotection est efficace en termes de prévention et de dissuasion bien sûr, mais elle constitue aussi parfois un outil d’aide à la résolution d’un certain nombre de problèmes. Telle est la réalité.

Vous avez également dit, madame Assassi, que la vidéoprotection donnait lieu à des dérives. Certes, il y a des ratés, comme avec tout dispositif. Mais cette démarche est tellement encadrée, les gens qui sont chargés de la mettre en œuvre, y compris à l’échelon des communes, sont si professionnels que les ratés sont assez peu nombreux ; sinon, on en parlerait davantage, croyez-moi.

Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements, dans un esprit extrêmement concret, pragmatique, pédagogique, et respectueux de nos droits.

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