La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie d’excuser l’absence de Brice Hortefeux : il assiste actuellement aux obsèques du lieutenant de police Nicolas Debarge et nous rejoindra en fin de matinée.
À la demande de M. Hortefeux et avec votre accord, je souhaiterais que la Haute Assemblée puisse avoir une pensée pour ce fonctionnaire décédé au service de son pays.
Pour donner toute la dimension à l’hommage à rendre à ce policier, le mieux me paraît de laisser au président du Sénat le soin de trouver la forme la plus appropriée lors des questions d’actualité au Gouvernement.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (projet n° 292, texte de la commission n° 518, rapports n° 517, 480 et 575).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre III, à l’article 11 quater.
Je rappelle que les amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 11 ont été réservés à la demande du Gouvernement et seront examinés à la fin du chapitre V bis, après les amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 24 vicies.
(Non modifié)
Le code des douanes est ainsi modifié :
1° Dans l’intitulé de la section 8 du chapitre IV du titre II, les mots : « dans le cadre de la convention d’application de l’accord de Schengen du 14 juin 1985 » sont supprimés ;
2° Les deux premiers alinéas de l’article 67 ter sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« À l’occasion des contrôles qui relèvent de leurs attributions, les agents des douanes, lorsqu’ils ont procédé à la consultation des traitements de données à caractère personnel relatifs aux individus, aux objets ou aux véhicules signalés régis par l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, peuvent, aux fins de mise à disposition d’un officier de police judiciaire, procéder à la retenue provisoire des personnes qui font l’objet d’un signalement ou qui sont détentrices d’un objet signalé. »
L'article 11 quater est adopté.
L'amendement n° 29 rectifié bis, présenté par MM. Houel, Fouché, B. Fournier, Carle, Dallier, Milon, Saugey, Bernard-Reymond, Doublet, Laurent, Trillard et Bécot, Mme Sittler, MM. Lefèvre, Buffet et Braye, Mmes Hummel et Dumas, MM. Grignon, Pierre et Billard, Mme Henneron, MM. Leclerc, Alduy, Chatillon et Frassa, Mme Bout, MM. Etienne, Vestri et Laufoaulu, Mme Descamps, MM. Chauveau et Cornu, Mme Keller, MM. Beaumont, Pointereau, Leleux, Doligé, Couderc et Paul, Mlle Joissains, M. J.P. Fournier, Mme Desmarescaux et MM. Revet, Mayet, Retailleau, Martin, P. Blanc et Gilles, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 11 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l'article 104 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 est ainsi rédigé :
« II. - La mission confiée au maire de réception et de saisie des demandes de passeport, de carte nationale d'identité ou de tous autres titres sécurisés ne comporte pas le recueil de l'image numérisée du visage du demandeur.
« Les images numérisées destinées à la réalisation des passeports, cartes nationales d'identité et autres titres sécurisés sont, à compter du 1er octobre 2010, réalisées par un photographe agréé par l'État dans des conditions fixées par voie règlementaire. »
II. - En conséquence, faire précéder cet article d'une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section 3
Recueil des images numérisées pour l'établissement des titres sécurisés
La parole est à M. Michel Houel.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la possibilité pour les mairies disposant d’une station biométrique d’accepter ou de refuser de prendre une photo d’identité destinée à la réalisation d’un passeport crée une concurrence déloyale à l’égard des photographes. Les prix ne sont absolument pas comparables. En mairie, une photo d’identité coûte 1 euro, contre de 7 à 9 euros chez un photographe.
Nous remplissons une mission qui ne devrait pas être la nôtre. Jusqu’à preuve du contraire, nos agents territoriaux ne sont pas des photographes. Il n’est pas simple de prendre des photos d’enfants ou de créer des contrastes lorsque c’est nécessaire, surtout que l’appareil qui nous a été fourni par l’État ne prend pas en compte cette difficulté technique.
Un jour ou l’autre, ce matériel made in China devra être remplacé dans nos communes. Abstenons-nous de le faire, et ce sera une bonne occasion pour l’État de réaliser des économies ! Je précise que je n’ai rien contre les produits d’importation, mais il aurait à mon avis été plus opportun d’utiliser du matériel fabriqué par des pays européens.
La situation de la France en matière de recueil des images numérisées est d’ailleurs différente de celle de nos voisins européens. En Allemagne, par exemple, les collectivités demandent à leurs administrés de s’adresser à un photographe agréé. Il en va de même en Finlande, en Irlande, en Italie, aux Pays-Bas, en Autriche ou en Slovénie.
Dans ma petite commune, qui dispose d’une station biométrique, 850 passeports ont déjà été établis cette année. L’année dernière, leur nombre s’élevait à près de 900. Pour ce service que nous rendons, l’État nous verse 5 000 euros d’indemnisation. Le compte n’y est pas ! Il y est d’autant moins que, en raison du nombre de passeports que nous établissons, j’envisage d’embaucher un nouvel agent territorial.
Si je ne parviens pas à trouver une solution pour gagner du temps dans l’établissement des passeports, je demanderai à l’État de reprendre ma station biométrique, car je n’aurai plus les moyens d’assurer cette mission. Or il serait vraiment dommage d’en arriver à cette situation, car les administrés y trouvent leur compte. Nous rendons en effet un véritable service, et beaucoup plus rapidement que par le passé. Auparavant, la délivrance d’un passeport demandait parfois jusqu’à deux mois, contre de huit à quinze jours aujourd’hui.
Les maires que j’ai consultés ne sont pas contre le fait de continuer à rendre ce service, mais ils ne veulent pas le faire à n’importe quel prix : ils veulent que ce soit en rapport avec ce que l’État leur reverse. Voilà pourquoi je demande que les photos d’identité pour les titres sécurisés soient réalisées par des photographes professionnels.
Cet amendement vise à préciser que les photographies d’identité nécessaires à l’établissement de l’ensemble des titres d’identité sont réalisées par un photographe agréé et non directement en mairie.
L’article 104 de la loi de finances rectificative pour 2008 permet déjà au maire de renoncer au recueil de l’image numérisée en mairie pour l’établissement de passeports biométriques. Il ne semble pas opportun d’aller au-delà, d’autant que de nombreuses mairies sont déjà équipées.
La commission émet donc un avis défavorable.
Aux termes du droit européen, les photos des titres d’identité de voyage doivent répondre à une norme.
L’une des avancées de la récente réforme des titres souhaitée par le ministre, pour laquelle le ministère de l’intérieur a reçu le prix de la simplification administrative, est de permettre au demandeur de se faire photographier sur place, en mairie. Dans le droit actuel – vous l’avez d’ailleurs rappelé, monsieur le sénateur –, le demandeur a également le choix de fournir une photo réalisée par un photographe professionnel.
Vous voulez supprimer la première possibilité. Or le Gouvernement pense que ce ne serait pas une bonne idée. Faire réaliser sa photo d’identité en mairie, c’est non seulement pratique pour nos concitoyens, mais c’est également un gage de fiabilité des titres, puisqu’il s’agit nécessairement du portrait du demandeur.
Vous avez fait état de votre expérience de maire. En tant que maire, j’ai également été confronté à ce choix. Je peux vous dire que de nombreuses discussions ont eu lieu lorsque nous avons mis en œuvre dans ma mairie le dispositif de recueil d’images numérisées destinées à l’établissement de titres sécurisés. Je reconnais qu’il y a du pour et du contre dans ce système.
Vous le savez, beaucoup de photographes ont malheureusement déjà disparu en raison de la montée en puissance du numérique, du problème de la spécialisation. Ceux qui restent ont souvent investi dans du matériel afin de pouvoir réaliser des images numérisées destinées à la réalisation de titres sécurisés. Quand on évoque le coût des photos, n’en oublions pas la raison.
Cela étant, après plusieurs années d’expérience, le système intégré à la mairie, notamment pour les papiers les plus courants tels que les cartes d’identité, par exemple, constitue non seulement un élément de simplicité, mais également une économie pour nos concitoyens, comme je le constate dans ma ville où beaucoup de gens sont issus des couches populaires.
La position du Gouvernement se fonde sur l’expérience pratique. C’est pourquoi, malgré l’opinion de la Haute Assemblée, que je connais, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Je vais m’éloigner exceptionnellement de la position défendue par mon collègue et ami Michel Houel, qui souhaite la désactivation de la fonction photographie de toutes les stations biométriques, dont le nombre est aujourd’hui de 3 505.
J’expliquerai en quelques mots pourquoi je ne voterai pas cet amendement.
M. le secrétaire d’État l’a rappelé, le principe a connu de nombreux assouplissements. Ainsi, dès avril 2008, un décret a autorisé les usagers à fournir une photographie de leur choix. Je précise que 54 % d’entre eux agissent ainsi.
En outre, à la demande des photographes professionnels et pour prendre en compte les difficultés de ces derniers, la loi de finances rectificative pour 2008 – Michel Houel le rappelle d’ailleurs dans l’objet de son amendement – a permis à la commune de désactiver la fonction photographie et d’imposer au demandeur de venir avec sa photographie. Le législateur a ainsi confié aux maires la décision – après tout, ne leur appartient-elle pas ? – de permettre ou non, en fonction des situations locales, la prise de photo en mairie.
Contraindre tous les demandeurs de passeport à fournir une photographie reviendrait à leur imposer un coût supplémentaire, voire plusieurs déplacements, car rien ne dit que la première photo présentée en mairie sera recevable.
J’ajoute que les photographes ont bénéficié récemment d’un effet d’aubaine. En effet, la carte vitale 2, contrairement à la première carte vitale, doit comporter une photographie. Comparons l’importance du marché qui est offert à ces professionnels et l’importance de celui qu’ils ont perdu. Je rappelle que le programme de la carte vitale 2, qui est obligatoire pour les premières cartes et pour les renouvellements, concernera 50 millions d’ayants droit à la sécurité sociale. Je mets ce chiffre en comparaison avec les 1 300 000 passeports délivrés chaque année avec la photographie réalisée en mairie.
Mes chers collègues, des investissements relativement lourds ont été réalisés par l’État. J’imagine bientôt l’émission « Combien ça coûte ? » ! Ne pourrait-on pas laisser pour l’instant l’expérience se dérouler et y réfléchir à nouveau lorsque viendra éventuellement le moment de retirer les appareils ?
L’amendement que je défends concerne 9 000 emplois de photographe situés non en périphérie, mais au sein des villes. Je ne doute pas que tous les maires siégeant dans cet hémicycle souhaitent défendre le commerce de centre-ville. Or, là, j’ai plutôt l’impression qu’on essaie de le tuer !
Les photographies d’identité représentent de 10 % à 30 % du chiffre d’affaire de ces professionnels. Aujourd’hui, la question se pose pour les seuls passeports. Mais demain, vous le savez, ce sera certainement le cas aussi pour les cartes d’identité. Et je ne vois pas, dans ce cas-là, pourquoi les mairies ne seraient pas alors chargées de faire les photographies de carte d’identité. Ce serait encore un mauvais coup pour nos photographes professionnels !
J’ai écouté avec attention les différents propos tenus. À titre personnel, je soutiens l’amendement proposé par M. Houel. Les explications ont été suffisamment significatives et pertinentes pour que je n’aie pas à les développer à nouveau.
Deux points parmi les propos de M. Houel me semblent particulièrement importants : tout d’abord, l’importance du nombre de salariés qui dépendent des photographes professionnels et, ensuite, ce que cela peut représenter en termes de perte de chiffre d’affaire. On peut contester le chiffre, mais la photographie d’identité représente une part très importante du chiffre d’affaire des photographes, lesquels sont malmenés depuis un certain nombre d’années avec l’arrivée du numérique, le développement des photographies par la grande distribution ou les commerces spécialisés.
Je voterai donc cet amendement à titre personnel.
Lorsque l’État a conféré aux mairies la charge d’établir les passeports, on ne peut pas dire que les maires ont été enchantés ; en tout cas, les maires de gauche et moi-même ne l’étions pas.
C’est effectivement un transfert de responsabilité.
Demain, les mairies auront d’autres documents à délivrer, telle la carte d’identité, par exemple, puisque l’on nous a appris que, dans les petits départements comme le mien, les services des sous-préfectures seraient fermés au public à partir du 1er janvier 2011 : il y aura un sous-préfet dans son bureau, mais plus de services ouverts au public ! La charge de l’établissement des documents d’État faisant foi va donc être progressivement transférée aux mairies, alors que ces dernières ne sont pas là pour cela !
Ensuite, j’ai été maire pendant plus de vingt ans d’une commune où deux photographes étaient installés en centre-ville. Ils ont bien entendu fermé tous les deux leur magasin, mais continuent à travailler à domicile, sur rendez-vous, pour la réalisation de photographies de mariages et de banquets. Cette profession est attaquée parce que l’État veut se décharger des responsabilités qui sont les siennes. Ce n’est ni le seul exemple ni le plus important ; il y en a beaucoup d’autres. On le verra, d’ailleurs, dans le texte que nous examinons aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle tout me porte à voter l’amendement de M. Houel.
Nous avons lu avec attention l’amendement n° 29 rectifié bis, qui, au regard des arguments avancés par nos collègues, nous semble tout à fait pertinent. C’est la raison pour laquelle nous le voterons.
J’irai dans le même sens que nos collègues. L’exclusivité de la prise de vue en mairie va, me semble-t-il, détruire de nombreux emplois dans la photographie. Afin de lutter contre le chômage et l’exclusion de cette profession, les Verts soutiendront cet amendement.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11 quater.
Section 3
(Suppression maintenue de la division et de l’intitulé)
(Suppression maintenue)
Section 4
Vidéoprotection
(Non modifié)
Sous réserve des dispositions de la présente loi, dans tous les textes législatifs et réglementaires, le mot : « vidéosurveillance » est remplacé par le mot : « vidéoprotection ».
Nous abordons le chapitre de la vidéosurveillance. Le Gouvernement nous propose de remplacer le terme : « vidéosurveillance » par le terme : « vidéoprotection ». Je pense qu’il s’agit là d’entretenir une mystification selon laquelle l’installation de caméras de vidéo dans l’ensemble de l’espace public protégerait nos concitoyens de tout risque d’agression, minime ou grave.
J’ose dire que cette manœuvre peut faire sourire tant est dérisoire la tentative de jouer encore une fois avec la sémantique afin d’ancrer dans les esprits le bien-fondé de la vidéosurveillance. Au-delà, les élus de mon groupe entendent demander la suppression de cet article et la vaste entreprise de réécriture qu’il occasionnera.
Pour ma part, je pense que les mots ont un sens. Dans ce cas, la vidéosurveillance n’a rien de protecteur. Elle ne peut en aucun cas être assimilée à une forme de protection. La vidéosurveillance intervient en effet la plupart du temps a posteriori, une fois que les infractions sont commises, pour en éclairer le déroulement ou, éventuellement, pour permettre l’identification des auteurs. L’exemple assez caractéristique de la Grande-Bretagne démontre qu’il est largement illusoire de vouloir généraliser la vidéosurveillance. Le fait qu’une infraction soit filmée n’empêche pas qu’elle ait lieu.
À l’aune du fiasco – je pense qu’on peut employer ce terme – que constitue la vidéosurveillance dans tous les pays qui l’ont expérimentée, il paraît tout à fait exagéré de prétendre qu’il s’agirait d’une protection. D’autres pays ont tenté l’expérience et font état d’une inutilité de ces systèmes qui, en réalité, ne font que déplacer la délinquance vers des lieux non surveillés.
Je rappelle que tout cela a un coût. En 2009, le fonds interministériel de prévention de la délinquance, ou FIPD, avait déjà prévu d’y consacrer une enveloppe de 28 millions d’euros sur un budget total de 37 millions d’euros, et ce pour un taux d’élucidation de 1 %.
J’ai aussi cité, lors de la discussion générale, l’exemple de la ville de Saint-Etienne, dotée de dispositifs de vidéosurveillance depuis 2001. Si l’on additionne les coûts de l’installation, de l’aménagement d’un centre de supervision et de la maintenance, cela représente annuellement la modique somme de 1, 3 million d’euros, pour un taux d’élucidation de 1 % !
Je prendrai l’exemple de deux villes similaires dans le département du Rhône. Si l’on compare l’évolution de la délinquance de voie publique respectivement dans une ville qui a fortement investi dans ce domaine et dans une autre ville qui n’a pas souhaité s’y engager, on observe que la baisse est la plus forte dans la commune ne bénéficiant d’aucune caméra sur la voie publique. En termes de lutte contre la délinquance, ces exemples confirment donc que, si la vidéosurveillance a des effets, ceux-ci sont extrêmement faibles au regard de son coût.
On pourrait me rétorquer que l’opinion est largement favorable à la vidéosurveillance. Il est vrai que des études montrent que 50 % de la population se dit « favorable », et 21% « très favorable ». Dans le même temps, 15 % des personnes consultées estiment qu’il y a trop de caméras, et 33 % qu’il y en a déjà suffisamment. Les populations ne sont donc pas favorables à une surveillance généralisée.
D’ailleurs, on ne leur demande jamais aux populations leur avis sur la mise en place de la vidéosurveillance sur leur territoire. Elles ne sont informées ni du coût ni du « mode d’emploi » des installations. Tout cela reste dans une grande opacité et leur est imposé, alors que des fonds publics sont utilisés. Le marché de la vidéosurveillance a en effet explosé, passant de 473 millions d’euros en 2000 à 750 millions en 2006. C’est donc un marché assez juteux pour des entreprises privées de surveillance, qui ont la charge d’installer et de veiller à la maintenance de ces caméras. Il me semble ainsi que l’on assiste à une privatisation rampante du domaine public.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 135 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 215 est présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 317 rectifié est présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour défendre l’amendement n° 135.
Il est indiqué dans le rapport de la commission des lois que cet article 17 A, issu d’un amendement du Gouvernement, « tend à remplacer le terme « vidéosurveillance » par celui de « vidéoprotection » dans l’ensemble des textes législatifs et réglementaires, conformément au souhait du Gouvernement de souligner le caractère protecteur de cette technologie ».
Ce « caractère protecteur de la vidéosurveillance » ne me paraît pas précisément prouvé. Ce glissement sémantique a vocation à rassurer et à justifier l’installation de procédés onéreux pour les finances publiques et juteux pour des entreprises privées.
Vous voulez gommer toute idée de « surveillance » dont la généralisation et la dangerosité apparaissent de plus en plus clairement au fil des textes que vous nous proposez.
Permettez-moi de rappeler ce qu’a exprimé notre collègue Alex Türk, président de la CNIL, à propos de la généralisation du traçage des individus : « on voit bien que l’on entre dans une société où s’additionnent toute une série de moyens qui permettent de repérer, de situer, de localiser des personnes ».
Selon nous, la vidéosurveillance n’a aucun sens si ne sont pas mis en œuvre les moyens de police et d’investigation suffisants pour assurer un suivi des visionnages.
Comment peut-on parler, en suivant votre logique, de « protection » quand on voit les dérives auxquelles la vidéosurveillance peut mener ? Je prendrai deux exemples.
En mars dernier, cinq pompiers catalans en stage de formation en France faisaient leurs courses dans un supermarché en parlant catalan. Filmés par des caméras de surveillance, ils ont été présentés à des millions de téléspectateurs comme des membres d’ETA, assassins présumés d’un policier.
Second exemple, il y a aussi une dérive quand des villes utilisent des caméras de surveillance pour verbaliser les propriétaires de véhicules en stationnement interdit. J’oserai poser la question : de quoi protège-t-on les citoyens ?
Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article 17 A.
Avec le remplacement du mot « vidéosurveillance » par le mot « vidéoprotection », nous sommes en pleine sémantique ! Mais, comme je l’ai indiqué au cours de la discussion générale, c’est aussi une question de marketing politique. Il est en effet peut-être plus facile de vendre de la protection que de la surveillance, encore que…
J’attire votre attention sur le fait que l’immense majorité de ceux qui sont par principe opposés à la vidéosurveillance proposent à la place une présence physique sur le terrain, c'est-à-dire des gens dont la fonction est de surveiller certains lieux ou sites. La surveillance en soi n’a absolument rien de blâmable, au contraire. Je pense même que la surveillance de l’espace public – ou de l’espace privé d’ailleurs, qui est un espace plus déterminé – est de nature à rassurer le public.
La vidéoprotection et la vidéosurveillance sont exactement la même chose. Ne perdons donc pas notre temps sur ce point.
Je constate d’ailleurs que, au fil des années, l’acceptation par la population de la vidéosurveillance a considérablement progressé. Le débat qui nous occupe a l’air de mettre à bas toute cette évolution. On sent que cela cache quelque chose. La vidéosurveillance étant désormais admise, je ne vois pas pourquoi il faudrait maintenant parler de « vidéoprotection ». D’ailleurs, ni le mot « vidéosurveillance » ni le mot « vidéoprotection » ne figurent dans le dictionnaire. Vous pouvez chercher, ils n’y sont pas ! La seule chose qui existe, c’est la vidéo. Je pense qu’il eût été plus sage de se contenter de ce dernier mot. L’appareil utilisé est une caméra, il s’agit donc bien d’un système vidéo !
Aujourd’hui, vous introduisez dès le début de notre débat un élément tout à fait pernicieux, qui sème le doute. C'est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de l’article 17 A.
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour défendre l’amendement n° 317 rectifié.
Mme Assassi et M. Gautier viennent de rouvrir une vieille discussion. Je l’avais également rouverte hier pour rappeler que, si l’utilité préventive de la vidéosurveillance fait encore débat aujourd'hui, en revanche le caractère attentatoire à la vie quotidienne n’est pas contestable.
Passer de la « vidéosurveillance » à la « vidéoprotection » introduit une dimension protectrice ou préventive pouvant s’apparenter à l’angélisme que l’on reproche d’habitude à la gauche.
Permettez-moi de vous donner un exemple, monsieur le secrétaire d’État : celui de la gare de Saint-Denis, bien connue de l’administration. S’il faut se féliciter du fait que les habitants de Saint-Denis puissent enfin prendre le train en paix, force est de constater que le trafic de stupéfiants n’a ni disparu ni réellement diminué dans la cité, malgré l’important dispositif de vidéosurveillance mis en place. J’ajoute que la vidéosurveillance ne permet pas de lutter contre les comportements impulsifs souvent liés à la consommation d’alcool ou de stupéfiants.
Surtout, le fait de filmer une infraction, si cela est utile à l’appréhension du délinquant, n’empêche pas ce dernier de la commettre. La vidéosurveillance ne protège donc pas véritablement nos concitoyens.
Pour toutes ces raisons, et pour reprendre l’argument purement sémantique, il ne me semble pas utile de maintenir le mot « vidéoprotection » dans le texte.
Ces amendements ont pour objet de supprimer l’article 17 A, qui tend à substituer le terme : « vidéoprotection » au mot : « vidéosurveillance ». Ce remplacement vise à traduire la modification de la perception par la population de cette technologie. Il est extrêmement important, car il montre l’évolution du système. Nous sommes en effet passés d’un système de surveillance à un système de protection.
Certes, c’est évident, la vidéoprotection ne réglera pas tous les problèmes. Si tel était le cas, cela se saurait et il y a longtemps qu’elle aurait été mise en place. En revanche, elle permet d’en régler un certain nombre d’entre eux, ce qui est très important.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des lois émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
Monsieur le président, je suis toujours, dans ce débat comme dans d’autres, très attentif aux arguments développés par Mme Assassi, Mme Escoffier et M. Gautier, et ils le savent. Même lorsque nous ne sommes pas d’accord, leurs réflexions sont toujours intéressantes.
Mais là, franchement, vos arguments m’ont paru un peu idéologiques, et je vous ai trouvés quelque peu embarrassés sur ce sujet, sauf peut-être M Gautier, dont la critique m’a semblé un peu molle.
M. Charles Gautier rit
Permettez-moi de vous livrer mon témoignage. Il se trouve en effet que j’ai été il y a très longtemps l’un des pionniers dans les grandes villes françaises de ce que l’on appelait à l’époque la « vidéosurveillance ». Je m’y suis engagé en y consacrant bien entendu des moyens à fois financiers et humains. À cet égard, les montants qui ont été cités sur certaines travées m’intéressent parce que, chez moi, c’est beaucoup plus cher. Si l’on veut que la vidéosurveillance fonctionne, un suivi par des agents municipaux, en lien vingt-quatre heures sur vingt-quatre avec le commissariat central, est bien sûr nécessaire.
Je me souviens que, lorsque nous avions lancé la vidéosurveillance, après avoir pris quelques éléments de comparaison en France et à l’étranger, des débats, y compris au sein de mon équipe municipale, avaient déjà opposé ceux qui étaient totalement hostiles à cette démarche, la considérant à la fois comme liberticide et inefficace, et les autres. Il y avait également eu un débat sur les limites de l’exercice.
En ce qui me concerne, comme d’ailleurs tous les maires ayant opté pour la vidéosurveillance, quelle que soit la taille de leur commune, je n’ai jamais fait croire à mes concitoyens que la vidéosurveillance – aujourd'hui, la vidéoprotection – était la réponse à tous les problèmes, loin s’en faut. Mais c’est un élément de réponse aux problèmes de sécurité et de prévention. La présence physique sur le terrain, évoquée par M. Gautier, constitue également un élément de réponse.
Je me souviens très bien que mon premier pas dans ce domaine a été l’équipement des transports publics – bus et tramways –, où des problèmes considérables existaient. Les actes de délinquance ont alors diminué de 80 %, puis de 95 %, et cela a changé la vie des gens. C’est ce qui s’est également passé à la gare de Saint-Denis, dont l’exemple a été évoqué tout à l’heure.
Certains considèrent que l’on ne fait que déplacer les problèmes. C’est mécaniquement vrai, car la vidéoprotection ne change pas l’état d’esprit de ceux qui commettent des actes de délinquance.
J’ajouterai un argument, que je tire beaucoup plus de l’expérience que d’idées préconçues ou préétablies : au fur et à mesure que le dispositif se met en place sur l’espace public, on constate une déstabilisation des délinquants. Certes, cette déstabilisation ne règle pas tous les problèmes, mais elle constitue un argument en faveur de la vidéoprotection.
Vous avez dit, madame Assassi, que, dans les pays où la vidéoprotection a été mise en place, elle est un échec. Ce n’est pas vrai ! Ceux qui ont parfois prétendu qu’elle constituait « la » réponse sont aujourd'hui revenus à une position plus équilibrée, qui a toujours été la mienne. Mais encore une fois, la vidéoprotection n’est qu’un élément du dispositif. C’est un sujet qui concerne nos concitoyens, un sujet qu’ils connaissent, dont ils sont demandeurs et dont ils voient les limites.
Permettez-moi de faire une dernière remarque, mesdames, messieurs les sénateurs. La mise en place de dispositifs de vidéoprotection se fait de manière extrêmement stricte et encadrée – j’en ai fait l’expérience – dans notre État de droit. Le dialogue qui s’instaure avec le procureur de la République pour examiner les conditions dans lesquelles la vidéoprotection peut être mise en œuvre est extrêmement approfondi. On ne peut pas faire n’importe quoi ! Par ailleurs, il y a le souci de la préservation de la vie privée. Ainsi, des systèmes de cache permettent de ne pas filmer par inadvertance certains espaces privés. Les choses sont tout de même faites de manière très sérieuse en France.
Le terme « vidéoprotection » reflète ce que sont devenus les dispositifs de vidéosurveillance, notamment dans l’espace public. La vidéoprotection est efficace en termes de prévention et de dissuasion bien sûr, mais elle constitue aussi parfois un outil d’aide à la résolution d’un certain nombre de problèmes. Telle est la réalité.
Vous avez également dit, madame Assassi, que la vidéoprotection donnait lieu à des dérives. Certes, il y a des ratés, comme avec tout dispositif. Mais cette démarche est tellement encadrée, les gens qui sont chargés de la mettre en œuvre, y compris à l’échelon des communes, sont si professionnels que les ratés sont assez peu nombreux ; sinon, on en parlerait davantage, croyez-moi.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements, dans un esprit extrêmement concret, pragmatique, pédagogique, et respectueux de nos droits.
Monsieur le secrétaire d’État, si vous aviez passé un examen, vous n’auriez pas eu la moyenne – je suis désolée de vous le dire ! –, car vous venez de faire un magnifique hors sujet !
La question n’est pas du tout celle de l’utilité de l’outil, que je ne conteste pas. Je dis non pas que c’est absolument inutile, mais que j’aimerais bien comprendre et mesurer précisément l’utilité de la vidéosurveillance : quand, combien et comment ! À cet égard, j’attends des chiffres très précis.
La question qui se pose est celle du changement de nom. Pourquoi modifier ce dernier ? Pourquoi, si l’on change de nom, ne pas parler alors de « vidéo-élucidation » ou de « vidéo-dissuasion » ? Le terme « vidéo » proposé par mon collègue Charles Gautier est effectivement le meilleur. Il s’agit en effet de vidéo !
En tant que maire, je ne me sens pas capable d’expliquer à mes concitoyens que l’installation d’une caméra va les protéger. La victime d’un meurtre n’a pas été protégée. On ne peut donc pas parler alors de « vidéoprotection ». Il s’agit bien de vidéo. Je ne vois vraiment pas pourquoi on ment aux citoyens en permanence !
Mme Catherine Dumas. La querelle sémantique au sujet de cet article, et notamment la dernière intervention, n’intéresse peut-être pas beaucoup les Français. On retrouve là des postures politiques traditionnelles et assez obsolètes !
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Les représentants des élus locaux que nous sommes ne peuvent plus aujourd’hui nier l’utilité des caméras dans nos villes.
De très nombreuses municipalités, de droite comme de gauche, se sont en effet équipées ces dernières années.
Je prendrai l’exemple de la ville de Lyon, dont je ne suis pas élue mais d’où je suis native et où je me rends très souvent. Le sénateur-maire de la ville – il siège sur les travées de l’opposition – assume l’utilisation de cet outil pour la protection de ses administrés : 238 caméras ont été installées dans la ville, ainsi que des radars aux feux tricolores. Les faits semblent lui donner raison puisque la délinquance a diminué de moitié dans les secteurs équipés.
J’aurais d’ailleurs aimé, sur cette question, trouver la même volonté politique chez le maire de Paris, qui ne s’est engagé dans la vidéoprotection que contraint et forcé, avec le concours décisif du ministère de l’intérieur et de la préfecture de police.
Soyons pragmatiques : la vidéoprotection n’est pas une fin en soi, comme vous venez de le rappeler, monsieur le secrétaire d’État. À elle seule, elle ne permettra pas d’éradiquer la délinquance, mais elle constitue bien une solution supplémentaire, un outil complémentaire pour les forces de police dans leurs missions quotidiennes de prévention, de contrôle et d’élucidation.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Il ne faut surtout pas s’imaginer que le fait d’opter pour un mot plutôt que pour un autre changera le régime juridique !
Aujourd'hui, selon certains, la vidéoprotection s’appliquerait là où il y a accès du public et secteur public. La vidéosurveillance, ce serait le contraire.
D’autres prétendent l’inverse de ce que je viens de dire !
D’autres pensent aussi – c’est d’ailleurs assez subtil – que cela induirait une différence entre « en temps réel » et « en temps différé ».
Il me paraît important de rejeter tout cela. Que l’on utilise le mot « vidéoprotection » plutôt que le mot « vidéosurveillance » n’induit pas de changement de régime juridique. Il faut le dire afin de ne pas créer une terrible ambiguïté dans la vie courante.
Par ailleurs, j’aborderai l’aspect purement sémantique du débat en vous faisant part d’un constat. Dans le département du Nord, beaucoup plus de communes de gauche que de communes de droite recourent à des systèmes vidéo. Et les maires de gauche que je rencontre – j’en rencontre autant que de maires de droite – reconnaissent que le terme « vidéoprotection » passe mieux auprès de leurs administrés.
J’en conviens, il s’agit avant tout de communication politique. Mais si cette expression permet d’aider les maires qui ont fait le choix, comme c’est leur droit, de recourir à un tel système, je ne vois pas pourquoi on les empêcherait de l’utiliser.
Par conséquent, la querelle sémantique ne me paraît pas avoir beaucoup de sens. Même si certains pensent que la notion de « vidéosurveillance » correspond mieux à la réalité, le terme « vidéoprotection » s’imposera par la force des choses, puisque les maires y trouveront un avantage.
Je souhaite rebondir sur ce qui vient d’être excellemment souligné par notre collègue, par ailleurs président de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL.
La vidéo présente un avantage incontestable. D’ailleurs, j’ai du mal à comprendre Mme Klès qui s’est déclarée incapable d’expliquer à ses concitoyens que l’installation d’une caméra les protégerait. Pour ma part, c’est exactement le contraire : j’explique à la population que la vidéo sert à la protéger !
Certes, d’aucuns réclament des effectifs de police supplémentaires ; tout le monde veut voir du « bleu » sur le terrain, et on comprend bien pourquoi. Mais, dans le même temps, lorsqu’une caméra, qui est parfaitement impartiale – une caméra, ça n’a aucune sensibilité ! –, filme en continu, les braves gens le savent et sont contents. Demandez donc aux bijoutiers de ma commune s’ils n’apprécient pas la vidéoprotection !
Et, en plus de satisfaire les citoyens, la vidéo ne dérange personne. Après tout, quand on se promène sur la voie publique, on le fait déjà au vu et au su de tout le monde, ce qui peut aussi avoir des conséquences directes sur la vie privée. Or personne ne proteste contre le fait que son voisin puisse le regarder passer dans la rue !
Dans ces conditions, la caméra constitue bien une « vidéoprotection ». Une orientation est fixée : nous protégeons notre population en instituant une couverture supplémentaire pour renforcer la sécurité des personnes et des biens.
Je terminerai en vous faisant part d’une anecdote. Voilà une quinzaine de jours, une dame d’un certain âge s’est rendue au siège de la police municipale de ma commune parce que son époux, un homme atteint de la maladie d’Alzheimer, était introuvable. Or, grâce aux caméras, nous avons pu dans les cinq minutes localiser la personne, qui était effectivement très désorientée, et envoyer une patrouille pour la récupérer.
Vous le voyez, il s’agit bien de protection. Et les citoyens apprécient énormément – je peux vous le certifier – que nous, les pouvoirs publics au sens large, fassions notre travail pour les protéger.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je le précise, il ne s’agit pas là d’une simple « bagarre sémantique ». Les mots ont un sens, et il faut avoir le courage de ses idées !
Jusqu’à présent, la vidéo n’a pas permis de protéger nos concitoyens. Nous le voyons bien, les systèmes vidéo qui sont déjà en place n’empêchent malheureusement pas que des délits ou des crimes soient commis.
La vidéo permet de surveiller, d’élucider – ça, c’est certain –, éventuellement de dissuader…
… – et encore, je ne suis pas sûre qu’elle soit dissuasive à 100 % –, mais certainement pas de protéger !
Je pense qu’il faut avoir le courage de ses opinions. Pourquoi mentir aux citoyens ? Il s’agit non pas de protéger, mais de surveiller ! Appelons un chat un chat !
À l’origine, je ne pensais pas intervenir dans ce débat, qui me paraît tout à fait éloigné des préoccupations de la population ; il s’agit d’une simple querelle sémantique.
Je rappelle d’abord que la proposition de remplacer le mot : « vidéosurveillance » par le mot : « vidéoprotection » figure dans un rapport rédigé par des membres de notre commission des lois.
En outre, comme l’a souligné notre collègue François Zocchetto lors de la discussion générale, voilà deux jours, la vidéosurveillance assure également la protection des citoyens en permettant d’établir qu’une personne ne se trouvait pas sur les lieux où un délit ou un crime a été commis. En clair, grâce à un tel système, on peut non seulement identifier les individus présents sur les lieux d’une infraction, mais également innocenter un éventuel suspect, en prouvant qu’il ne s’y trouvait pas. En ce sens, il s’agit bien d’une « vidéoprotection » pour ceux qui n’ont rien à se reprocher.
Dans ces conditions, je ne vois vraiment pas l’intérêt de nous éterniser dans un débat sémantique de ce type. Pour ma part, je suis plutôt favorable à la « vidéoprotection », en tout cas d’un point de vue terminologique, même si je ne dis pas que j’ai l’intention de la mettre en œuvre dans ma commune.
Bien entendu, si les dispositions que nous examinons visaient à imposer le recours à la vidéoprotection aux collectivités territoriales qui n’en veulent pas, j’y serais fermement opposé. Mais, en l’occurrence, il s’agit simplement de qualifier un système qui a déjà prouvé son utilité dans certaines circonstances, même si ce n’est évidemment pas la panacée.
D’ailleurs, à mon sens, la panacée ne réside pas dans l’addition des mesures que nous avons vu s’accumuler ces derniers jours au travers d’un certain nombre d’amendements, dont beaucoup émanaient du Gouvernement. En matière de sécurité, la véritable solution, c’est de mobiliser les moyens qui permettent d’appliquer les dispositions déjà existantes ! Il faut donner des moyens à la justice – M. le secrétaire d’État ne peut pas y être insensible –, permettre que les commissariats soient ouverts toute la journée et toute la nuit, faire en sorte que les forces de gendarmerie soient présentes sur le terrain, et pas seulement dans leurs bureaux ou dans leurs estafettes.
Nous disposons déjà, me semble-t-il, pour maintenir l’ordre public, d’un arsenal suffisamment large en termes de mesures applicables. Il s’agit donc plus d’une question de moyens que de dispositions juridiques nouvelles.
Mais, en tout état de cause, passer de la « vidéosurveillance » à la « vidéoprotection », ce n’est franchement pas un problème !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 135, 215 et 317 rectifié, tendant à supprimer l’article 17 A.
J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.
Je rappelle que la commission ainsi que le Gouvernement ont émis un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici le résultat du scrutin n° 267 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 17 A.
L'article 17 A est adopté.
L'amendement n° 216, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 17 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le pénultième alinéa de l'article 11 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Elle contrôle l'installation et évalue l'ensemble des systèmes vidéo, sauf en matière de défense nationale, afin de garantir le respect des droits et libertés des personnes filmées ;
« À ce titre, elle s’assure que :
« a) les systèmes vidéo sont bien proportionnés et pertinents au regard des objectifs poursuivis ;
« b) la durée de conservation des enregistrements n'est pas excessive ;
« c) les destinataires prévus des enregistrements sont bien habilités à accéder aux images ;
« d) le droit à l'information des personnes est effectif ;
« e) le droit des personnes filmées d'accéder aux enregistrements visuels les concernant est garanti. »
La parole est à M. Charles Gautier.
En présentant cet amendement, je défendrai également les amendements n° 217 rectifié et 218 rectifié, que nous examinerons un peu plus tard.
L’amendement n° 216 ne fait que reprendre une proposition adoptée à l’unanimité par la commission des lois : il s’agit de réunir sous une seule autorité les compétences d’autorisation et de contrôle en matière de vidéo dans les espaces publics.
En effet, dans le rapport sur la vidéosurveillance que Jean-Patrick Courtois et moi-même avons présenté en décembre 2008, au nom de la commission des lois, nous sommes arrivés à la conclusion que la solution la plus simple et la plus cohérente consisterait à attribuer cette compétence à la CNIL plutôt qu’à n’importe quelle autre commission ad hoc, et ce pour quatre raisons.
Premièrement, la CNIL est d’ores et déjà confrontée à une telle question à propos de la vidéosurveillance numérique. De plus, le public et même les professionnels ne font pas trop la différence entre les systèmes numériques et les systèmes analogiques et consultent la CNIL quotidiennement quant au régime juridique applicable en matière de vidéosurveillance dans les espaces publics.
Deuxièmement, si la loi du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité n’attribue pas la compétence à la CNIL pour autoriser les systèmes de vidéosurveillance dans les espaces publics, elle s’inspire en revanche directement des principes de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, c'est-à-dire proportionnalité, finalité, information du public, droit d’accès, etc. Cette filiation faciliterait le transfert des compétences.
Troisièmement – et nous avions écrit cela ensemble, mon cher collègue Jean-Patrick Courtois –, une autorité unique présenterait incontestablement l’avantage d’une meilleure homogénéité des décisions.
Quatrièmement, nous avions ajouté que la CNIL serait compétente aussi bien dans les lieux non ouverts au public que dans les espaces publics. Il reviendrait donc à un même organe de connaître de ces deux types de lieux, ce qui faciliterait la gestion des dossiers, compte tenu de l’imbrication de ces espaces.
Nous avions également songé aux intérêts des usagers, car il en résulterait pour eux une simplification importante, d’autant que la CNIL jouit d’une forte notoriété. Elle serait donc l’interlocuteur unique.
Enfin, nous avions formulé cette proposition afin d’anticiper l’avenir. Par exemple, les systèmes de vidéosurveillance biométrique, qui relèvent d’ores et déjà de la compétence de la CNIL, sont appelés à se développer. L’unicité de la compétence de la CNIL aurait pour avantage d’éviter d’être contraint d’adapter avec retard notre législation.
En conclusion, nous déclarions que la CNIL est l’autorité la mieux préparée pour assurer cette mission, compte tenu de sa taille, de son ancienneté, de sa notoriété et de son indépendance reconnue.
Dans ces conditions, et par cohérence avec la position qu’il avait adoptée en 2008, M. le rapporteur ne pourra qu’émettre un avis favorable sur cet amendement… N’est-ce pas, monsieur le rapporteur ?
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Effectivement, comme l’a dit mon collègue et ami Charles Gautier, le rapport que nous avons cosigné en 2008 concluait à la nécessité de confier à la CNIL l’ensemble des opérations concernant la vidéoprotection. Un certain nombre d’arguments, qui viennent d’être repris à l’instant par Charles Gautier, militaient à l’époque en ce sens. Mais, depuis 2008, les choses ont évolué.
La commission a rencontré le président de la CNIL, M. Alex Türk, et a cherché à trouver un nouvel équilibre afin de ne pas submerger financièrement la CNIL en engageant ses budgets dans des opérations auxquelles elle ne pourrait pas faire face.
J’ai donné mon accord pour un système reposant en quelque sorte sur trois pieds.
Premièrement, la Commission nationale de la vidéosurveillance, la CNV, définirait la politique générale, donnerait des orientations au Gouvernement et remettrait des rapports en fin d’année sur l’évolution du système et sur les méthodologies à mettre en œuvre.
Deuxièmement, le préfet délivrerait les autorisations.
Troisièmement, point extrêmement important, le contrôle reviendrait à la CNIL, qui disposerait d’une possibilité d’autosaisine.
Ce nouvel équilibre nous paraît répondre au mieux aux intérêts légitimes de la population et correspondre aux objectifs à atteindre.
Le rapport que j’ai cosigné en 2008 est donc aujourd'hui caduc. Je considère maintenant, après en avoir discuté avec le président de la CNIL, que la meilleure solution est de confier à la CNIL une mission de contrôle, en lui octroyant un pouvoir d’autosaisine, et de conseil – je le précise pour nos collègues maires qui ont installé ou comptent installer un système de vidéoprotection. En donnant à la CNIL à la fois le pouvoir de contrôler ceux qui ne respectent pas les textes et la possibilité d’aider ceux qui souhaitent les respecter, nous rendons son action la plus efficace possible.
Sans renier le rapport que j’ai signé en 2008 avec Charles Gautier, je considère que le système proposé aujourd'hui est le meilleur et qu’il est plus adapté au monde moderne. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur l’amendement de mon ami Charles Gautier, quoique avec regret. Un retrait serait plus sympathique.
Ma remarque s’appliquera également aux amendements qui vont venir en discussion.
Je comprends bien la position défendue à l’instant par M. Charles Gautier, qui est celle du rapport qu’il a cosigné en 2008 avec Jean-Patrick Courtois. Néanmoins, après réflexion, nous avons considéré qu’il serait très difficile pour la CNIL de prendre en charge le volet de l’autorisation, au risque qu’elle se trouve très rapidement débordée.
Par ailleurs, la solution prônée par le rapport de 2008 pose un problème conceptuel. En travaillant de conserve avec les autres pays de l’Union européenne, nous nous sommes rendu compte que l’application de la directive de 1995 va plutôt dans le sens d’un contrôle a posteriori, d’où l’idée de donner des moyens supplémentaires à la CNIL pour ce faire. En revanche, il conviendrait d’être moins pointilleux en ce qui concerne les formalités : soyons réalistes, la CNIL ne pourra pas faire face à l’ensemble des demandes.
Pour autant, cela ne signifie pas que la CNIL renonce totalement à son pouvoir d’autorisation. Quelqu’un l’a souligné tout à l’heure, lorsqu’il y aura couplage entre la biométrie et la vidéosurveillance, par exemple, ce qui sera de plus en plus fréquent, ipso facto la CNIL retrouvera sa compétence, car elle a forcément pouvoir d’autorisation en matière de biométrie.
Notre inquiétude, notre angoisse, même, est aujourd'hui beaucoup plus forte à l’égard de la géolocalisation qu’à l’égard de la vidéosurveillance ou de la biométrie. C’est pourquoi la CNIL a engagé une réflexion sur ce sujet, à l’instar des autres pays européens. Il ressort de nos travaux qu’au lieu de réfléchir par rapport à la technologie utilisée, nous ferions mieux de penser en termes de menace pour les libertés.
La loi de 1978 modifiée en 2004 donne pouvoir d’autorisation en ce qui concerne la biométrie, qui paraît dangereuse parce qu’elle touche aux éléments du corps humain, mais pas en matière de géolocalisation. Or, aujourd'hui, si je devais dresser la liste des menaces pour la liberté qui m’inquiètent le plus, je placerai à la première place la géolocalisation, à la deuxième place, la biométrie et, à la troisième, la vidéosurveillance !
Si on s’engage dans une logique d’autorisation, alors la CNIL doit tout autoriser, ce qui n’est pas concevable. Orientons-nous plutôt vers un système qui permette à la CNIL d’opérer un vrai contrôle, réel et effectif, sur le terrain. Car tout cela est très concret, mes chers collègues, et je réponds ici à ceux d’entre vous qui ont déposé les amendements que nous allons examiner tout à l’heure.
Cela signifie en effet qu’il faut systématiquement informer les personnes sur le terrain, déterminer les zones « vidéosurveillées » ainsi que la durée de conservation des informations, et indiquer qui aura accès au système. Il faudra, notamment, déterminer comment chaque citoyen pourra accéder aux images qui le concernent.
Enfin, point extrêmement important, la CNIL aura également compétence pour vérifier les systèmes de sécurité, soit logiciels, soit matériels, qui auront été mis en place.
Ce travail d’harmonisation des contrôles sur le plan national constitue une avancée extraordinaire du texte en termes de protection des libertés. Je rends donc hommage au rapporteur, qui a été au bout de cette logique sans pour autant aller jusqu’à confier à la CNIL compétence en matière d’autorisation, car cela n’était pas possible.
Pour conclure, je signale que la CNIL a entrepris un travail avec l’Association des maires de France. Nous éditerons prochainement un guide, qui sera envoyé à tous les maires de France afin de leur rappeler l’ensemble des garanties qu’ils doivent à leurs concitoyens en cas d’installation d’un système de vidéoprotection ou de vidéosurveillance.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. le rapporteur m’a demandé de retirer mon amendement. En général, une telle demande est formulée lorsque les positions sont très rapprochées ou quand l’amendement est en partie satisfait. Or, ici, non seulement les positions ne sont pas rapprochées, mais elles sont fondamentalement différentes. Le retrait n’est donc absolument pas envisageable.
Un des arguments avancés par M. le rapporteur me laisse pantois : une telle disposition constituerait une charge supplémentaire pour la CNIL, qui n’aurait pas les moyens d’assumer sa mission. Mais, monsieur le rapporteur, la charge ne sera pas moindre si elle échoit à une autre autorité !
Par conséquent, si des moyens doivent être accordés, pourquoi ne pas les attribuer à la CNIL ?
Par ailleurs, je rappelle l’un des arguments qui avaient plaidé en faveur d’un centre de décision unique : en confiant le pouvoir décisionnaire à chaque préfet – la commission départementale instruit, mais c’est le préfet qui prend la décision – on crée, en fait, cent centres de décision et on prend le risque d’aboutir à une certaine incohérence dans les arbitrages sur l’ensemble du territoire.
Vous le savez, au nombre de ceux qui demandent l’installation de dispositifs de vidéo figurent beaucoup de commerçants, qui se dotent d’une organisation intégrée et se fédèrent en groupes nationaux. Nombre de professionnels se sont spécialisés pour monter des dossiers sur les problèmes de sécurité. Je sais, pour en avoir discuté avec certains d’entre eux, qu’un même dossier présenté sur plusieurs départements est accepté dans certains alors qu’il est rejeté dans d’autres. L’unicité de la République est ainsi mise à mal.
C’est pourquoi le fait d’opter pour un centre décisionnel unique me paraît un choix cohérent et susceptible d’apporter un maximum de garanties.
L'amendement n'est pas adopté.
L’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi modifié :
1° Les deux premiers alinéas du II sont remplacés par neuf alinéas ainsi rédigés :
« La transmission et l’enregistrement d’images prises sur la voie publique, par le moyen de la vidéoprotection, peuvent être mis en œuvre par les autorités publiques compétentes aux fins d’assurer :
« 1° La protection des bâtiments et installations publics et de leurs abords ;
« 2° La sauvegarde des installations utiles à la défense nationale ;
« 3° La régulation des flux de transport ;
« 4° La constatation des infractions aux règles de la circulation ;
« 5° La prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques d’agression, de vol ou de trafic de stupéfiants ;
« 6° La prévention d’actes de terrorisme ;
« 7° La prévention des risques naturels ou technologiques ;
« 8°
« Après information du maire de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection aux fins d’assurer la protection des abords de leurs bâtiments et installations, dans les lieux susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol. » ;
1° bis (nouveau) Le premier alinéa du III est ainsi complété :
« Lorsque le système comporte des caméras installées sur le territoire de plusieurs départements, l’autorisation est délivrée par le représentant de l’État dans le département dans lequel est situé le siège social du demandeur, et, lorsque ce siège est situé à Paris par le préfet de police, après avis de la commission départementale de vidéosurveillance compétente. Les représentants de l’État dans les départements dans lesquels des caméras sont installées en sont informés. » ;
2° Au deuxième alinéa du III, après le mot : « images », sont insérés les mots : « et enregistrements » et il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Le visionnage des images peut être assuré par les agents de l’autorité publique ou les salariés de la personne morale titulaire de l’autorisation ou par ceux des opérateurs publics ou privés agissant pour leur compte en vertu d’une convention. » ;
2° bis Après le deuxième alinéa du III, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’une autorité publique ou une personne morale n’exploite pas elle-même son système de vidéoprotection de voie publique, la convention qu’elle passe avec un opérateur public ou privé est agréée par le représentant de l’État dans le département et, à Paris, par le préfet de police, après information du maire de la commune concernée, et conforme à une convention type fixée par voie réglementaire après avis de la commission nationale prévue à l’article 10-2. Par ailleurs, les agents et salariés chargés de l’exploitation du système sont soumis aux dispositions du titre Ier de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité, à l’exception de ses articles 3 à 3-2 et 10.
« Lorsqu’une autorité publique n’exploite pas elle-même le système, les salariés de la personne privée qui y procèdent sous son contrôle et pour son compte ne peuvent pas avoir accès aux enregistrements des images prises sur la voie publique. » ;
3° À la première phrase du troisième alinéa du III, après le mot : « nationales », sont insérés les mots : « ainsi que des douanes et des services d’incendie et de secours » ;
3° bis Au quatrième alinéa du III, après les mots : « arrêté ministériel », sont insérés les mots : « après avis de la Commission nationale de la vidéoprotection » ;
4° Le sixième alinéa du III est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« La commission départementale prévue au premier alinéa du présent III peut à tout moment exercer, sauf en matière de défense nationale, un contrôle sur les conditions de fonctionnement des systèmes de vidéoprotection répondant aux conditions fixées au II. Elle émet, le cas échéant, des recommandations et propose la suspension ou la suppression des dispositifs non autorisés, non conformes à leur autorisation ou dont il est fait un usage anormal.
« La Commission nationale de l’informatique et des libertés peut, sur demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, du responsable d’un système, ou de sa propre initiative, exercer un contrôle visant à s’assurer que le système est utilisé conformément à son autorisation ainsi qu’aux obligations fixées aux articles 1er et 34 de la loi n° 78-17 relative à l’informatique et aux libertés. Ce contrôle est effectué dans les conditions prévues à l’article 44 de la même loi. Lorsque la Commission nationale de l’informatique et des libertés constate un manquement à ces dispositions, elle peut mettre en demeure le responsable d’un système de le faire cesser dans un délai qu’elle fixe et qui ne peut excéder trois mois. Si le responsable ne se conforme pas aux termes de la mise en demeure, elle peut prononcer un avertissement public à son égard. Si ces mesures ne permettent pas de faire cesser le manquement constaté, la Commission nationale de l’informatique et des libertés peut demander au représentant de l’État dans le département et, à Paris, au préfet de police, d’ordonner la suspension ou la suppression du système de vidéoprotection.
« À la demande de la commission départementale prévue au premier alinéa du présent III, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés ou de sa propre initiative, le représentant de l’État dans le département et, à Paris, le préfet de police, peut fermer pour une durée maximale de trois mois, après mise en demeure non suivie d’effets dans le délai qu’elle fixe, un établissement ouvert au public dans lequel est maintenu un système de vidéoprotection sans autorisation. » ;
5° Le dernier alinéa du III est ainsi rédigé :
« Les autorisations mentionnées au présent III et délivrées avant le 1er janvier 2000 expirent le 24 janvier 2011. Celles délivrées entre le 1er janvier 2000 et le 31 décembre 2002 expirent le 24 janvier 2012. Celles délivrées entre le 1er janvier 2003 et le 24 janvier 2006 expirent le 24 janvier 2013. » ;
5° bis Après le premier alinéa du III bis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La même faculté est ouverte au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police, informé de la tenue imminente d’une manifestation ou d’un rassemblement de grande ampleur présentant des risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens. L’autorisation d’installation du dispositif cesse d’être valable dès que la manifestation ou le rassemblement a pris fin. » ;
5° ter Au début du deuxième alinéa du III bis, sont ajoutés les mots : « Sauf dans les cas où les manifestations ou rassemblements de grande ampleur mentionnés à l’alinéa précédent ont déjà pris fin, » ;
6° Le IV est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorisation peut prévoir un délai minimum de conservation des enregistrements. » ;
6° bis (nouveau) Le deuxième alinéa du V est ainsi rédigé :
« Toute personne intéressée peut saisir la commission départementale mentionnée au III ou la Commission nationale de l’informatique et des libertés de toute difficulté tenant au fonctionnement d’un système de vidéoprotection. » ;
7° Au VI, après les mots : « commission départementale », sont insérés les mots : « ou de la Commission nationale de l’informatique et des libertés » ;
8° Au VI bis, après le mot : « libertés », sont insérés les mots : « et à la Commission nationale de la vidéoprotection » ;
9° À la première phrase du VII, après les mots : « décret en Conseil d’État », sont insérés les mots : «, après avis de la Commission nationale de la vidéoprotection, ».
L’article 17 m’offre l’occasion d’évoquer à mon tour les aspects parisiens de la vidéosurveillance, mais je le ferai d’une façon tout autre que ma collègue qui s’est exprimée sur ce sujet il y a quelques instants !
Personnellement, je salue la résistance manifestée pendant longtemps par le Conseil de Paris pour éviter de tomber dans la surveillance généralisée. Je regrette la pression invraisemblable exercée par le préfet et par la droite au Conseil de Paris afin d’augmenter le nombre de caméras dans la capitale et d’en changer l’optique.
À l’heure actuelle, vous l’ignorez peut-être, Paris compte 9 500 caméras sur le domaine public, qui sont celles de la RATP et de la SNCF, et 20 000 caméras privées, qui sont celles des commerces. Dire, dans ces conditions, qu’il n’y a pas de caméras à Paris et que le système de surveillance sera révolutionné, cela relève encore, comme pour la vidéoprotection, de la bataille idéologique !
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
La préfecture de police a obtenu l’implantation de 1 000 caméras supplémentaires, mais – c’est là le problème – sur la voie publique.
Cette très forte pression de la droite pendant des années et des années au Conseil de Paris s’est accentuée depuis la dernière élection présidentielle, ce qui n’a pas manqué d’inquiéter grand nombre de nos concitoyens parisiens, et je les comprends !
Vous ne l’avez pas vu, mais il y a eu beaucoup de mobilisations et de manifestations !
Tout à fait !
Personnellement, je conçois la capitale comme une ville ouverte, une ville de liberté et de libre circulation. C’est d’ailleurs l’image qu’en ont traditionnellement les Parisiens et les millions de personnes qui visitent Paris. Le développement de la vidéosurveillance, prévu par le plan préfectoral au nom de la sécurité de tous, contredit cette tradition, ainsi que l’ont fait valoir mes amis au Conseil de Paris.
Par ailleurs, pourquoi parler de la sécurité de tous puisque l’on sait que ces 1 000 caméras ne seront pas implantées dans des quartiers populaires, mais seront concentrées dans des lieux hautement touristiques ou prestigieux où elles fonctionneront de jour comme de nuit ? C’est de l’affichage et une utilisation des technologies que je ne cautionne absolument pas.
Les citoyens doivent pouvoir en juger. Or M. Türk nous a éclairés sur l’importance du débat sémantique. Finalement, a-t-il reconnu, la « vidéoprotection » est un concept qui « passe mieux » dans la population que celui de « vidéosurveillance ». C’est évident. Mais prenez garde : de telles astuces, qui permettent de détourner l’attention de nos concitoyens ou d’orienter leur jugement, n’ont pas toujours le résultat escompté. Ce qui se passe avec les Roms ou les retraites prouve bien qu’il n’est pas aisé de faire prendre le faux pour le vrai !
Je comprends bien l’intérêt que présente l’utilisation du terme « vidéoprotection », mais j’observe qu’en démocratie les citoyens doivent être complètement informés… Par exemple, concernant Paris, il faudrait établir un comparatif clair entre les mégapoles qui utilisent déjà la vidéosurveillance afin de mesurer les résultats, de connaître les inconvénients du système, les taux d’élucidation enregistrés et mis en rapport avec la densité des installations. À cet égard, on peut lire dans le Daily Telegraph qu’à Londres 1 000 caméras permettent de résoudre moins d’un crime par an : résoudre un crime, chers collègues, pas protéger les individus !
De même, la comparaison du rapport coût-efficacité de la vidéosurveillance et de la présence humaine serait une information utile mise à la disposition des citoyens en vue de leur consultation, au lieu de tenter de leur faire croire, par de subtils changements d’appellations, que l’omniprésence des caméras dans les zones de circulation intense des mégapoles, notamment les zones touristiques, constitue une véritable protection.
La RATP nous fournit malheureusement la preuve du caractère illusoire de cette « protection ». Entendons-nous bien : je ne suis absolument pas opposée à la présence de vidéosurveillance dans les lieux de circulation clos, comme les stations de métro ou les gares. Mais soyons réalistes : quand on est poussé sous une rame de métro, on meurt, et la vidéo n’aura rien empêché, même s’il est vrai qu’elle permet d’identifier l’auteur et de l’arrêter, un grand malade, certainement, comme on l’a vu récemment.
À l’avenir, gageons que les voleurs et autres délinquants porteront des cagoules ! On ne pourra même pas livrer leurs photos à la vindicte populaire. La victime, quant à elle, sera morte, agressée, cambriolée, dévalisée.
Cessez donc de vouloir nous faire croire que la vidéosurveillance est efficace pour protéger les personnes. C’est votre conception, mais ce n’est que cela. Consultons plutôt nos concitoyens pour savoir ce qu’ils en pensent, non pas au moyen de ces petits sondages qui n’ont d’autre but que de prouver que la population réclame une protection. Évidemment ! Qui ne veut pas être protégé ? La vraie question est de savoir si la vidéosurveillance leur assure cette protection, et la réponse est non ! Elle permet effectivement d’élucider un certain nombre de faits, mais jusqu’à quel point est-elle efficace ? En effet, elle déplace la délinquance, tout le monde le sait : installez une vidéosurveillance dans les grands centres urbains, les délinquants iront ailleurs !
Le coût de la vidéosurveillance est donc énorme, au détriment de la protection humaine qu’attendent nos concitoyens. Informons-les donc correctement, ce qui ne peut se résumer à leur assurer que l’on ne met pas en place une surveillance généralisée. Nos concitoyens ne sont pas des idiots : ils sont capables de mesurer la part d’aliénation de leur liberté et le coût en termes d’impôts qu’ils sont prêts à accepter pour une surveillance accrue de l’espace public. Mais ce n’est pas ainsi que vous procédez et nous ne partageons pas cette conception de la démocratie !
L’amendement n° 136, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Cet amendement tend à supprimer purement et simplement l’article 17 du projet de loi, qui définit le cadre juridique de la vidéoprotection. Or il est évident que nous tenons à cette vidéoprotection et qu’un encadrement juridique est nécessaire.
La commission a donc émis un avis très défavorable sur cet amendement.
Nous venons d’avoir ce débat, je n’y reviendrai donc pas, car tous les arguments ont été échangés.
S’agissant de Paris, j’ajouterai simplement une remarque : lorsque l’on commence à équiper l’espace public d’une ville, même importante, il faut commencer dans une zone donnée. Dans toutes les villes qui ont adopté la vidéoprotection, l’installation des équipements a été nécessairement progressive : elle a commencé par les centres, les espaces plus sensibles, et peu à peu, parce que nos concitoyens résidant dans les quartiers populaires ont exprimé également une attente en ce sens, elle s’est étendue.
On ne peut donc pas reprocher au Gouvernement de ne commencer qu’avec 1 000 caméras à Paris. Je suis certain que l’on n’en restera pas là, tant l’attente est forte.
Je suis ravie que mon intervention ait incité notre collègue Nicole Borvo Cohen-Seat à rechercher quelques informations sur la situation de Paris. Je tiens malgré tout à lui dire que, malgré la longueur de son propos, elle n’a pas vraiment réussi à justifier sa position.
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de vingt-huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Je vous propose donc d’entrer dans le tunnel, mes chers collègues !
L’amendement n° 217 rectifié, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité est abrogé.
II. – À compter de l’entrée en vigueur de la loi n° du d’orientation et de programmationpour la performance de la sécurité intérieure, le représentant de l’État dans le département et, à Paris, le préfet de police ainsi que la commission départementale conservent les attributions qui leur étaient initialement dévolues par l’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité pour les demandes d’installation d’un système de vidéosurveillance en cours d’instruction.
La parole est à M. Charles Gautier.
L’amendement n° 369 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Mézard et Baylet, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
I. - Remplacer (dix fois) le mot :
vidéoprotection
par le mot :
vidéosurveillance
II. - En conséquence, procéder au même remplacement dans l’ensemble du texte.
Cet amendement n’a plus d’objet, du fait des votes précédemment intervenus.
L’amendement n° 411 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que la prévention, dans des zones particulièrement exposées à ces infractions, à des fraudes douanières prévues par le deuxième alinéa de l’article 414 du code des douanes et des délits prévus à l’article 415 du même code portant sur des fonds provenant de ces mêmes infractions
II. – Alinéa 20
Après le mot :
phrase
insérer les mots :
et à la troisième phrase
La parole est à M. le secrétaire d’État.
Cet amendement tend à étendre la possibilité de mise en œuvre de la vidéoprotection à la prévention des délits douaniers.
En effet, les douanes participent de plus en plus, y compris dans le cadre des GIR, à l’élucidation d’actes de délinquance. Nous souhaitons donc étendre la possibilité d’installer des caméras de vidéoprotection dans des secteurs particulièrement exposés à la fraude douanière et, principalement, à la contrebande.
Les délits douaniers, vous le savez, constituent une catégorie juridique distincte des atteintes aux biens et aux personnes actuellement visées par la loi, d’où la nécessité d’introduire cette précision dans le texte.
Dans le cadre de ce dispositif, les caméras de vidéoprotection pourront être installées dans les ports, les aéroports et à proximité des frontières, pour lutter encore plus efficacement contre un certain nombre de trafics et contre les actes de bandes organisées.
Comme le prévoit déjà la loi pour les services de police et de gendarmerie, nous pensons qu’il est utile de permettre au préfet, lorsqu’il l’estime nécessaire, d’autoriser la transmission des images de vidéoprotection aux agents des douanes, dans les zones particulièrement exposées aux infractions contre lesquelles leur service est chargé de lutter.
Cette transmission est déjà possible en direction des commissariats de police ou des services de gendarmerie, même lorsque les images proviennent de systèmes de vidéoprotection mis en œuvre par les mairies.
Tel est l’objet, extrêmement pratique, concret et utile, de cet amendement du Gouvernement.
L’amendement n° 92 rectifié, présenté par MM. Nègre, Leleux, Mayet et Carle, Mlle Joissains, Mme Lamure et MM. Doligé, Bailly, Houel, Trucy, Demuynck et Pointereau, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 9° La prévention des actes d’incivilité graves ou répétés.
La parole est à M. Louis Nègre.
Cet amendement tend à ajouter à l’article 17 un alinéa visant la prévention des « actes d’incivilité graves ou répétés ».
Je rappelle que le code général des collectivités territoriales confie au maire la mission d’assurer « le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ». Nous constatons souvent dans nos rues les conséquences de l’incivisme de certains de nos concitoyens, dépôts d’objets encombrants, constitution au vu et au su de tous de véritables décharges et entassement de poubelles. Les responsables considèrent en effet qu’ils n’ont rien à faire du respect des règles !
En tant que maire, chargé notamment de garantir la salubrité publique, j’estime que ces incivilités constituent des atteintes extrêmement graves, qui justifient de recourir à la vidéoprotection, comme nous avons autorisé ce recours, à juste raison, pour la régulation des flux de transports et les infractions aux règles de la circulation. Il s’agit en effet d’atteintes au bon ordre, aux règles de la civilité en général et à la qualité de vie dans nos centres urbains.
Je demande donc que la vidéoprotection puisse contribuer également à la prévention de ces incivilités.
L’amendement n° 43, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 16
Supprimer les mots « ou les salariés de la personne morale titulaire de l’autorisation »
III. – Alinéa 18
1° Dans la première phrase, supprimer les mots « ou une personne morale » et « ou privé »
2° Dans la dernière phrase, supprimer les mots « et salariés »
IV. – Alinéa 19
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
J’ai déjà fait part de mes réserves à l’égard de la généralisation de la vidéosurveillance.
L’article 17 ne se contente pas d’organiser le cadre juridique de la vidéosurveillance : de manière plus offensive, il procède à une véritable privatisation de cet outil, qui pourra désormais être utilisé par des opérateurs privés pour quadriller l’espace public.
La possibilité offerte aux personnes morales de droit privé de mettre en œuvre un système de vidéosurveillance sur la voie publique a pour conséquence la privatisation graduelle de cet espace, sous couvert de lutte contre le terrorisme, le vol ou les agressions.
Ces motifs flous vont permettre un quadrillage toujours plus important de l’espace public par des caméras, dites aujourd’hui de vidéoprotection, mais qui ne réduisent en réalité que le champ du respect de la vie privée des individus.
Demain, chaque coin de rue sera filmé, non pas par des caméras installées par l’État, mais par des caméras privées, à l’usage privé d’opérateurs privés.
En effet, la personne qui se promènera dans la rue, aux abords des installations et bâtiments, sera filmée, enregistrée, et n’aura aucun droit sur ces images. En revanche, si elle entre dans le bâtiment, un autre cadre juridique s’appliquera : elle sera informée de l’existence d’un système de vidéosurveillance, et pourra alors consulter les images.
Deux régimes juridiques, l’un sans aucune protection et l’autre beaucoup plus protecteur, vont donc s’appliquer à la même personne filmée par le même système de vidéosurveillance. Il est absurde qu’une personne soit moins bien protégée devant un bâtiment qu’à l’intérieur : le même régime protecteur doit s’appliquer dans les deux cas de figure, avec les mêmes droits d’accès et les mêmes droits à la protection de l’image.
Vous avez choisi une protection à géométrie variable du droit à la vie privée pour opérer une privatisation scandaleuse de l’espace public, tout cela au mépris des libertés individuelles.
Telle est la vraie question de fond : l’État organise la privatisation de la sécurité publique, en donnant à des opérateurs privés la possibilité de visionner et d’épier l’espace public. Nous trouvons cette orientation très grave.
L’État cherche à se défausser d’une mission de service public sur le secteur privé. Nous savons que la vidéosurveillance a un coût : au lieu d’assumer sa politique, la majorité souhaite confier à d’autres le soin d’investir et de payer.
Nous ferons d’ailleurs la même remarque en ce qui concerne l’injonction qui pourra être faite aux collectivités territoriales de se doter d’un système de vidéosurveillance : là encore, la majorité veut faire payer aux communes ce que l’État doit normalement prendre lui-même en charge, en contradiction avec le principe de libre administration des collectivités territoriales.
Le présent amendement a donc pour objet de supprimer cette faculté offerte aux personnes morales de droit privé, réservant ainsi la mise en œuvre de systèmes de vidéosurveillance dans l’espace public aux seules personnes morales de droit public.
Les amendements n° 137 et 318 rectifié sont identiques.
L’amendement n° 137 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L’amendement n° 318 rectifié est présenté par MM. Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour défendre l’amendement n° 137.
L’alinéa 12 de cet article prévoit que les entreprises privées seront habilitées à placer des caméras de vidéosurveillance dans la rue.
Vous leur confiez ainsi des prérogatives exorbitantes, monsieur le secrétaire d’État, puisqu’elles pourront échapper aux obligations imposées dans le cadre de l’installation de caméras dans les espaces privatifs : information par voie d’affichage ou de panonceaux indiquant les nom, qualité et numéro de téléphone du responsable pour permettre à toute personne intéressée d’exercer son droit d’accès.
On peut donc parler d’une privatisation rampante du domaine public.
La vidéosurveillance a, de fait, un caractère intrusif au regard du droit au respect de la vie privée. Elle est en outre susceptible de mettre en cause la liberté d’aller et venir des citoyens, ainsi que celle des salariés des entreprises concernées, qui verront leurs faits et gestes sur la voie publique surveillés par des sociétés privées et pour des intérêts eux-mêmes privés. Je pense, par exemple, au cas des grands magasins, évoqué dans le rapport de la commission des lois.
Je note, d’ailleurs, une inquiétude particulière, et légitime, qui a été exprimée par l’Union sociale pour l’habitat.
Celle-ci souligne que les organismes d’habitations à loyer modéré – les organismes d’HLM –, comme tout propriétaire, n’ont pas vocation à exercer une mission générale de surveillance de la voie publique, et encore moins à surveiller les allées et venues de leurs habitants dans les espaces publics. Or, il est à craindre que cet alinéa 12 et, plus généralement, la philosophie de l’article 17 ne les y conduisent, pour compenser tant l’insuffisance des forces de police que celle des intervenants de terrain, qu’il s’agisse des correspondants de nuit, des médiateurs, des animateurs ou des éducateurs.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’alinéa 12 de l’article 17 du projet de loi.
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, pour présenter l'amendement n° 318 rectifié.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous ai écouté tout à l’heure avec la plus grande attention : vous indiquiez que le projet de loi comportait un ensemble de mesures permettant de sécuriser totalement les conditions de mise en œuvre de la vidéoprotection.
Nous souhaitons également supprimer cet alinéa parce que nous craignons que l’on ne permette à des prestataires privés de filmer le domaine public municipal. Cet élargissement nous paraît d’autant plus difficile à accepter que le projet de loi ne prévoit qu’une information des maires, sans obligation de recueillir leur accord. Ce transfert de compétence en faveur de personnes privées ne manque donc pas de nous inquiéter.
Je souhaite illustrer mon propos par un exemple : dans les aéroports, le contrôle des passagers a été confié à des entreprises, dans des conditions qui ont soulevé de nombreux problèmes. Je crains donc que, de la même façon, dans le cas qui nous occupe, nous soyons amenés à regretter ce transfert de compétence.
Je voudrais signaler, en outre, que le Conseil d’État, dans son arrêt Commune d’Ostricourt du 29 décembre 1997, a affirmé avec force que les prestataires privés ne peuvent pas participer à des missions de police administrative. Cet article 17 me semble donc faire entorse à cette jurisprudence.
L'amendement n° 221, présenté par MM. Repentin, Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel et Frimat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
Après accord de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéoprotection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations, aux fins d'assurer la protection de ces bâtiments et installations, ainsi que de leurs usagers, dans les lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d'agression ou de vol.
La parole est à M. Alain Anziani.
Cet amendement, présenté sur l’initiative de notre collègue Thierry Repentin, qui regrette de ne pas pouvoir être parmi nous ce matin, est simple. Il vise à préciser les dispositions de l’article 17 qui permettent aux personnes morales de droit privé de mettre en œuvre un dispositif de vidéoprotection.
Ces précisions portent sur trois points.
Premièrement, le recours à la vidéoprotection par les personnes morales de droit privé doit être soumis à l’accord de la commune.
En effet, il entre, nous semble-t-il, dans les fonctions du maire et du conseil municipal de connaître exactement les mesures prises sur le territoire de la commune, étant rappelé, une fois encore, que ces mesures concernent la sécurité et l’ordre public, des compétences relevant a priori du pouvoir régalien, et non du pouvoir d’une personne morale de droit privé.
Deuxièmement, d’après les dispositions du projet de loi, la vidéoprotection s’effectuerait « aux abords » des différents bâtiments. Que signifie le terme « abords » ?
Je viens de consulter le dictionnaire et, s’agissant d’une notion relativement floue – l’abord, c’est ce qui environne –, on peut y inclure le pied du bâtiment tout comme des espaces nettement plus éloignés. Par exemple, ne peut-on pas considérer qu’une place ou une rue situées devant le bâtiment font partie de ses abords, la première dans sa totalité et la seconde sur toute sa longueur ?
Pour éviter les risques de contentieux et la multiplication des procédures judiciaires, ce qui, je crois, est le souci du législateur et devrait être aussi celui du Gouvernement, il convient d’éviter le terme « abords » sans plus de précision, et de privilégier le terme « abords immédiats ».
Troisièmement, un point évident manque dans le texte : cette vidéoprotection a pour intérêt, non seulement la protection des bâtiments et des installations, mais aussi celle des usagers. En l’état du texte, que fait-on des êtres humains ? Un usager en danger mérite également protection. La notion doit donc être intégrée dans l’alinéa 12 de l’article 17 du projet de loi.
L'amendement n° 220, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
Après accord de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent mettre en œuvre sur la voie publique un système de vidéosurveillance aux fins d'assurer la protection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations, dans les lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme.
La parole est à M. Charles Gautier.
L’extension de l’usage de la vidéosurveillance à des personnes morales privées dans les lieux particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol nous paraît exorbitante. Elle représente une forme de privatisation de la mission régalienne de préservation de l’ordre public.
Certes, elle a été validée une première fois par le Conseil constitutionnel, car la finalité de lutter contre le terrorisme nécessitait alors d’y recourir.
Le législateur a effectivement estimé, en 2006, que la protection de tels lieux contre les attentats exigeait que les exploitants soient autorisés à filmer les abords « immédiats » – le terme était précisé à l’époque – afin de repérer des comportements à risque ou d’éventuels engins explosifs.
Le groupe socialiste du Sénat avait d’ailleurs adopté cette disposition, mais avait voté contre le projet de loi car ses promoteurs profitaient du contexte pour faire passer des mesures excessives de lutte contre l’immigration clandestine et le droit d’asile.
Ici, la mesure est clairement proposée pour faire des économies.
En effet, il est expliqué dans l’étude d’impact du projet de loi que l’installation de systèmes de vidéosurveillance sur la voie publique par des personnes privées assure « un maillage territorial continu » et permet « une véritable continuité territoriale, et ce à moindre coût, puisque la commune pourra mener son projet de sécurisation en tenant compte des implantations privées ».
Il faut bien compenser l’application de la révision générale des politiques publiques aux agents des forces de police et de gendarmerie !
Notons que notre rapporteur reconnaît qu’il existe un risque et que de sérieuses garanties doivent être instaurées. C’est pourquoi il tente de pallier la difficulté que constitue l’autorisation de cette nouvelle catégorie de délégations en proposant que l’activité de vidéosurveillance de la voie publique, lorsqu’elle est exercée pour le compte des personnes morales titulaires d’une autorisation par des opérateurs privés, soit soumise aux mêmes règles d’agrément, d’autorisation et de formation des agents que les activités privées de sécurité définies par le titre Ier de la loi du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité.
Restons-en donc au droit en vigueur, tout en nous assurant de l’accord préalable de la commune, et pas seulement de l’information du maire ! En effet, d’expérience, les systèmes de vidéo sont d’autant mieux acceptés par la population qu’il y a eu présentation et débat préalable au sein du conseil municipal.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons cette nouvelle rédaction de l’alinéa 12.
L'amendement n° 320 rectifié, présenté par MM. Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Detcheverry, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
Après accord de l'autorité administrative dont relève la voie publique et, le cas échéant, information du maire de la commune concernée, les autres personnes morales peuvent... (le reste sans changement).
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Cet amendement tend à corriger la disposition du projet de loi subordonnant la mise en œuvre d’un système de vidéoprotection par une personne morale de droit privé à la seule information du maire de la commune concernée.
Je ne reviendrai pas sur les questions d’intrusion et d’introduction du secteur privé dans un domaine qui nous paraît exiger la plus grande vigilance.
La personne privée qui serait désireuse de surveiller le domaine public municipal à proximité d’un bâtiment pourrait le faire dans le seul cas où les abords de l’édifice sont « susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol ».
Ces critères sont certes précis, mais ils ne sont appréciés par personne si, comme le prévoit la rédaction actuelle, le maire n’est qu’informé de l’installation. Or, au vu de la privatisation de la police administrative qui découlerait de ces mesures et de l’empiétement sur les prérogatives de la police municipale, nous souhaiterions être assurés que les dispositions de l’alinéa 12 se limitent bien aux seuls cas où les critères sont réellement réunis.
C’est pourquoi nous proposons de prévoir l’accord de l’autorité administrative dont relève la voie publique et, le cas échéant, l’information du maire de la commune concernée.
L'amendement n° 319 rectifié, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Detcheverry, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après les mots :
de la commune concernée
insérer les mots :
et autorisation de la commission départementale de vidéosurveillance,
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Il s’agit d’un amendement de repli, tendant à demander, à défaut de l’accord de l’autorité administrative dont relève la voie publique, l’autorisation de la commission départementale de vidéosurveillance, cette dernière étant le véritable organe de contrôle. À ce sujet, je rappelle, une fois de plus, combien M. le secrétaire d’État a lui-même insisté sur la nécessité d’opérer en toute sécurité en matière de vidéosurveillance.
L'amendement n° 219, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après les mots :
des abords
insérer le mot :
immédiats
La parole est à M. Charles Gautier.
Il s’agit également d’un amendement de repli, se limitant à l’introduction de l’adjectif « immédiats » après le terme « abords ».
Je tiens à évoquer mon expérience de membre d’une commission départementale des systèmes de vidéosurveillance. En effet, nous parlons beaucoup de ces instances, mais je ne sais pas si nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à participer personnellement à leurs travaux.
Je siège donc à la commission départementale de Loire-Atlantique et l’examen des dossiers qui nous sont soumis dans ce cadre porte justement sur cette question.
Chaque candidat présente l’implantation de ses caméras, ainsi qu’un certain nombre de simulations de prises, et les commissaires passent leur temps à vérifier, par exemple sur une vue présentant une sortie de magasin, que celle-ci se limite bien à la sortie du magasin. Si l’on est susceptible de voir des passants ou des voitures circulant dans la rue, des modifications sont demandées.
Si désormais ce sont les abords de manière générale, et non plus les abords « immédiats », qui sont surveillés, il n’y a plus de limites.
L'amendement n° 222, présenté par MM. Repentin, Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel et Frimat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
S'agissant des bâtiments à usage d'habitation, la personne morale qui souhaite procéder à l'installation d'un dispositif de vidéoprotection organise une consultation des habitants.
La parole est à M. Alain Anziani.
Notre collègue Thierry Repentin est encore à l’origine de cet amendement, qui tend à évoquer le cas des habitants concernés par la vidéoprotection.
Un propriétaire qui utilise un dispositif de vidéosurveillance aux abords de son immeuble va filmer les personnes qui entrent et sortent du bâtiment, ce qui peut constituer une atteinte à la vie privée.
Dans le cadre de la délivrance des permis de construire, les maires ont aujourd’hui la sagesse, dans la plupart des cas, d’organiser des réunions de concertation avec les riverains pour discuter de leurs souhaits, des problèmes qui vont se poser ou des nuisances possibles.
Ici, nous parlons non pas d’un permis de construire, mais d’un immeuble placé sous surveillance ! L’organisation d’une concertation avec les habitants directement concernés par cette mesure, qui, je le répète, peut porter atteinte à leur vie privée, me semble indispensable.
L'amendement n° 138, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le visionnage des images est assuré par les agents de l'autorité publique ou par ceux des opérateurs publics agissant pour son compte en vertu d'une convention.»
II. – Alinéa 18, première phrase
Supprimer les mots :
ou privé
III. – Alinéa 19
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Vous l’avez compris, chers collègues, nous nous opposons au fait que le visionnage des images captées sur la voie publique soit délégué à des personnes privées.
Permettez-moi de relire la recommandation n° 3 du groupe de travail sénatorial sur la vidéosurveillance, dont notre rapporteur était membre : « Ne pas déléguer la vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées, ni permettre aux autorités publiques de vendre des prestations de vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées ».
Ce rapport récent – il n’a pas deux ans – fait aussi état de l’opposition du président de la Commission nationale de la vidéosurveillance, M. Alain Bauer, quant au visionnage des images de la voie publique.
Vous rappeliez alors, toujours dans ce même rapport, monsieur le rapporteur, « le principe dégagé par le juge administratif selon lequel il est impossible de déléguer une mission de police à une personne privée par un contrat ».
Pourtant, l’alinéa 16 de l’article 17 du projet de loi fait l’inverse puisqu’il permet, d’une part, le visionnage des images par les utilisateurs privés, d’autre part, la possibilité pour l’autorité publique de déléguer au secteur privé le visionnage d’images filmées sur la voie publique.
Que les personnes morales de droit privé ayant installé des caméras de surveillance puissent visionner les images que celles-ci ont prises, cela paraît logique… sauf que seraient désormais concernées les images filmées sur la voie publique ! Cela nous conforte dans notre refus de voir des caméras privées installées sur le domaine public.
Il est évident que ni l’agrément préfectoral pour la convention et les salariés concernés ni l’interdiction d’accès aux enregistrements ne constituent des garanties suffisantes contre d’éventuelles dérives ou d’éventuels abus. Qui va contrôler ?
J’aimerais aussi vous rappeler, monsieur le rapporteur, qu’un des arguments que vous avanciez dans le rapport du groupe de travail tenait aux « risques pour les libertés publiques ». Je ne vois pas comment, depuis moins de deux ans, ces risques auraient disparu.
L'amendement n° 223, présenté par Mme Klès, MM. Anziani, Peyronnet, Bel, C. Gautier, Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
Le visionnage des images est assuré par les agents de l'autorité publique ou par ceux des opérateurs publics.
La parole est à Mme Virginie Klès.
Chers collègues, combien de précautions oratoires me faut-il prendre pour vous expliquer que je peux parler de vidéosurveillance – ou de vidéoprotection, puisqu’il en a été décidé ainsi tout à l’heure – sans pour autant remettre en cause l’utilité de l’outil. Mais nous parlons bien d’un outil, et non d’autre chose !
Personnellement, je n’ai pas de position dogmatique ou idéologique. Simplement, face à un nouvel outil, je m’interroge à la fois sur son utilité – réelle, prouvée, mesurée – et sur ses éventuels dangers.
Mes chers collègues, je souhaite par cet amendement vous alerter sur un certain nombre de dangers. Un marteau est un outil ; mais, mis dans les mains d’un enfant de quatre ans agressif, il peut se révéler dangereux.
En l’occurrence, et en suivant le même raisonnement que ma collègue Nicole Borvo Cohen-Seat et avec des arguments similaires, je souhaite attirer votre attention sur le danger que représente le visionnage par des personnes privées d’images prises sur la voie publique.
Dans le rapport d’information n° 131, M. le rapporteur estimait, en cohérence avec la jurisprudence administrative, que la surveillance de la voie publique ne pouvait être déléguée à des personnes privées. La CNIL était d’accord avec cette position.
Je m’étonne aujourd'hui de constater une telle volte-face, et je m’interroge sur le danger que pourraient entraîner pour la protection des libertés publiques d’éventuelles bavures, si certaines images venaient à être publiées. Je pense, par exemple, aux agents de nos services de renseignement qui, par nature, doivent être discrets tout en circulant sur la voie publique.
Le visionnage par des personnes privées me semble extrêmement dangereux. Et je dis cela sans dogmatisme ni idéologie, contrairement à certains d’entre vous, chers collègues, qui se hérissent dès que l’on parle de vidéosurveillance et se défendent, comme s’ils voulaient s’en auto-convaincre, en invoquant l’utilité de cet outil et de l’absence de danger.
Je ne suis pas d’accord ! Pour ma part, je le répète, je pense que tout outil présente des dangers.
L'amendement n° 321 rectifié, présenté par MM. Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Supprimer les mots :
ou les salariés de la personne morale titulaire de l'autorisation
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Monsieur le président, si vous en êtes d’accord, je défendrai en même temps l'amendement n° 322 rectifié, qui porte sur le même sujet.
J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 322 rectifié, présenté par MM. Collin et Alfonsi, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano, Vall et Vendasi, qui est ainsi libellé :
Aliéna 18, première phrase
Supprimer les mots :
ou une personne morale
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Les arguments ont déjà été suffisamment développés, je serai donc brève : nous craignons que le visionnage ne soit effectué par des personnes ne présentant pas toutes les garanties nécessaires.
L'amendement n° 139, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 18, première phrase
Remplacer les mots :
de la commission nationale prévue à l'article 10-2
par les mots :
conforme de la commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai en même temps l'amendement n° 140.
J’appelle donc également en discussion l'amendement n° 140, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, qui est ainsi libellé :
Alinéa 21
Remplacer les mots :
de la Commission nationale de la vidéoprotection
par les mots :
conforme de la commission nationale de l'informatique et des libertés
Veuillez poursuivre, madame Borvo Cohen-Seat.
Qu’il s’agisse des conventions dont fait état l’alinéa 18 ou des normes techniques visées par l’alinéa 21, nous considérons que c’est à la CNIL - je regrette que son président, notre collègue Alex Türk, ait quitté l’hémicycle - que doit être conféré le pouvoir de donner un avis, qui plus est, un avis conforme, si l’on veut qu’il soit opératoire.
Nos amendements convergent avec la recommandation n°1 du rapport sur la vidéosurveillance dans lequel nos collègues Jean-Patrick Courtois et Charles Gautier préconisaient de « réunir sous une seule autorité, la CNIL, les compétences d’autorisation et de contrôle en matière de vidéosurveillance ».
Les enjeux de la vidéosurveillance exigent un contrôle réellement indépendant. Or, la Commission nationale de « vidéoprotection » n’offre pas les garanties d’indépendance suffisantes en matière de protection de la vie privée et des libertés individuelles. La commission des lois l’a elle-même relevé dans son rapport, à propos de l’article 18, ce qui l’a amené à modifier le rôle de la CNV, en lui enlevant la mission générale de contrôle de la vidéosurveillance.
Il serait plus légitime, et plus simple, de répondre à la demande de M. Alex Türk et confier le contrôle de la vidéosurveillance à la CNIL.
Je partage les observations de la commission des lois qui, dans son rapport, relève, à propos de la CNIL, les différents avantages que cette autorité présente : compétence, expérience, crédibilité, notoriété, visibilité et même « préservation des deniers publics ». Ces observations auraient dû inciter à aller dans le sens préconisé par le président de la CNIL. Pourquoi, alors, avoir pris une autre décision et limiter le rôle de cette autorité ?
Je sais bien que la CNIL fait partie des autorités indépendantes qui pourraient être un jour menacées par l’institution du Défenseur des droits. De votre point de vue, il n’est donc pas opportun de lui conférer des pouvoirs. Pour notre part, nous voulons, au contraire, conforter le rôle qui est le sien.
L'amendement n° 224, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 18, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à M. Charles Gautier.
L’article 17 dispose que le recours à la procédure ouvrant la possibilité accordée aux personnes morales de droit privée d’installer des systèmes de vidéosurveillance de la voie publique ne peut intervenir qu’en vertu d’une convention agréée par le préfet.
Cette convention devrait être conforme à une convention type fixée par voie réglementaire après avis de la Commission nationale de vidéoprotection.
Nous proposons que la convention type soit également prise après avis de la CNIL. Il semble en effet que l’architecture générale du contrôle en matière de vidéo se soit stabilisée avec, premièrement, le maintien au niveau local de l’autorisation du représentant de l’État après avis des commissions départementales, deuxièmement, l’attribution d’un rôle de conseil et d’évaluation à la Commission nationale de vidéoprotection et, troisièmement, l’attribution du contrôle à la CNIL.
Dès lors qu’il reviendra à la CNIL d’assurer le contrôle sur place de la mise en œuvre de ces dispositifs afin de s’assurer que ces derniers respectent bien les libertés, il paraît opportun et cohérent d’associer cette autorité en lui demandant d’exprimer son avis sur la convention type.
L'amendement n° 225, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Compléter cet alinéa par les mots :
et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à M. Charles Gautier.
Dans son rapport sur le projet de loi, M. le rapporteur estime que l’intervention de la CNIL dans le contrôle de la vidéosurveillance présenterait de nombreux avantages, en premier lieu celui de la maîtrise de la technicité.
En effet, la matière requiert des contrôleurs professionnels, crédibles face aux responsables des systèmes, aux collectivités et aux entreprises.
Selon le rapporteur, la CNIL dispose de la compétence et de l’expérience nécessaires pour avoir cette crédibilité. Il serait donc dommage de se priver de l’avis d’une instance à laquelle le rapporteur attribue autant de qualités…
Nous ne remettons pas en cause le rôle de la CNV à ce stade, mais deux avis techniques sur les normes techniques ne seraient pas superflus.
L'amendement n° 141, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 25
I. - Supprimer le mot :
maximale
II. - Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La décision de fermeture de l'établissement peut être reconduite jusqu'à ce que le manquement ait cessé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Aux termes de l’alinéa 25, le préfet, de sa propre initiative ou à la demande de la commission départementale ou de la CNIL, pourra, après mise en demeure, ordonner la fermeture d’un établissement ouvert au public ayant maintenu des caméras de surveillance sans autorisation. Cette fermeture pourra durer au maximum trois mois.
Que se passera-t-il au bout de cette période si le contrevenant ne s’est pas entre-temps conformé à la loi ? Rien, semble-t-il, puisque le projet de loi ne prévoit pas cette hypothèse.
On peut pourtant s’attendre à ce qu’elle se vérifie souvent. En effet, avec quels moyens pourra s’exercer le contrôle du retour à la loi dans un délai aussi court, d’autant qu’il peut même être inférieur à trois mois ?
Il est prévisible que les décisions de fermeture soient très limitées en nombre dans la mesure où leur impact sera lui-même limité.
C’est d’autant plus regrettable qu’aucun recours ne sera possible après ce délai de trois mois pour empêcher la personne morale de droit privé de maintenir son système de vidéosurveillance dans le bâtiment ouvert au public. Cela n’est pas acceptable !
Si l’on veut que l’alinéa 25 ait une certaine efficacité, il paraîtrait logique de maintenir la fermeture jusqu’à ce que le manquement ait cessé.
L'amendement n° 401, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 27
I. - première phrase
Remplacer l'année :
par l'année :
II. - deuxième phrase
Remplacer l'année :
par l'année :
III. - dernière phrase
Remplacer l'année :
par l'année :
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Cet amendement a pour objet de proroger la durée de validité des autorisations d’installation de vidéoprotection, pour des raisons liées au débat parlementaire.
Pour éviter un engorgement des préfectures et des commissions départementales – nous parlons de 70 000 autorisations à renouveler –, le Gouvernement avait déjà souhaité que le projet de loi soumis à l’examen de l'Assemblée nationale initialement prévoie de proroger la date de validité des autorisations.
Aujourd'hui, nous sommes en septembre et le débat parlementaire se poursuit devant la Haute Assemblée. Nous avons une meilleure visibilité des délais prévisibles d’entrée en vigueur de la loi. C'est la raison pour laquelle, en fonction de ces éléments, nous estimons nécessaire, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous demander de repousser la durée de validité de ces autorisations d’une année supplémentaire par rapport au texte adopté par l'Assemblée nationale.
Ce délai sera réellement mis à profit pour anticiper la charge de travail et organiser sereinement le réexamen des autorisations par les préfectures et les commissions départementales. Nous vous demandons de bien vouloir prendre en compte le principe de réalité et la charge de travail.
L'amendement n° 142, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 28 à 30
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Les alinéas 28 à 30 de l’article 17 prévoient la possibilité de filmer les manifestations et rassemblements de grande ampleur « présentant des risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens ».
De quels risques « particuliers » s’agit-il ? Rien n’est dit. De quelles manifestations est-il question ? Selon la commission des lois, toutes les grandes manifestations qui se tiennent sur la voie publique justifieraient la mise en place d’un système de vidéosurveillance.
Toutes les manifestations seraient donc concernées, par exemple, celle qui a été organisée le 4 septembre contre la politique sécuritaire et xénophobe du Gouvernement, ou encore celle de mardi dernier, contre la réforme des retraites, organisée par les grandes confédérations syndicales. Les deux rassemblements ont été pourtant préparés par des organisations hautement responsables, qui se sont préoccupées d’assurer la sécurité et la protection – ici, c’est bien le mot qui convient – tant des participants que des passants.
Oui, ces manifestations, ce sont celles auxquelles moi-même et les élus de mon groupe participons souvent. Nous savons donc de quoi nous parlons, et je ne crois pas que nous fassions partie des casseurs, au moins potentiels, à surveiller. Au reste, vous le savez bien, quand casseurs il y a, ils sont le plus souvent bien connus des services de police, et il n’est point besoin de caméras pour les repérer.
Votre objectif n’est donc pas celui-là. Depuis 2002, vous n’avez de cesse de criminaliser l’action collective et l’action militante, et ce dans tous les domaines. Aujourd’hui, vous voulez mettre sous surveillance les manifestations. Cette disposition porte atteinte à une liberté fondamentale, celle de manifester. Elle est extrêmement grave et doit être retirée de ce projet de loi.
L'amendement n° 226, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 28
Remplacer la référence :
III bis
par la référence :
II
La parole est à M. Charles Gautier.
On nous propose l’instauration de dispositifs de vidéo implantés pour une durée limitée, par exemple à l’occasion d’une manifestation ou d’un événement culturel ou sportif présentant des « risques particuliers », notion qui relève du flou organisé... Voilà qui est censé permettre, par exemple, de filmer les casseurs présents à l’occasion d’une manifestation.
Par cet amendement, nous proposons de déplacer au sein de l’article 10 de la loi du 21 janvier 1995 la référence au dispositif provisoire de vidéo afin que s’y applique le contrôle préalable de la commission départementale de vidéosurveillance. Cette nouvelle place au sein de l’article est d’ailleurs plus appropriée, car il est instauré une nouvelle hypothèse autorisant l’installation d’un dispositif de vidéo sur la voie publique.
Dans notre rapport d’information sur la vidéosurveillance, nous avons constaté que les délais de procédure actuels sont mal adaptés à ces utilisations, la procédure d’urgence issue de la loi du 23 janvier 2006 ne pouvant actuellement être utilisée qu’aux fins de prévention du terrorisme.
Nous avons alors envisagé de prévoir une procédure d’urgence pour d’autres finalités que la prévention du terrorisme en ajoutant que, à bien des égards, un dispositif temporaire est préférable à un système permanent.
Mais si nous ne veillons pas à entourer ce nouveau dispositif des garanties de contrôle nécessaires pour le rendre conforme aux principes de finalité et de proportionnalité, il devient imprudent d’étendre une législation d’exception à la préservation courante de la sécurité publique.
Je rappelle, à cet égard, que, même dans l’hypothèse de terrorisme, la commission départementale peut, bien que non consultée au préalable, se réunir et donner un avis sur la mise en œuvre de la procédure d’autorisation provisoire.
Si elle peut le faire lorsqu’elle n’y est pas contrainte, elle doit le faire pour les autres cas.
S’il existe un risque particulier d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens, l’urgence impose non pas de « vidéosurveiller » la manifestation ou le rassemblement, mais de l’interdire, tout simplement.
Ou alors il faut en conclure que l’autorité administrative compétente a mal apprécié la portée de la manifestation ou du rassemblement. Dans le droit en vigueur, nous savons qu’une manifestation peut être interdite par le préfet dès lors que celui-ci dispose des éléments de nature à établir un risque de troubles à l’ordre public et alors même qu’aucune déclaration n’aurait encore été déposée.
Si l’urgence le justifie, il n’a pas même besoin de recueillir les observations des organisateurs.
La lutte contre le débordement des casseurs est légitime, mais, telle qu’elle est rédigée, cette disposition autorise la présence systématique de caméras à toutes les manifestations publiques, qu’elles soient politiques, syndicales, culturelles, festives ou religieuses ! C’est la raison pour laquelle le dispositif doit être mieux encadré.
L'amendement n° 44, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Alinéas 29 et 30
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
L’article 17 ouvre la possibilité, pour le préfet, de mettre en œuvre des systèmes de vidéosurveillance ad hoc pour toute manifestation ou rassemblement de grande ampleur.
Il s’agit d’une orientation particulièrement inquiétante et liberticide, qui traduit parfaitement le type de société de surveillance à laquelle le Gouvernement veut nous soumettre.
La condition de mise en œuvre de ce dispositif est très générale : le texte fait référence, dans son alinéa 29, à l’existence de « risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens ». Existe-t-il une définition juridique d’un « risque particulier » ?
Nous considérons que ce critère est une coquille vide et que le flou de la notion permettra de filmer n’importe quel rassemblement, n’importe quelle manifestation, au mépris de la liberté de chacun de manifester !
Peu importe la nature du rassemblement, qu’il soit pacifique, qu’il s’agisse de célébrer des noces, de suivre un enterrement – ce sont, après tout, des événements qui suscitent des rassemblements -, ou de participer à une marche silencieuse, des caméras seront là pour épier, filmer, et, donc, ficher chaque participant.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Ce dispositif porte en lui le germe d’une criminalisation toujours plus forte des mouvements sociaux. Sous couvert de prévention, ce sont, en réalité, de véritables instruments de surveillance des manifestants, de contrôle du mouvement social et de la société, avec tout ce que cela implique sur le terrain du respect des libertés individuelles, notamment la liberté de tout citoyen de manifester.
Nous refusons catégoriquement que l’espace public devienne demain un espace privé bis, régi par le numérique et le fichage des individus : c’est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer la possibilité de mettre en œuvre des systèmes de vidéosurveillance ad hoc.
L'amendement n° 16 rectifié, présenté par MM. Billard et Houel, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 29
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque le maire d'une commune de moins de 3 500 habitants, ou le président d'un établissement public de coopération intercommunale regroupant des communes de moins de 3 500 habitants, en lien avec le représentant de la gendarmerie nationale, constatent conjointement l'urgence et l'exposition particulière à un risque pour la sécurité des personnes et biens de la collectivité territoriale, le représentant de l'État dans le département peut autoriser l'installation d'un système de vidéo protection temporaire, sans avis de la commission départementale.
« L'autorité préfectorale détermine le délai maximum fixé pour l'autorisation.
« Le public est informé de manière claire de l'existence du système de vidéo protection et de l'autorité responsable, sur le périmètre défini. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 227, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 37
Compléter cet alinéa par les mots :
et de la Commission nationale de l'informatique et des libertés
La parole est à M. Charles Gautier.
Il s’agit toujours de la même idée : puisque la CNIL devient l’instance chargée du contrôle des dispositifs et qu’elle élaborera un corpus de règles à respecter sur tout le territoire - notre collègue par ailleurs président de la CNIL a d’ailleurs annoncé ici même la diffusion prochaine de recommandations destinées à l’ensemble des collectivités locales - il convient de l’associer systématiquement.
Quel est l’avis de la commission sur les vingt-six amendements restant en discussion ?
La commission est défavorable à l’amendement n° 217 rectifié, de coordination avec l’amendement n° 216, sur lequel elle avait émis un avis défavorable et qui n’a pas été adopté.
Il en allait de même pour l’amendement n° 369 rectifié, devenu sans objet : il était de coordination avec l’amendement n° 317 rectifié, que le Sénat a également repoussé.
L’amendement n° 411 rectifié vise à autoriser les autorités publiques à installer des systèmes de vidéosurveillance dans les zones particulièrement exposées à des risques de fraudes douanières graves. La deuxième modification proposée est de précision.
Il semble opportun de permettre à la douane d’améliorer sa surveillance des zones frontalières, portuaires et aéroportuaires.
L’avis est favorable.
Les auteurs de l’amendement n° 92 rectifié proposent d’ajouter la prévention des actes d’incivilité graves ou répétés à la liste des finalités permettant l’emploi de la vidéosurveillance.
Je comprends tout à fait l’objet de cet amendement, mais cette proposition paraît largement satisfaite au regard de l’ensemble des autres textes. J’ajoute que, faute de précision, la notion d’incivilité ne paraît pas très pertinente.
Je propose en conséquence à M. Nègre de retirer son amendement.
Compte tenu des propos de M. le rapporteur, je retire mon amendement, monsieur le président.
L'amendement n° 92 rectifié est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
L’amendement n °43 tend à supprimer la possibilité, pour des personnes morales de droit privé, de mettre en œuvre un système de vidéoprotection sur la voie publique pour protéger leurs bâtiments et installations, ainsi que d’exploiter ces systèmes par délégation à d’autres personnes morales.
Or le texte de la commission nous semble offrir des garanties suffisantes pour éviter tout abus dans ce domaine : limitation de l’autorisation de filmer la voie publique aux abords des bâtiments, procédure d’agrément préfectoral de la convention de délégation d’exploitation du système, conformité de cette convention à une convention type fixée par décret, enfin, agrément individuel des agents et salariés chargés de l’exploitation du système.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
Les amendements identiques n° 137 et 318 rectifié visent à supprimer la possibilité pour les personnes morales de droit privé de filmer les abords de leurs bâtiments et installations.
Or, d’une part, la suppression de l’alinéa conduirait à revenir en deçà du droit en vigueur quant aux possibilités offertes à ces personnes morales ; d’autre part, la disposition concernée vise non à faire participer les personnes privées à la police de la voie publique, mais à leur permettre de protéger leurs biens et installations.
L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 221 a pour objet de préciser que la finalité de protection qui justifie l’installation d’une vidéo protection sur la voie publique par une personne morale est de protéger non seulement les bâtiments et installations de cette personne, mais aussi les usagers de ceux-ci.
Il est également proposé que la commune doive donner son accord pour l’installation d’un système vidéo. Or le texte de la commission prévoit simplement l’information du maire, ce qui est préférable si l’on ne veut pas bloquer l’installation de certains systèmes.
L’avis est défavorable.
L’amendement n° 220 vise à revenir à la rédaction initiale de l’alinéa visé, en ne permettant aux personnes morales autres que les autorités publiques de ne filmer la voie publique aux abords immédiats de leurs bâtiments que pour parer au risque de terrorisme, et non aux risques d’agression ou de vol.
Cette disposition permettra pourtant d’assurer une protection plus efficace contre les agressions et vols se produisant à une certaine distance des distributeurs automatiques de billets, pour ne prendre que cet exemple.
L’avis est défavorable.
Aux termes de l’amendement n° 320 rectifié, il est proposé que l’autorité administrative dont relève la voie publique, en particulier le maire, doive donner son accord pour l’installation d’un système de vidéosurveillance sur la voie publique par une personne morale de droit privé.
Le système d’autorisation actuel, et l’obligation, prévue par le texte, d’une information du maire encadrent toutefois suffisamment la possibilité offerte par l’alinéa 12.
L’avis est défavorable.
L’amendement n° 319 rectifié prévoit une autorisation de la commission départementale de vidéosurveillance pour l’installation d’un système par une personne morale de droit privé sur la voie publique.
Ce faisant, il n’est pas cohérent avec le dispositif retenu par la commission, dans lequel le représentant de l’État, toujours responsable des autorisations, requiert simplement l’avis de la commission départementale.
L’avis est défavorable.
Aux termes de l’amendement n° 219, il est proposé de revenir à la rédaction initiale de la loi de 1995 en autorisant les personnes morales à filmer seulement les « abords immédiats », et non les « abords » de leurs bâtiments et installations.
La rédaction proposée par le Gouvernement ne change pas l’esprit de l’alinéa visé, qui tend à permettre aux personnes morales de droit privé de protéger leurs installations et bâtiments et non à se substituer à la police pour surveiller la voie publique. Simplement, la notion d’abords immédiats est excessivement restrictive, voire pléonastique.
L’avis est défavorable.
L’objet de l’amendement n° 222 est de proposer que, lorsqu’une personne morale souhaite procéder à l’installation d’un dispositif de vidéoprotection pour un immeuble d’habitation, une consultation des habitants soit organisée.
Or il s’agit toujours ici du régime de la vidéoprotection sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public, distinct du régime juridique applicable aux parties communes d’un immeuble d’habitation.
Ainsi, les systèmes vidéo dont il s’agit ici ont vocation à filmer non pas les espaces privés à l’intérieur des parties communes, mais la voie publique autour du bâtiment. Il ne paraît donc pas nécessaire d’instaurer une consultation obligatoire des habitants.
L’avis est défavorable.
L’amendement n° 138 tend à supprimer la possibilité, pour des personnes morales de droit privé, de mettre en œuvre un système de vidéoprotection sur la voie publique pour protéger leurs bâtiments et installations, ainsi que d’exploiter ces systèmes par délégation d’autres personnes morales.
Or, comme je l’ai déjà dit, le texte de la commission nous semble offrir des garanties suffisantes pour éviter tout abus dans ce domaine : limitation de l’autorisation de filmer la voie publique aux abords des bâtiments, procédure d’agrément préfectoral de la convention de délégation d’exploitation du système, conformité de cette convention à une convention type fixée par décret, enfin, agrément individuel des agents et salariés chargés de l’exploitation du système.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement.
La commission est défavorable à l’amendement n° 223, ainsi qu’à l’amendement n° 321 rectifié – de coordination avec l’amendement n° 318 rectifié – et à l’amendement n° 322 rectifié.
Les auteurs de l’amendement n° 139 souhaitent que la convention type de délégation créée par voie réglementaire soit soumise à l’avis de la CNIL, et non de la CNV.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’expliquer, le dispositif retenu par la commission me semble suffisamment efficace et protecteur des libertés.
La répartition des compétences entre la CNV et la CNIL est claire, et il ne serait pas opportun de la remettre à nouveau en cause. Le texte tel qu’il a été arrêté par la commission me paraît équilibré.
L’avis est défavorable.
Les auteurs de l’amendement n° 224 souhaitent que la convention type de délégation créée par voie réglementaire soit soumise à l’avis non seulement de la CNV, mais aussi de la CNIL.
Comme pour l’amendement précédent, l’avis est défavorable. La CNIL interviendra en aval dans le contrôle de la vidéoprotection, la CNV intervenant en amont, au stade de l’élaboration des règles, notamment des règles techniques, avec un rapport qui sera soumis au Gouvernement.
Les auteurs de l’amendement n 140 souhaitent que l’arrêté ministériel relatif aux normes techniques auxquelles doivent se conformer les systèmes de vidéoprotection soit pris après avis de la CNIL, et non de la CNV. Cet avis entre pourtant parfaitement dans les missions de la CNV, telles qu’elles sont définies par l’article 18 au titre de l’équilibre que nous avons trouvé.
L’avis est défavorable.
Les auteurs de l’amendement n° 225 souhaitent que l’arrêté ministériel relatif aux normes techniques auxquelles doivent se conformer les systèmes de vidéoprotection soit pris après avis non seulement de la CNV, mais aussi de la CNIL.
Même commentaire que pour le précédent, et même avis défavorable !
L’amendement n° 141 a pour objet de compléter la procédure de fermeture des établissements ouverts au public dans lesquels sont maintenus des systèmes de vidéoprotection sans autorisation, en rendant possible une reconduction de cette fermeture jusqu’à ce que le manquement ait cessé. Cette modification accroîtra, en effet, l’efficacité du dispositif proposé.
La commission des lois a donc, mes chers collègues, émis un avis favorable.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Sourires
L’amendement n° 401 a pour objet de modifier le texte de l’Assemblée nationale pour allonger d’une année supplémentaire la prorogation de la validité des autorisations de vidéosurveillance.
Ces prorogations visent à éviter un engorgement des services préfectoraux concernés en 2011, lorsque les autorisations accordées avant la loi du 23 janvier 2006, dont la date de départ a été fixée à la date de promulgation de cette loi, arriveront à expiration.
L’avis de la commission est favorable.
L’amendement n° 142 tend à supprimer la possibilité de mettre en œuvre un dispositif de vidéoprotection temporaire en cas de manifestation ou de rassemblement de grande ampleur présentant des risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes ou des biens.
Nous estimons que ces dispositifs temporaires sont utiles et qu’en outre ils portent moins atteinte à la vie privée que les systèmes permanents, qui seront probablement souvent installés si cette possibilité n’est pas ouverte.
L’avis est défavorable.
L’amendement n° 226 tend à replacer la possibilité d’installer un système de vidéosurveillance en cas de tenue imminente d’une manifestation ou d’un rassemblement de grande ampleur dans le cadre des autorisations normales, avec accord de la commission départementale et non, comme le prévoit le texte de la commission, dans le cadre de la procédure en urgence.
Cette modification apparaît peu pertinente dans la mesure où il s’agit précisément de faire face rapidement à des événements qui ne sont pas nécessairement prévisibles.
L’avis est défavorable.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 44, dont la portée est identique à celle de l’amendement n° 142, auquel elle est défavorable.
Les auteurs de l’amendement n° 227 souhaitent que le décret d’application de l’article 10 de la loi du 21 janvier 1995 relatif au régime de la vidéosurveillance soit pris après avis, non seulement de la CNV, comme le prévoit le présent texte, mais aussi après avis de la CNIL.
Cela ne correspond pas pour le moment à la mission retenue pour la CNIL, qui intervient plutôt a posteriori pour le contrôle des systèmes.
L’avis est défavorable.
Le Gouvernement se retrouvant tout à fait dans les avis émis par la commission, je me bornerai à compléter le propos de M. le rapporteur sur quelques points.
Auparavant, je veux, bien qu’il ait retiré son amendement n° 92 rectifié, m’adresser à M. Nègre. Le Gouvernement comprend parfaitement l’intention qui était la sienne en déposant cet amendement sur les actes d’incivilité auxquels certains maires sont quotidiennement confrontés et qu’il leur appartient aussi de traiter.
Je sais, monsieur Nègre, que vous faites partie des maires qui se sont particulièrement impliqués dans la mise en œuvre de la loi du 5 mars 2007. §C’est une des raisons pour lesquelles j’ai l’intention, dans le cadre de la mission sur la prévention de la délinquance des mineurs qui m’a été confiée, de vous auditionner ; je tenais à vous le dire aujourd'hui.
J’entendrai d’ailleurs d’autres maires, de toutes les sensibilités politiques, à cette occasion.
Les amendements présentés par Mmes Borvo Cohen-Seat, Boumediene-Thiery et Klès sur la délégation de compétence en matière de visionnage des images de la voie publique à des personnes privées, qui se recoupent largement, soulèvent une vraie question, à laquelle il convient d’apporter une vraie réponse.
À cet égard, le projet de loi précise clairement que ne sont déléguées ni la tâche de maintien de l’ordre ni la mission de police judiciaire.
La personne privée éventuellement choisie comme délégataire pourra seulement visionner en temps réel les images de la voie publique : il n’est nullement question de lui permettre de visionner les enregistrements réalisés non plus que de la faire entrer, aussi peu que ce soit, dans une mission de police.
La personne privée qui visionne les terminaux des caméras – au même titre d’ailleurs que l’agent public, que l’agent municipal – est donc exactement dans la même position que l’homme de la rue qui, à l’occasion, peut être témoin d’une infraction.
Dans un tel cas, cette personne privée n’aura d’autres ressources que celles dont dispose tout un chacun : elle alertera les forces de police, qui sont seules habilitées à intervenir.
De surcroît, ce travail de visionnage est très encadré.
À mon sens, il n’y a donc pas là de danger en termes de libertés publiques.
Les amendements identiques n° 137 et 318 rectifié ont pour objet de supprimer la faculté pour une personne privée d’installer un système de vidéoprotection permettant de filmer les abords des installations et bâtiments visés à l’alinéa 12 de l’article 17, au motif qu’il s’agirait, selon Mme Assassi, d’une « privatisation rampante » de l’espace public.
Naturellement, cette faculté est encadrée puisqu’elle ne concerne que les lieux « susceptibles d’être exposés à des actes de terrorisme ou particulièrement exposés à des risques d’agression ou de vol ».
Dans la pratique actuelle, cela inclut la protection de certains commerces et celle, par les établissements bancaires, des bornes de retrait d’espèces, mais aussi la protection de diverses institutions et lieux cultuels qui bénéficient aujourd'hui de cette possibilité dont je ne crois pas qu’il serait bon de les priver demain, car il s’agit tout de même d’un élément important en termes de dissuasion.
Les amendements n° 221 et 220, présentés respectivement par M. Anziani et par M. Gautier, visent quant à eux à limiter ce type de protection « aux abords immédiats » des bâtiments et installations.
Étant, comme vous, monsieur Anziani, juriste, je me suis demandé, avant même de me prononcer sur le fond de l’amendement, si l’expression « aux abords immédiats » était plus précise que l’expression « aux abords » et donc moins porteuse de difficultés d’interprétation et de contentieux. Très franchement, je ne le pense pas.
Convenons par ailleurs que la pratique actuelle montre que cette approche est vraiment trop réductrice s’agissant d’une possibilité de surveillance et de protection optimale, de surcroît respectueuse d’un certain nombre de règles.
Si l’autorisation d’installer des caméras est limitée aux quelques mètres qui entourent le bâtiment – si tant est que telle est la définition des « abords immédiats », et combien de mètres, d’ailleurs ? –, l’exploitant restera largement « aveugle », y compris s’agissant d’emplacements très proches, alors que l’installation de caméras aux abords des bâtiments et installations peut permettre de filmer, par exemple, les voies d’accès, et non pas seulement la cour ou le perron, ce qui améliore l’anticipation et la protection.
Je ne vois donc pas où est la difficulté, mais je vois en revanche très bien quelles difficultés soulèveraient la définition que vous proposez !
Vous souhaitez également que la commune donne son accord avant qu’une personne privée puisse installer un système de vidéoprotection pour protéger les abords de ses installations.
Je vous rappelle que la mise en place d’un système de vidéoprotection est subordonnée à une autorisation du préfet, après avis d’une commission présidée par un magistrat. L’article 17 prévoit en outre l’information du maire de la commune.
Faut-il encore que les maires donnent leur accord ? Je ne pense pas que ceux-ci demandent véritablement à le faire.
J’estime qu’il n’y a pas là de difficulté particulière et, cette fois encore, je me range à l’avis de la commission.
L’amendement n° 320 rectifié, dans lequel vous proposez, madame Escoffier, que le visionnage de la voie publique par des personnes privées soit subordonné à l’accord de l’autorité dont relève ladite voie publique, appelle la même réponse : le système prévu est déjà suffisamment protecteur.
De même, s’agissant de votre amendement n° 319 rectifié – amendement de repli qui prévoit l’autorisation de la commission départementale de vidéosurveillance pour le visionnage d’images de la voie publique par une personne privée –, je rappelle que le visionnage d’une partie de la voie publique est soumis à l’autorisation du préfet et, dans le cas d’une demande d’installation d’un système de vidéoprotection par une personne privée, comme dans tout autre cas, la commission départementale sera amenée à donner son avis préalablement à la décision préfectorale.
C’est la règle posée par la loi du 21 janvier 1995 et que le Conseil constitutionnel a reconnue comme protectrice de la vie privée.
À propos de l’amendement n° 222, présenté par M. Anziani, je dirai simplement que l’installation de systèmes de vidéoprotection dans des locaux d’habitation relève non pas du présent projet de loi, mais des règles de gestion des copropriétés, plus précisément de l’article L. 127-1 du code de la construction et de l’habitation ainsi que de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
Cet amendement n’a donc pas véritablement de sens dans le présent texte.
Les amendements n° 139, 224, 140 et 225 visent à remplacer l’avis de la Commission nationale de la vidéoprotection par un avis conforme de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ; pour ma part, j’estime que la commission des lois a trouvé un équilibre qui constitue un bon compromis, auquel je me range.
Sur l’amendement n° 141 de Mme Assassi, avant de me rapprocher de l’avis favorable de la commission en m’en remettant à la sagesse du Sénat, je veux tout de même préciser, pour que cela ait été dit, les raisons de la réticence initialement manifestée par le Gouvernement.
La liberté du commerce et de l’industrie est un principe constitutionnellement garanti. Dès lors, la loi peut-elle apporter à cette liberté plus que des restrictions limitées en soumettant son exercice à des autorisations ou à des interdictions ponctuelles ?
Cet amendement, en permettant de reconduire, sans limite de durée, une mesure de fermeture administrative risque de faire débat, au stade notamment du contrôle du Conseil constitutionnel, du fait du caractère absolu de la mesure.
Je reconnais cependant qu’il s’agit d’une réticence de forme, d’autant qu’il y a toujours la possibilité pour le préfet de faire procéder à un nouveau contrôle ; j’ai également entendu les arguments « pratico-pratiques », auxquels je me range.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
Sur les amendements n° 142, 226 et 44, je n’entrerai pas dans le débat sur la dimension idéologique des arguments.
L’idée, madame Boumediene-Thiery, n’est vraiment pas de ficher, de « fliquer » - ou que sais-je encore ! – nos concitoyens en cas de manifestations.
À vous comme à ceux de vos collègues qui sont plus modérés que vous - dans ce débat et sur ce point, mais je respecte bien sûr votre position –, qui souhaitent que l’on opère au cas par cas, je n’ai pourtant pas besoin de rappeler ce qui s’est passé en maintes circonstances.
Malgré le bon travail d’anticipation des risques qui est réalisé, peut-on systématiquement savoir à l’avance si une manifestation sera ou non perturbée par des casseurs, dont l’intervention a d’ailleurs pour effet de dénaturer une expression inscrite dans le champ démocratique ? La réponse est non, et il y a de nombreux cas où les choses se sont mal passées sans que cela ait été prévisible, tout au moins en termes de proportion.
L’objet du projet de loi, je crois que vous l’avez tous compris, n’est pas de restreindre les libertés individuelles, et notamment celle de manifester ; bien au contraire, il vise à permettre le déroulement des manifestations dans de bonnes conditions.
Il ne s’agit pas davantage d’épier les manifestants ou les spectateurs d’un événement. Personne ne nous ferait un tel procès d’intention ! D’ailleurs, le système de vidéo est temporaire puisqu’il est appelé à disparaître à la fin de l’événement.
Notre démarche n’a d’autre but que de faire en sorte que les manifestations se déroulent dans de bonnes conditions pour tout le monde, à commencer par les manifestants eux-mêmes afin qu’ils puissent faire entendre leur message démocratique. Il y a eu suffisamment d’exemples de manifestations qui ne se sont pas bien passées, au grand dam des manifestants et de leurs propres services d’ordre, pour que les uns et les autres comprennent la position du Gouvernement.
Je reconnais avoir « balayé » un peu rapidement ces amendements, dont beaucoup se recoupent, et je n’ai peut-être pas répondu à toutes les questions, mais telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement partage les avis émis par la commission.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote sur l'amendement n° 217 rectifié.
Il s’agira non pas d’une explication de vote, monsieur le président, mais d’une interrogation, très forte, quant à la manière dont notre discussion a été conduite sur l’article 17.
Cet article 17, qui modifie l’article 10 de la précédente LOPSI, comporte en effet, comme le fait fort bien apparaître le document dans lequel nous est présenté le texte de la commission, trente-sept alinéas fort différents.
Or viennent d’être examinés en discussion commune des amendements portant sur ces différents alinéas et n’ayant donc rien à voir les uns avec les autres. Que les amendements contradictoires ou les amendements de repli soient examinés en discussion commune, fort bien, mais là…
On aurait dû examiner les amendements sur le terme employé, vidéosurveillance ou vidéoprotection, puis ensuite voter…
… après s’être expliqué, car personne n’a rien compris aux explications du rapporteur et du ministre !
Auraient dû venir ensuite les amendements contre la privatisation de la vidéosurveillance, qui forment bien un autre bloc, puis les amendements sur les procédures – autorisation préfectorale ou pas, information des maires ou pas –, puis les amendements sur le contrôle – intervention ou non de la CNIL ou réintroduction ou non des commissions –, puis les amendements sur le décret d’application, qui n’ont vraiment rien à voir avec le reste !
À cela s’est ajouté un amendement du Gouvernement sur la prolongation des délais d’autorisation.
Tout cela introduit dans nos débats une confusion générale. Est-ce cela que souhaite la présidence ?... Telle est la question que je me pose.
M. le président. Monsieur Michel, j’ai pris bonne note de votre remarque, qui me touche, vous le comprenez.
Sourires
Nous pouvons au moins nous rejoindre sur la procédure de mise aux voix des amendements, que je vais appeler l’un après l’autre, ce qui vous permettra de vous exprimer de manière claire.
Je mets aux voix l'amendement n° 217 rectifié.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l'article.
Monsieur le président, je voudrais profiter de cette explication de vote pour illustrer d’un exemple les dérives possibles en matière de surveillance.
Celles et ceux qui ont pris connaissance de la presse ce matin ont peut-être lu dans un quotidien un article faisant référence à un projet qui sera mis en œuvre l’an prochain dans une crèche parisienne. Il s’agit de tester un système de surveillance électronique des enfants grâce à une puce intégrée à leur vêtement.
Cette idée est purement et simplement effrayante.
(Mme Catherine Troendle s’exclame.) Est-ce à dire que les puéricultrices ou puériculteurs seront bientôt remplacés par une puce électronique ?
Mme Catherine Troendle proteste.
Il s’agit d’enfants dans une crèche, et je ne vois pas dans quelle mesure il serait nécessaire d’utiliser une puce pour les surveiller, voire pour tout autre usage. §Il n’y a qu’à regarder autour de soi, chère collègue, pour se rendre compte que, avec la vidéosurveillance, nous sommes déjà dans les dérives.
Mme Éliane Assassi. Je m’interroge donc sur ce genre d’expérimentation, pratiquée sur nos enfants, dès la crèche. Et nous savons bien que toute expérimentation peut, à terme, devenir la règle.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Je préfère dire les choses aujourd’hui plutôt que de m’étonner demain, tout simplement, chers collègues.
Les puériculteurs et les puéricultrices remplacés par des puces électroniques ? Le système ressemble étrangement à Big Brother !
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Je tenais à signaler ce fait, extrêmement grave, à l’issue de ce débat sur la vidéosurveillance.
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, dans « vidéosurveillance », il y a « surveillance » !
Je tiens à dire à M. le secrétaire d’État que ses réponses ne m’ont pas convaincue, ...
… pour la raison bien simple qu’il a comparé la vidéosurveillance au voisin qui vous voit passer dans la rue. Or la différence fondamentale, mise en avant par ceux qui sont persuadés de l’utilité de la vidéosurveillance, ou vidéoprotection, est précisément qu’elle repose non pas sur l’humain, avec toutes ses imperfections et ses carences, mais sur un outil présent en permanence, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sans jours de congé, sans jours de maladie.
Comparer la vidéosurveillance au regard du voisin, c’est un peu comme si l’on venait nous dire aujourd’hui qu’Internet ne présente finalement pas plus de dangers que naguère le Minitel…
Je regrette vraiment qu’au nom d’un dogme, puisque dogme il y a, et de votre côté, pas du nôtre, on refuse de s’interroger sur les limites à apporter à l’outil « vidéosurveillance » et sur les mesures contraignantes à prendre afin d’éviter toutes les dérives et tous les dangers inhérents.
Pour Internet, nous prenons conscience trop tard des dangers tels que la pédopornographie. La même chose risque de se produire avec la vidéosurveillance, qui aurait pu être un bel outil, mais qui va devenir un dispositif dangereux.
Cet article 17 a suscité beaucoup d’interventions et de nombreux amendements. Il est aisé de comprendre qu’un certain nombre de nos collègues s’interrogent sur la vidéoprotection et sur l’importance de son rôle.
La vidéoprotection a d’abord vocation à être utilisée par la gendarmerie et la police, mais également, comme l’a rappelé M. le secrétaire d’État en présentant l’amendement n° 411 rectifié, par l’administration des douanes dans les aéroports, les ports et les départements frontaliers. J’y reviendrai avec mes collègues représentant les départements frontaliers.
Il n’y a certes plus de frontières, mais l’administration des douanes joue, aux côtés de la police et de la gendarmerie, un rôle important, en particulier au sein des GIR, les groupes d’intervention régionaux.
Le visionnage d’images filmées dans les départements frontaliers est une facette réellement importante de la vidéoprotection. L’administration des douanes, qui dépend du ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, utilise des moyens modernes et des véhicules performants, notamment des motos, afin d’effectuer à tout moment des contrôles sur tous les axes routiers.
Il est par conséquent important d’associer l’administration des douanes à l’utilisation des techniques modernes de vidéoprotection.
Je tiens à rendre hommage à mes collègues de la commission des lois. S’agissant de cet article 17 et en particulier des questions de sécurité civile, notre collègue Mme Catherine Troendle a rappelé l’importance du rôle joué par les sapeurs-pompiers. Dans une société de plus en plus procédurière, cet outil de vidéoprotection doit être utilisé par les SDIS, les services départementaux d’incendie et de secours, à l’échelon de chaque département afin de faciliter la tâche très difficile des sapeurs-pompiers.
Finalement, l’article 17 présente des avancées significatives. C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe UMP, je le voterai.
Reconnaissant que tout outil peut avoir des effets pervers et des limites, je voterai cet article 17.
J’entends bien, madame Assassi, les questions que vous vous posez à propos de l’introduction de puces électroniques dans une crèche parisienne. La question ne s’adresse toutefois ni au Gouvernement ni à la majorité : elle s’adresse au maire de Paris ! En effet, qu’il s’agisse d’une crèche municipale…
… ou d’une crèche associative, qui nécessite obligatoirement un agrément de la Protection maternelle et infantile de Paris, dans l’un et l’autre cas, cela relève du maire de Paris.
Je doute par ailleurs qu’une directrice de crèche ait pu, sans avis ni contrôle, faire mettre en place ce système de puces dans une crèche de la Ville de Paris.
S’agissant des puéricultrices et des auxiliaires de puériculture de la Ville de Paris, leur gestion est essentiellement de la responsabilité du maire de Paris, qui, à chaque élection, a fait sa campagne sur le fait que ses prédécesseurs n’avaient pas mis en place suffisamment de dispositifs de garde des enfants parisiens. Paris a pourtant toujours été la capitale européenne la mieux dotée en crèches.
La question de la gestion des puéricultrices et des auxiliaires de puériculture doit donc être posée au maire de Paris, non pas dans cette enceinte !
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste. – Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.
Nous voterons bien entendu cet article 17. Néanmoins, une question se pose : vous parlez de dérives, chères collègues, mais où sont-elles ?
Vous avez assimilé la vidéoprotection aux technologies modernes et à Internet. Certes, des dérives existent sur Internet ; on les identifie et on réagit en conséquence. Mais où sont les dérives de la vidéo ?
Votre discours est idéologique, théorique. Pour ma part, je suis sur le terrain, …
M. Louis Nègre. … je suis maire, je vois bien que la population demande davantage de protection. C’est exactement ce que nous proposons : davantage de protection pour la population !
Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Les statistiques indiquent clairement qu’il existe une corrélation entre l’installation d’un système de vidéoprotection et la diminution de la délinquance. Or pas une seule fois je n’ai entendu le mot « victime » dans vos interventions.
M. Louis Nègre. Pourtant, toute diminution du nombre des faits de délinquance se traduit par une diminution du nombre de victimes. Grâce au recours à la vidéoprotection, nous faisons notre travail et protégeons la population.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et sur certaines travées de l ’ Union centriste.
Ce débat suscite évidemment mon intervention.
Mme Marie-Thérèse Hermange, indépendamment de la question de la responsabilité en matière de crèches, personne ne peut contester l’accroissement considérable du nombre de places de crèche à Paris depuis 2001. Le progrès par rapport à ce qui avait été fait lors des précédentes mandatures est incontestable.
Au lieu de vous interroger sur le bien-fondé de l’introduction, même à titre expérimental, de puces électroniques dans les crèches, quel que soit le maire de la ville concernée, vous vous arrêtez à la question de la responsabilité du maire. Cela manque de sérieux, et cela me navre d’autant plus que je sais combien vous êtes par ailleurs sensible à certaines problématiques.
Nous parlons à cet instant de la réalité.
Sincèrement, est-il acceptable que les enfants soient dotés de puces électroniques, que ce soit dans les crèches ou ailleurs ? La question se pose également pour les autres citoyens, mais interroge d’autant plus lorsqu’il s’agit d’enfants.
Exclamations ironiques sur les travées de l ’ UMP.
Cela n’est pas sans rappeler de tristes débats à propos d’enfants délinquants dès l’âge de trois ans.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Chers collègues, vous qui répétez à l’envi qu’il faut des preuves, rien ne prouve pour l’instant l’efficacité réelle de la vidéosurveillance sur la délinquance.
Cagnes n’est pas Paris ! Il faut comparer ce qui est comparable, et nous vous avons déjà dit que les comparaisons entre des villes apparemment ressemblantes n’étaient pas probantes... Vous ne pouvez pas dire le contraire, car c’est la réalité !
Ce qui est probant, en revanche, c’est le juteux marché de la vidéosurveillance pour les sociétés privées !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
Nous contestons totalement l’introduction en tous lieux des sociétés de sécurité privées, qui en attendent évidemment de nombreux bénéfices.
Un journal satirique que vous lisez tous avec une grande attention, contrairement à moi, et qui vous amuse beaucoup, nous explique ainsi que les responsables de l’entreprise Tag Technologies sont en pleine extase, car ils misent sur une croissance à trois chiffres ! Et plusieurs grandes sociétés, notamment GDF-Suez et Veolia, ont raflé la mise : 240 millions d’euros pour équiper Paris de 200 caméras !
Les parlementaires que nous sommes devraient réfléchir à ce transfert de la sécurité au privé et à tous les risques que cela induit, mais aussi au coût relatif des moyens humains et de la vidéosurveillance. C’est un sujet très important pour ceux d’entre nous qui sont maires et pour tous les responsables en général.
Voilà les véritables questions. Mais, loin de les poser, vous avez voulu mener un débat purement idéologique
Vives exclamations sur les travées de l ’ UMP
, en opposant ceux qui veulent la sécurité – qui ne peut être assurée, selon vous, que par la technologie et la vidéosurveillance – et les autres, censés ne pas s’en préoccuper !
M. Louis Nègre proteste.
Mme Alima Boumediene-Thiery. La gauche est sans cesse taxée d’idéologie. Il est certain que nos conceptions diffèrent de celles de la droite, et que nous ne partageons pas les mêmes valeurs !
On s’en félicite sur les travées de l’UMP.
La privatisation de la sécurité relève d’une certaine idéologie, qui n’est pas la nôtre. Alimenter des fantasmes et entretenir la xénophobie, comme vous le faites, cela fait aussi partie d’une idéologie, et nous ne la partageons pas.
Je déplore, par ailleurs, la criminalisation des mouvements sociaux que nous observons aujourd’hui. Cela aussi, c’est votre idéologie !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
L’article 17 est adopté.
L’amendement n° 91 rectifié bis, présenté par M. Le Menn, Mme Klès et M. C. Gautier, est ainsi libellé :
Après l’article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Ce fonds est abondé annuellement par une contribution des assurés sur chaque contrat d’assurance aux biens et par les entreprises d’assurance, dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État. »
2° Après la première phrase du troisième alinéa, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Ce fonds est exclusivement destiné à financer les dispositifs humains de médiation sociale de terrain, les dispositifs de soutien et d’accompagnement à la parentalité, les dispositifs d’accueil et d’aide aux victimes, les dispositifs relatifs à la réussite et à l’intégration. »
II. - Après l’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. 5-1. - Il est créé un fonds ministériel pour le développement de la vidéosurveillance. Ce fonds est financé par un montant prélevé sur le produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation, prévu à l'article L. 2334-24 du code général des collectivités territoriales, déterminé en loi de finances ».
III. - L’article L. 422-1 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le fonds interministériel de prévention de la délinquance créé par l’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance est abondé annuellement par une contribution des assurés sur chaque contrat d’assurance aux biens et par les entreprises d’assurance dans des conditions définies par un décret en Conseil d’État ».
La parole est à Mme Virginie Klès.
Nous regrettons que les crédits du FIPD, le Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance, soient presque exclusivement consacrés à la vidéosurveillance. Et ne me rétorquez pas que ces caméras ont leur utilité, car ce n’est pas le débat !
Il a été dit et répété sur toutes les travées, y compris celles de droite, que la vidéosurveillance n’était pas suffisante pour assurer la sécurité et ne pouvait être le seul outil à notre disposition.
Je rappelle, en outre, que le FIPD a pour seul but la prévention de la délinquance, alors que la vidéosurveillance vise plusieurs autres objectifs, comme la prévention des actes de terrorisme, la surveillance de bâtiments, y compris privés, etc.
Cet amendement vise donc à bien séparer les choses.
Je tiens à vous rassurer : notre objectif est non pas de supprimer l’ensemble des fonds affectés à la vidéosurveillance, mais de créer un fonds interministériel spécifiquement affecté aux équipements de vidéosurveillance, qui serait abondé par des prélèvements sur le produit des amendes collecté au titre des infractions routières.
Parallèlement, le financement du FIPD serait assuré par une contribution annuelle des assurés sur chaque contrat d’assurance. Ces crédits seraient exclusivement affectés à des dispositifs humains de prévention de la délinquance.
Les compagnies d’assurance devraient y trouver leur compte ; en effet, lorsque la délinquance diminue, le nombre des dégradations baisse et ces sociétés sont moins sollicitées.
Les dispositifs que nous proposons de financer au moyen de ces crédits ont déjà fait leurs preuves.
Vous aimez raisonner à partir d’exemples. Je vous citerai, à mon tour, le cas d’une ville proche du Mans, Coulaines, qui n’est pas riche, n’a ni vidéosurveillance ni police municipale, et compte plus de 40 % de logements sociaux : son taux de délinquance est pourtant très inférieur à celui des villes environnantes et à la moyenne départementale.
Dans cette ville, l’ensemble des moyens de prévention de la délinquance sont consacrés à des dispositifs de médiation familiale, de médiation de rue, d’aide à la réussite scolaire, d’action culturelle et sportive, de soutien à la parentalité, notamment. C’est bien la preuve que cela marche aussi, et si cela marche aussi, on peut sans doute aussi le financer !
Nous devons bien distinguer, d’un côté, la vidéosurveillance, qui a ses objectifs propres, et de l’autre, la prévention de la délinquance, avec ses missions et ses moyens, qui sont essentiellement humains.
Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.
Le présent amendement tend à modifier les dispositions législatives relatives au FIPD. Ce fonds serait désormais alimenté par une contribution des assurés sur chaque contrat d’assurance aux biens et par les entreprises d’assurance.
Par ailleurs, il serait exclusivement destiné à financer les dispositifs humains de médiation sociale de terrain, les dispositifs de soutien et d’accompagnement à la parentalité, les dispositifs d’accueil et d’aide aux victimes, les dispositifs relatifs à la réussite et à l’intégration.
Un second fonds serait parallèlement créé pour soutenir l’équipement en vidéoprotection des collectivités, et serait financé par un montant prélevé sur le produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation. Cela implique, en langage clair, une diminution des crédits destinés à financer des opérations de sécurité dans les villes, ce qui ne manquera pas de poser d’énormes problèmes.
Mme Virginie Klès s’exclame.
Par définition, chère collègue, si l’on utilise ces fonds pour mener d’autres actions, ils ne pourront financer des opérations de sécurité...
Comme vous le savez, je ne suis pas hostile à l’idée de mettre à contribution les assureurs en matière de sécurité. Nous l’avons d’ailleurs fait en créant, avec l’accord des compagnies d’assurance, un fonds dédié aux recherches ADN. Toutefois, je crois qu’il est préférable, avant de mettre en œuvre une telle mesure, de prévoir une réflexion plus approfondie et une concertation avec les intéressés.
Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. Je considère en effet que la vidéoprotection joue un rôle essentiel dans la prévention de la délinquance.
Cet amendement vise deux objectifs complémentaires : sanctuariser le financement de la vidéoprotection, d’une part, et créer une ressource nouvelle pour les autres actions de prévention de la délinquance et d’aide aux victimes, d’autre part.
Le FIPD fait appel à un mécanisme complexe que l’on ne saurait réformer au détour d’un texte. Une telle modification nécessite que l’on prenne du temps pour l’examiner de manière plus approfondie.
Je vous rappelle que le FIPD dispose d’une enveloppe budgétaire de près de 50 millions d’euros, dont 30 millions sont aujourd’hui destinés au financement de la vidéoprotection. Les 19 millions restants pourront financer d’autres actions de prévention de la délinquance.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Vous nous dites, madame le ministre, que cette modification nécessite une grande réflexion. Vous avez parfaitement raison, mais cette question ne date pas d’hier !
Les collègues membres de la commission des finances se rappelleront que, l’an dernier, la commission des finances avait proposé la suppression des crédits du FIPD. Il avait alors fallu une réunion extraordinaire de la commission – certains n’avaient visiblement pas mesuré les conséquences de cette suppression - puis un débat en séance, pour rétablir la cabane droite sur le chien, si vous me permettez l’image.
L’objectif du FIPD est le financement d’un certain nombre d’actions dans le cadre de la prévention de la délinquance.
Le Gouvernement s’est donné comme axe prioritaire le développement de la vidéosurveillance. Il en a d’autant plus le droit, je le concède, que chacun s’accorde à reconnaître l’efficacité de cet outil au moins sur un point : l’augmentation du taux d’élucidation. Dans ces conditions, pourquoi ne pas y recourir ?
Mais il s’agit justement d’une fonction de l’État et non d’une fonction communale. En conséquence, en utilisant les crédits du FIPD pour financer les investissements relatifs à l’installation de caméras, nous amputons d’autant les crédits destinés à l’ensemble des actions de prévention de la délinquance, qui fondent comme neige au soleil. Voilà la situation !
Il est dans l’intérêt du Gouvernement de dissocier le FIPD du financement de la politique de généralisation de la vidéo, afin que la commission des finances ne soit pas confrontée tous les ans au même problème, qui ne manquera pas de se poser dans les prochaines semaines si rien n’est fait.
Je trouve cet amendement très intéressant, car la question de la sécurité préoccupe tous nos concitoyens, même ceux qui habitent dans de petites communes, comme c’est mon cas.
Les Français savent bien que les problèmes de sécurité ne peuvent être résolus seulement par la police, la gendarmerie, l’allongement de la liste des délits dans le code pénal, bref la répression, et qu’il faut aussi mener des actions de prévention.
Nous sommes confrontés aujourd’hui à l’arrivée à l’âge adulte, ou post-adolescent, de la génération des « enfants rois », qui n’ont plus de repères, et ce quel que soit leur milieu familial. C’est donc à la collectivité, d’une manière ou d’une autre, de prendre le relais des parents pour inculquer à ces jeunes certains principes de conduite et leur apprendre à vivre en société. Ce travail de prévention, mené par des associations et les services sociaux, entre autres, nécessite des moyens.
Comme l’a dit Charles Gautier, il serait souhaitable que la problématique des crédits attribués à la prévention de la délinquance échappe aux aléas du débat budgétaire.
Même si la prévention ne représente qu’une partie de notre débat, on ne saurait axer la réflexion concernant la sécurité uniquement, ou essentiellement, sur la répression et les sanctions. Si nous voulons régler durablement le problème, il nous faut aider les familles à éduquer leurs enfants et rétablir l’autorité des enseignants. En effet, quand les parents n’ont pas fait le travail de base, il faut bien que l’école le fasse à leur place...
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Ma chère collègue, lorsque, par malheur, un enseignant confronté à un enfant particulièrement insupportable laisse partir une gifle, c’est l’enseignant qui est sanctionné ! D’une certaine manière, on donne ainsi raison au gamin et aux parents défaillants...
Oui, je crois beaucoup à l’école pour contribuer à la stabilisation de la situation en matière de sécurité.
Tout ce qui peut contribuer à la prévention est important, et c’est pourquoi je voterai cet amendement.
Je me rangerai à l’avis de M. le rapporteur et de Mme le ministre, qui se sont dits prêts à se pencher sur ce dossier.
Tout en étant partisan de la vidéoprotection, j’estime que nous devons marcher sur deux pieds : outre cet outil, nous devons disposer de moyens de prévention, et notamment de dispositifs humains de médiation sociale, de soutien à la parentalité ou d’aide à la réussite scolaire. §J’ai moi-même mis en place de tels dispositifs dans ma commune, et je peux donc très concrètement en parler : je reconnais qu’ils sont tout aussi indispensables pour le bon fonctionnement de notre société.
Sur la démarche intellectuelle qui sous-tend cet amendement, il y a donc bien matière à réflexion, car nous avons besoin, aussi, de ces dispositifs de prévention sur le terrain. Ainsi, parallèlement à la vidéoprotection, que j’ai mise en place dans ma commune, j’ai pu expérimenter et tester l’action des médiateurs de terrain, et j’ai constaté que ceux-ci obtenaient aussi des résultats.
La combinaison de ces deux dispositifs nous permet d’atteindre nos objectifs. Cela étant dit, je me range, je le répète, à l’avis de la commission et du Gouvernement, lequel vient de nous assurer que ce dossier serait étudié.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.
L'amendement n° 385, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l'article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance est supprimé.
La parole est à Mme la ministre.
Les travaux d’intérêt général sont une alternative à la prison, ainsi qu’un moyen de lutter contre la récidive.
L’article 98 de la loi pénitentiaire, voté à l’instigation du Sénat, a lié l’octroi d’une subvention du Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance, le FIPD, à l’organisation de travaux d’intérêt général.
Il n’est pas dans l’esprit du Gouvernement de remettre en cause ce principe, de contester l’utilité des travaux d’intérêt général ou de revenir sur l’octroi de subventions de l’État aux communes qui s’engagent fortement dans des actions de prévention de la délinquance.
Toutefois, en l’état, il ne nous semble pas possible de conditionner l’attribution de subventions du FIPD à la création de postes de travail d’intérêt général. En effet, les communes, en particulier celles de taille moyenne ou petite, ne sont pas toujours en mesure d’organiser la mise en place de tels postes. De plus, nous savons que, dans d’autres cas, cette disposition, ajoutée lors de l’élaboration de la loi pénitentiaire, peut avoir pour effet de retarder la réalisation d’opérations. Le Gouvernement propose donc de l’abroger.
Si l’amendement n° 385 est adopté, Mme le garde des sceaux adressera une circulaire aux préfets afin qu’ils intègrent parmi les critères de choix des dossiers à retenir pour l’attribution de subventions du Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance le degré d’implication des collectivités dans la constitution d’une offre de travaux d’intérêt général.
L’amendement n° 385 a pour objet de supprimer le lien, introduit par la loi pénitentiaire, entre l’éligibilité au Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance et la mise en place de postes de travail d’intérêt général. Son adoption remettrait en cause une disposition qui avait été insérée par le Sénat, sur la base d’une proposition de notre collègue Jean-René Lecerf, complétée par le biais d’un sous-amendement de Mme Catherine Troendle, visant à développer les postes de travail d’intérêt général, qui demeurent encore trop peu nombreux.
Madame le ministre, que le Gouvernement veuille recourir à une circulaire me gêne quelque peu. Nous préférons pour notre part que la disposition législative en question soit maintenue, afin d’éviter que des aides soient attribuées à des communes ne faisant aucun effort pour offrir des travaux d’intérêt général, ce qui ne serait pas normal.
Certes, vous nous assurez qu’une circulaire reprendrait la teneur de cette disposition, mais, pour diverses raisons, les circulaires ne sont pas toujours adaptées ou prises en considération de façon identique dans tous les départements.
Pour l’heure, je vous suggère de retirer l’amendement n° 385 ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Après l’article 11-7 de la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de sécurité, il est inséré un article 11-8 ainsi rédigé :
« Art. 11-8 . – Les activités de vidéoprotection exercées en vertu du III de l’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité par des opérateurs privés agissant pour le compte de l’autorité publique ou de la personne morale titulaire de l’autorisation sont soumises aux dispositions du présent titre Ier, à l’exception des articles 3 à 3-2 et 10. »
L'amendement n° 45 rectifié, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec la suppression de la faculté offerte aux opérateurs privés de recourir à la vidéosurveillance dans l’espace public.
Permettez-moi, mes chers collègues, de vous lire un extrait de l’étude d’impact qui est éclairant quant à l’objectif visé par le Gouvernement : « L’observation de la voie publique, bien que “ segmentée ” par des personnes publiques ou privées différentes, est couverte par une véritable continuité territoriale et ce à moindre coût, puisque la commune pourra mener son projet de sécurisation de l’espace public en tenant compte des implantations privées. » Tout y est : le quadrillage de la voie public de manière continue et l’économie substantielle que l’État pourra en tirer.
En d’autres termes, ce sont demain de vastes centres de visionnage d’images de la voie publique qui se trouveront entre les mains d’un seul et même opérateur privé, chargé de surveiller des espaces discontinus, voire répartis sur plusieurs communes différentes.
La majorité se défend d’organiser la privatisation de la mission régalienne de sécurité dans le domaine public, mais l’article 17 bis A précise très clairement que la délégation de la vidéosurveillance aux opérateurs privés relève de la loi du 12 juillet 1883 réglementant les activités privées de sécurité.
Je le répète, nous refusons la privatisation des missions de service public, notamment lorsqu’elles touchent à la sécurité. L’État doit assumer son rôle, son monopole légitime dans ce domaine. N’oublions pas qu’il s’agit d’une mission régalienne.
Il s’agit d’un amendement de coordination avec la proposition, repoussée par le Sénat, de supprimer la possibilité de délégation à des personnes privées de la vidéosurveillance du domaine public. La commission émet un avis défavorable.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 bis A est adopté.
L'amendement n° 37 rectifié, présenté par Mme Troendle, est ainsi libellé :
Après l'article 17 bis A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 10-2 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, il est inséré un article 10-3 ainsi rédigé :
« Le ministre de l'intérieur peut autoriser les personnes publiques titulaires d'une autorisation de transmission et d'enregistrement d'images prises sur la voie publique dans les lieux définis aux 1° à 8° du II de l'article 10 à transmettre ces images à des tiers à des fins de recherche technologique sur les procédés de captation, de transmission, d'exploitation et d'archivage des images de vidéoprotection.
« Cette autorisation est précédée de l'avis de la commission nationale de la vidéoprotection.
« L'autorisation, dont la durée ne peut excéder une année et peut être renouvelée dans les mêmes formes, prescrit toutes les précautions utiles, en particulier quant à la qualité du destinataire de cette transmission ou des personnes visionnant les images et enregistrements et aux mesures à prendre pour assurer le respect des dispositions de la loi. Elle définit les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements, et la durée de conservation des images, qui ne peut excéder deux ans à compter de la transmission, sans préjudice des nécessités de leur conservation pour les besoins d'une procédure pénale.
« Si les images ou enregistrements transmis sont utilisés dans des traitements ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d'identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques, leur exploitation est soumise à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Les représentants de l'État dans les départements dans lesquels les caméras sont installées en sont informés.
« La commission nationale de la vidéoprotection peut à tout moment exercer, sauf en matière de défense nationale, un contrôle sur l'utilisation des images et enregistrements définie par le présent article. Elle émet, le cas échéant, des recommandations et propose au ministre la suspension ou la suppression des autorisations qu'il a délivrées, lorsqu'il en est fait un usage non conforme ou anormal.
« Les modalités d'application du présent article sont régies par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme Catherine Troendle.
L'augmentation du nombre de caméras sur la voie publique impose l’accroissement de celui des opérateurs chargés de traiter les informations issues des flux vidéo. Les coûts d'exploitation deviendront rapidement prohibitifs et incompatibles avec les budgets de fonctionnement de l'État. Il est donc indispensable de mettre en place des traitements automatiques, qui permettront de réduire le nombre d'opérateurs.
De nombreuses structures de recherche françaises développent dans ce domaine des technologies innovantes qui ne peuvent être testées à grande échelle, faute de données disponibles. La robustesse des traitements développés ne peut donc être garantie et les entreprises françaises se trouvent le plus souvent pénalisées sur le marché international par rapport à des concurrents étrangers qui ne sont pas confrontés à ces difficultés.
Les besoins des chercheurs sont essentiellement de deux ordres : ils doivent pouvoir expérimenter sur des flux vidéo en temps réel et archiver sur une longue période, c'est-à-dire au-delà de trente jours. Or, dans sa rédaction actuelle, le présent projet de loi ne permet pas aux chercheurs de consulter des enregistrements d'images, et encore moins de les utiliser.
L’amendement n° 37 rectifié vise donc à ce que le ministre de l’intérieur puisse permettre aux personnes publiques titulaires d’une autorisation de transmission et d’enregistrement d’images prises sur la voie publique à transmettre ces images à des tiers à des fins de recherche technologique sur des procédés de captation, de transmission, d’exploitation et d’archivage des images de vidéoprotection.
Évidemment, cette faculté de transmission des données sera rigoureusement encadrée par un décret pris en Conseil d’État. À cet égard, je souhaiterais que Mme le ministre puisse s’engager à ce que ce décret paraisse rapidement si mon amendement devait être adopté.
Cet amendement vise à ouvrir la possibilité, pour des organismes de recherche, de réaliser des expérimentations en matière de vidéosurveillance en exploitant des images prises sur la voie publique par les opérateurs qui y sont autorisés. Il s’agit notamment de permettre le développement de systèmes intelligents de vidéosurveillance, de reconnaissance faciale, de repérage des mouvements dans une foule, etc.
Toutefois, une telle disposition présente un risque de censure par le Conseil constitutionnel. En effet, dans sa décision du 18 janvier 1995 sur la loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité, le Conseil constitutionnel a estimé que seul l’objectif, de valeur constitutionnelle, de préservation de l’ordre public pouvait justifier l’atteinte à la vie privée, et donc à la liberté individuelle, que constitue la vidéosurveillance de la voie publique. Il est par conséquent probable que l’utilisation à des fins de recherche scientifique, même s’il s’agit indirectement et à terme d’offrir de meilleurs moyens de lutte contre l’insécurité, ne saurait justifier que des images prises sur la voie publique soient exploitées par des organismes publics ou privés.
En outre, malgré certaines garanties prévues par l’amendement, les modalités de traitement des images issues de la voie publique proposées seraient dérogatoires au régime commun. Ainsi, ces images pourraient être conservées pendant deux ans, au lieu d’un mois dans le régime ordinaire. Des images sur lesquelles des personnes sont reconnaissables pourraient donc être traitées pendant deux ans sans que ces personnes puissent s’y opposer.
Ainsi, bien que cet amendement soit sous-tendu par un légitime objectif de développement économique, partagé par la commission des lois, il paraît nécessaire de mener une réflexion plus approfondie sur ce sujet, afin d’élaborer un dispositif compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
À cette fin, je vous suggère, madame Troendle, d’élaborer une nouvelle rédaction de votre amendement, car il ne s’agit nullement de brider la recherche. Dans cette attente, je vous propose de retirer celui-ci.
Madame la sénatrice, je comprends votre préoccupation. Comme vient de l’indiquer M. le rapporteur, l’utilisation des images doit être bien encadrée. Il s’agit d’un sujet sensible, qui doit être abordé avec précaution dans le cadre d’une réflexion approfondie, car c’est la liberté individuelle qui est en cause. Il me paraîtrait donc prématuré de voter l’amendement n° 37 rectifié : je vous demande de bien vouloir le retirer.
La rédaction initiale de cet amendement paraissait incompatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui vient d’être évoquée. Cela m’a amenée à le récrire, en entourant de toutes les garanties nécessaires, me semble-t-il, le régime des autorisations de communication des images à des fins de recherche. La position de la commission et du Gouvernement m’étonne donc quelque peu. Je maintiens l’amendement.
Le problème soulevé par notre collègue est réel, mais la mise en œuvre du dispositif de l’amendement n° 37 rectifié, dans sa rédaction actuelle, requerra, dans presque tous les cas, l’autorisation préalable de la CNIL, compétente dès lors que la biométrie entre en jeu. Il conviendrait à mon sens de revoir l’architecture de cet amendement pour éviter cet écueil, comme s’y est efforcé M. le rapporteur. Élaborer une troisième rédaction me semble donc nécessaire pour écarter d’insurmontables conflits de compétence entre la Commission nationale de la vidéoprotection et la CNIL.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
L’article 10-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 précitée est ainsi modifié :
1° Au second alinéa du II, les mots : « quatrième et cinquième » sont remplacés par les mots : « deux derniers » et les mots : « troisième, quatrième et sixième » sont remplacés par les mots : « cinquième, sixième et huitième » ;
2° Le premier alinéa du III est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« La même faculté est ouverte au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police, informé de la tenue imminente d’une manifestation ou d’un rassemblement de grande ampleur présentant des risques particuliers d’atteinte à la sécurité des personnes et des biens. La prescription d’installation du dispositif cesse d’être valable dès que la manifestation ou le rassemblement a pris fin. » ;
3° Au début du second alinéa du III, sont ajoutés les mots : « Sauf dans les cas où les manifestations ou rassemblements de grande ampleur mentionnés à l’alinéa précédent ont déjà pris fin, ».
L'amendement n° 410, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement a déjà été défendu, monsieur le président, lors de la présentation de l’amendement relatif à la vidéosurveillance ad hoc.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 218 rectifié, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les I, II et III de l'article 10-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation pour la sécurité sont ainsi rédigés :
« I. - Aux fins de prévention d'actes de terrorisme, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent prescrire la mise en œuvre, dans un délai qu'ils fixent, de systèmes de vidéosurveillance, aux personnes suivantes :
« - les exploitants des établissements, installations ou ouvrages mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense ;
« - les gestionnaires d'infrastructures, les autorités et personnes exploitant des transports collectifs, relevant de l'activité de transport intérieur régie par la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs ;
« - les exploitants d'aéroports qui, n'étant pas visés aux deux alinéas précédents, sont ouverts au trafic international.
« II. - Préalablement à leur décision et sauf en matière de défense nationale, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police saisissent pour avis la commission nationale informatique et libertés.
« III. - Lorsque l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme le requièrent, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent prescrire, sans avis préalable de la commission nationale informatique et libertés, la mise en œuvre d'un système de vidéosurveillance. Le président de la commission nationale informatique et libertés est immédiatement informé de cette décision. Il réunit la formation restreinte de la commission dans les meilleurs délais afin qu'elle donne un avis sur la mise en œuvre de la procédure de décision provisoire.
« Avant l'expiration d'un délai maximal de quatre mois, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police recueillent l'avis de la commission nationale informatique et libertés sur la mise en œuvre du système de vidéosurveillance conformément à la procédure prévue au III de l'article 10 et se prononcent sur son maintien. »
La parole est à M. Charles Gautier.
L'amendement n° 143, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre.
Cet amendement doit être rapproché de l’amendement n° 142. Autoriser le recours à la vidéosurveillance pour les manifestations « de grande ampleur » nous semble une mesure liberticide. Nous proposons donc de la supprimer.
L'amendement n° 228, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision et la réunit sans délai afin qu'elle donne un avis sur la mise en œuvre de la procédure de décision provisoire.
La parole est à M. Charles Gautier.
Par souci de cohérence avec nos positions précédentes, nous souhaitons réaffirmer la nécessité de prévoir la saisine préalable de la commission départementale de vidéosurveillance pour la mise en œuvre de tels dispositifs.
Selon le droit en vigueur, le président de cette commission est déjà immédiatement informé de la décision. Il pourrait donc réunir sans délai l’instance afin qu’elle donne un avis sur la mise en œuvre de la procédure d’installation provisoire du système de vidéosurveillance.
Par cohérence, la commission émet un avis défavorable sur les amendements n° 218 rectifié et 143.
L’amendement n° 228 a pour objet de prévoir que, lorsque le préfet décide l’installation d’un système temporaire de vidéosurveillance en cas de manifestation ou de rassemblement de grande ampleur présentant des risques pour la sécurité publique, le président de la commission départementale de vidéosurveillance soit immédiatement informé de cette décision et réunisse l’instance sans délai afin qu’elle donne un avis sur la mise en œuvre de la procédure d’installation provisoire.
Que le président de ladite commission soit informé, oui ; qu’il la réunisse, non. En effet, le but de l’opération est précisément d’aller le plus vite possible.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
Avis défavorable sur les trois amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 bis est adopté.
L’article 10-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 précitée est complété par des VI et VII ainsi rédigés :
« VI. – Aux fins de prévention d’actes de terrorisme, de protection des abords des établissements, installations ou ouvrages mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense ou de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, peut demander à une commune la mise en œuvre de systèmes de vidéoprotection. Le conseil municipal doit en délibérer dans un délai de trois mois.
« Les conditions de financement du fonctionnement et de la maintenance du système de vidéoprotection font l’objet d’une convention conclue entre la commune de son lieu d’implantation et le représentant de l’État dans le département, et, à Paris, le préfet de police.
« Les II et IIIsont applicables.
« VII. – Le VI du présent article est applicable aux établissements publics de coopération intercommunale qui ont décidé de faire application de l’article L. 5211-60 du code général des collectivités territoriales. »
L'amendement n° 229, présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani.
Cet amendement a pour objet la suppression de l’article 17 ter. Ce dernier, qui a été adopté par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, visait dans une première version à instaurer un pouvoir de substitution du préfet aux communes pour permettre l'installation de dispositif de vidéosurveillance. Même si sa rédaction a été modifiée, nous nous opposons à une telle disposition.
La commission a supprimé la possibilité, pour le préfet, de contraindre une commune à s’équiper d’un système de vidéosurveillance. L’article 17 ter permet désormais au représentant de l’État de demander à une commune de prendre position sur ce sujet dans un délai de trois mois. Il ne semble pas opportun de supprimer cet article, et la commission est donc défavorable à l’amendement n° 229.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 ter est adopté.
Après l’article L. 126-1 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 126-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 126-1-1. – La transmission aux services chargés du maintien de l’ordre des images réalisées en vue de la protection des parties communes des immeubles collectifs à usage d’habitation lors de circonstances faisant redouter la commission imminente d’une atteinte grave aux biens ou aux personnes est autorisée sur décision d’une majorité qualifiée des copropriétaires et, dans les immeubles sociaux, du gestionnaire. Les images susceptibles d’être transmises ne doivent concerner ni l’entrée des habitations privées ni la voie publique.
« Cette transmission s’effectue en temps réel et est strictement limitée au temps nécessaire à l’intervention des services de police ou de gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale.
« Une convention préalablement conclue entre le gestionnaire de l’immeuble et le représentant de l’État dans le département précise les conditions et modalités de ce transfert. Cette convention prévoit l’information par affichage sur place de l’existence du système de prise d’images et de la possibilité de leur transmission aux forces de l’ordre.
« Lorsque la convention a pour objet de permettre la transmission des images aux services de police municipale, elle est en outre signée par le maire.
« Cette convention est transmise à la commission départementale de vidéoprotection mentionnée à l’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 qui apprécie la pertinence des garanties prévues et en demande, le cas échéant, le renforcement au représentant de l’État dans le département.
« Ne sont pas soumis aux dispositions du présent article les systèmes utilisés dans des traitements automatisés ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d’identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques, qui sont soumis à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 144 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 230 est présenté par MM. C. Gautier, Anziani, Peyronnet et Bel, Mmes Klès et Boumediene-Thiery, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 144.
L’article 5 de la loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public avait inséré dans le code de la construction et de l’habitation un article L.126-1-1 permettant la transmission aux services de police et de gendarmerie nationales, ainsi qu’aux polices municipales, d’images captées par des systèmes de vidéosurveillance dans des parties d’immeubles d’habitation non ouvertes au public.
Le Conseil constitutionnel avait supprimé cette disposition, considérant que le législateur avait méconnu sa compétence en omettant d’effectuer la conciliation qui lui incombe entre le respect de la vie privée et d’autres exigences constitutionnelles.
Or, en dépit de quelques aménagements de façade, le présent article, qui vise à transformer les propriétaires et les bailleurs en agents de renseignement, n’est qu’une reprise du dispositif que le Conseil constitutionnel avait censuré. C’est la raison pour laquelle nous demandons sa suppression.
Nous demandons nous aussi la suppression de l’article 17 quater, qui tend à permettre la transmission aux forces de police ou de gendarmerie des images prises dans les parties communes d’immeubles d’habitation. Même si cette mesure a été assortie d’un certain nombre de garanties, elle nous semble encore, en l’état, encourir la censure du Conseil constitutionnel.
Dans sa rédaction issue des travaux de notre commission, l’article 17 quater a pour seul objet de donner aux forces de police et de gendarmerie les moyens de préparer au mieux leur intervention lorsque des individus menacent de porter atteinte aux biens ou aux personnes dans les parties communes des immeubles non ouvertes au public.
Les garanties apportées devraient donner satisfaction aux auteurs des amendements. En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
La transmission des images en question est aujourd’hui encadrée. Nous considérons qu’elle peut contribuer à l’élucidation des affaires et constitue donc un outil indispensable. C’est pourquoi nous émettons un avis défavorable sur ces deux amendements.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 370 rectifié bis, présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Mézard, Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Remplacer le mot :
protection
par le mot :
surveillance
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
L’amendement n° 370 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 231, présenté par Mme Boumediene-Thiery, MM. Anziani, Peyronnet, Bel et C. Gautier, Mme Klès, MM. Sueur, Yung, Michel, Frimat et Repentin, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Mahéas, Collombat, Sutour, Tuheiava, Collomb, Courteau, Guillaume et Berthou, Mme M. André et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2, première phrase
Remplacer les mots :
d'une majorité qualifiée
par les mots :
de l'unanimité
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - L'article 26-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi rétabli :
« Art. 26 -1. - La transmission des images des systèmes de vidéosurveillance aux services de police ou de gendarmerie nationales ou, le cas échéant, aux agents de la police municipale dans les cas prévus à l'article L. 126-1-1 du code de la construction et de l'habitation fait l'objet d'une autorisation qui est accordée par un vote à l'unanimité des voix des propriétaires. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Cet amendement concerne les modalités de prise de la décision, par des copropriétaires, de transmettre aux autorités habilitées des images de vidéosurveillance réalisées dans les parties communes d’un immeuble à usage d’habitation.
Un tel dispositif avait été inséré dans la loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public. Le Sénat, dans la sagesse qui le caractérise, avait conditionné, par le biais de l’adoption d’un amendement présenté par les sénateurs verts, la transmission des images de vidéosurveillance à la police à un accord unanime des propriétaires réunis en assemblée générale.
L’Assemblée nationale avait ensuite supprimé cette exigence. Quelques semaines plus tard, le Conseil constitutionnel déclarait le dispositif anticonstitutionnel, estimant, dans une décision de 2010, qu’il ne présentait pas toutes garanties de protection de la vie privée des occupants des logements.
Je propose donc aujourd’hui au Sénat de rétablir cette condition d’une décision unanime des propriétaires, qui figure de manière implicite parmi les exigences posées par le Conseil constitutionnel dans sa décision.
La loi du 10 juillet 1965 qui organise les votes en assemblée générale des copropriétaires prévoit, à son article 24, que, dans le silence de la loi, le vote est acquis à la majorité simple. Cependant, il existe des domaines dans lesquels l’unanimité est requise. Par exemple, doit être prise à l’unanimité la décision de supprimer le service de concierge ou d’installer un interphone à la porte d’entrée d’un immeuble.
Ce dernier exemple est important : il concerne le recours aux nouvelles technologies, dont la vidéosurveillance fait partie. Il est tout à fait intolérable d’imposer à un propriétaire la mise en place d’un tel système sans que son consentement ait été recueilli.
Notre amendement prévoit donc que la transmission des images d’un système de vidéosurveillance devra être autorisée par l’assemblée générale des copropriétaires, à l’unanimité des voix.
Cet amendement reprend les termes d’un amendement similaire que Mme Boumediene-Thiery avait déposé dans le cadre de l’examen de la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public et qui n’avait finalement pas été retenu dans le texte définitivement adopté par le Parlement.
Lors de sa réunion du 18 novembre dernier, la commission des lois avait estimé que prévoir une autorisation à l’unanimité des copropriétaires n’était pas réaliste. Elle avait alors opté pour une autorisation donnée à la majorité qualifiée des copropriétaires – solution que cet article reprend.
Je propose d’en rester à cette formule et j’émets donc un avis défavorable sur l’amendement.
Des explications ont déjà été apportées sur le même sujet lors de l’examen d’amendements précédents. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 17 quater est adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.