Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 9 septembre 2010 à 21h30
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Articles additionnels après l'article 23

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Les deux à la fois, monsieur le ministre !

Nous sommes en désaccord sur la forme parce que vous avez utilisé une procédure qui est conforme à la Constitution et à nos règles, certes, mais qui n’honore pas vraiment le Parlement. Ce soir, après ce que nous avons vécu lors des deux réunions de la commission, nous n’avons guère de raisons d’être fiers de notre travail législatif…

Cette LOPPSI a été conçue il y a plus d’un an. Elle a été votée à l’Assemblée nationale, puis elle est venue ici. On y travaille depuis plusieurs mois. Or, au tout dernier moment, des éléments fondamentaux ont été apportés par le Gouvernement à travers des amendements – ce qui est tout à fait possible –, à la suite des déclarations qui ont eu lieu cet été et que l’on connaît.

Ces dispositions n’ont pas reçu l’assentiment de la commission des lois, c’est le moins qu’on puisse dire. Puis, nous avons vu arriver tout à l’heure trois sous-amendements, au demeurant tout à fait intéressants bien sûr, signés notamment par MM. Gérard Longuet et Jacques Gautier. Ces textes sont passés devant la commission des lois, qui les a rejetés.

Au-delà de ce vote, que l’on peut comprendre parce que l’heure était tardive et que certains de nos collègues n’ont pu assister à cette réunion, que s’est-il passé ? Trois sous-amendements très importants ont été présentés au dernier moment devant la commission des lois pour y être soumis à une discussion dont on peut presque dire qu’elle ne fut que de façade ! Ce n’est pas du travail législatif sérieux !

Je ne crois pas que ce soit bon pour l’image du Parlement. Il s'agit d’une méthode qui, je l’espère, ne sera pas rééditée.

Sur le fond, les auteurs de l’amendement et du sous-amendement qui nous sont présentés posent tout de même des questions importantes. En effet, on va permettre l’application de peines planchers à des primo-délinquants. Il s'agit là d’une décision grave, importante, nouvelle et qui revient sur certains de nos principes.

Quel est l’objectif visé ? Tout d’abord, les trois amendements et sous-amendements dont nous discutons révèlent, je le répète, une méfiance manifeste vis-à-vis des magistrats, même si on laisse à ces derniers la possibilité de prononcer une peine inférieure par une décision motivée. Ces textes sont tout à fait significatifs. Ils prouvent que notre système pose problème, me semble-t-il. Mais, si tel est le cas, il faut le dire clairement et ne pas se contenter d’adopter des mesures qui, au fond, ne changeront pas grand-chose.

En effet, si elles sont très importantes en ce qui concerne les principes, parce qu’elles permettront ensuite d’aller au-delà, ces dispositions n’auront guère de conséquences pratiques, parce que vous précisez dans le texte du sous-amendement : « Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, une peine inférieure à ces seuils ».

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