Tout d’abord, je veux exprimer la solidarité des membres de mon groupe à l’égard des centaines de milliers de salariés des secteurs privé et public qui, aujourd’hui, ont perdu une journée de travail et se mobilisent dans la rue pour revendiquer l’augmentation de leur pouvoir d’achat, de leur pension, des minima sociaux et pour soutenir les services publics, qui nous tiennent tous à cœur. Je pense aussi en cet instant aux nombreuses associations qui sont aujourd'hui descendues dans la rue.
Nos concitoyens, et ils nous le rappellent, ont des préoccupations qui se situent au cœur des problèmes évoqués lors du Grenelle de l’environnement et de ce qu’il est convenu d’appeler désormais le développement durable, c'est-à-dire le développement dans ses trois volets, économique et écologique, bien sûr, mais aussi social.
Nous poursuivrons donc nos débats en gardant à l’esprit cette grande manifestation.
L’article 10 vise le transport de marchandises, les autoroutes ferroviaires, le réseau fluvial et maritime. Il traduit pour partie les orientations politiques fondamentales du Gouvernement, puisqu’il tend à laisser au libre jeu du marché le fret ferroviaire de wagons isolés.
Comme vous nous l’avez rappelé ce matin, monsieur le secrétaire d'État, des « opérateurs ferroviaires de proximité » sont encouragés à exploiter ce trafic. Nous y sommes favorables, mais qui sont ces opérateurs ?
Nous croyons illusoire d’ouvrir à la concurrence la gestion d’infrastructures de transports ferroviaires sur des lignes à faible trafic, qui aujourd’hui représentent plus de la moitié du réseau géré par la SNCF et qui, bien souvent, sont déficitaires.
Il faut noter que la mise en place des opérateurs ferroviaires de proximité n’est envisageable que si un marché est porteur, donc potentiellement rentable. Sans remise à niveau du réseau ferré dégradé et sans un modèle économique nouveau pour la gestion des infrastructures, rien ou presque ne sera possible pour le fret ferroviaire de wagons isolés.
En effet, la qualité du réseau est trop détériorée, comme l’a confirmé le rapport de l’École polytechnique de Lausanne, pour envisager de développer l’offre ferroviaire. Selon le MEDEF lui-même, l’organisation de la rénovation, de l’entretien et de la maintenance des voies ferrées, avec les coûts actuels, dissuade les pouvoirs publics d’investir et anéantit toute initiative privée.
Qui peut donc croire que des opérateurs privés viendront se positionner spontanément sur le secteur du fret de proximité, peu rentable à court terme et opérant sur des voies abandonnées par l’État ?
En réalité, l’État organise ici son désengagement en cherchant à faire financer les infrastructures de transport par les régions.
Quant aux futures « autoroutes ferroviaires », elles seront certainement juteuses pour certains opérateurs privés, mais elles priveront l’essentiel du territoire d’une véritable relance du fret ferroviaire, par carence d’opérateurs de proximité. Il s'agit, une fois encore, de privatiser les profits et de socialiser les pertes !
Or, pour assurer un maillage territorial efficace et reporter la part modale du routier vers le ferroviaire, il convient de reconnaître à la SNCF des droits exclusifs sur ces lignes, afin que cette société, en contrepartie, puisse assurer des missions sociales.
L’idée est de créer, pour ces lignes déficitaires, d'ailleurs souvent suspendues ou en passe de l’être, des services d’intérêt général.
C’est le sens que nous voulons donner à une politique nationale des transports qui serait fondée sur la solidarité et sur la péréquation et qui ferait croître la part modale – non la part de marché ! – de 14 % à 25 %. Telle est la justification de nos amendements.
Le transport de marchandises participe de l’intérêt général et revêt un caractère prioritaire dans le cadre du Grenelle de l’environnement. L’État ne doit pas se défausser sur les collectivités territoriales, en particulier les régions. La SNCF doit être présente sur les lignes de proximité. L’éco-redevance doit servir à financer ces infrastructures qui se substitueront à la route.