Intervention de Ambroise Dupont

Réunion du 23 février 2010 à 14h30
Jeux d'argent et de hasard en ligne — Discussion d'un projet de loi

Photo de Ambroise DupontAmbroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous abordons l’examen suscite inquiétude et incertitude chez les parlementaires, mais également chez nombre de nos concitoyens.

Je ne reviendrai pas ici sur l’ensemble des dispositions de ce projet de loi, les excellents rapporteurs l’ayant déjà fait.

Fallait-il légiférer, monsieur le ministre ? Il me semble que oui. Dès lors que le débat était lancé, il n’était plus possible d’ignorer ce qui se passe dans ce domaine et à notre époque : je veux parler des possibilités offertes par internet, ainsi que des risques qui y sont indissociablement liés.

Fallait-il légiférer maintenant ? Oui, également. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de vous le dire, monsieur le ministre, lors de votre audition par la commission des finances. Le calendrier sportif imposait de légiférer – personne n’en doute – avant qu’il ne soit trop tard. Mais ce calendrier reste très difficile, et nous devons avoir conscience du fait que nous jouons un jeu dangereux, sans filet. Un grain de sable suffirait pour perturber l’horlogerie législative et réglementaire et pour mettre en péril toute régulation crédible et pérenne du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne.

L’Assemblée nationale et notre excellent rapporteur, M. François Trucy, ont effectué un travail très approfondi, dont on peut les féliciter. Je remercie d’ailleurs M. le rapporteur de l’attention qu’il a accordée à mes amendements et des réponses qu’il y apportera.

La commission de la culture, quant à elle, s’est penchée principalement sur deux aspects de ce projet de loi : l’éthique du sport, d’une part, et les conséquences de la fin du monopole du PMU sur la filière équine, d’autre part, filière dont tout un chacun sur ces travées, et dans ma région, connaît l’importance.

Notre souci est d’assurer la pérennité de la filière équine, qui représente près de 90 000 emplois directs et indirects – M. le rapporteur l’a dit, nos chiffres divergent –, répartis sur l’ensemble du territoire français et – c’est mon côté agricole – sur de nombreux hectares agricoles sans droit à produire. C’est pourquoi nous avons proposé de différencier la fiscalité sur le pari hippique et celle sur le pari sportif. J’ai conscience des problèmes que poserait une telle différenciation. Néanmoins, aucune raison ne me semble justifier l’alignement de ces fiscalités, alignement qui rendrait plus difficile leur pilotage différencié à l’avenir. Une réduction de la taxation des paris hippiques permettrait à ces derniers de rester concurrentiels par rapport aux paris sportifs. Le différentiel de prélèvement, lié à l’importance de la redevance en faveur de la filière équine, se répercute en effet sur les taux de retour au joueur, ce qui risque d’inciter les adeptes du pari hippique à s’orienter vers le pari sportif et, par contrecoup, d’assécher les ressources de la filière équine – à moyen terme sans doute, mais il ne faut pas négliger ce risque.

Par ailleurs, soucieuse de l’éthique du sport, la commission de la culture souhaite, dans la droite ligne des travaux qu’elle mène depuis plusieurs années, le renforcement des moyens consacrés à la lutte contre le dopage. L’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD, a clairement besoin d’une ressource propre. Le Gouvernement, lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2010, avait d’ailleurs souhaité affecter, dans la limite de 4 millions d’euros, la contribution sur la cession à un service de télévision des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives, dite « taxe Buffet ».

Très favorable au principe d’une taxe affectée, qui renforçait l’indépendance de l’AFLD et la pérennité de son financement, le Sénat avait toutefois supprimé cette disposition afin de prendre en compte les difficultés du sport professionnel, notamment après la suppression du dispositif du droit à l’image collective. La commission de la culture considère qu’un prélèvement sur les mises des paris sportifs, à hauteur de 0, 3 % et dans la même limite de 4 millions d’euros, constituerait une excellente alternative.

Enfin, la commission de la culture proposera plusieurs amendements visant à renforcer l’indépendance et les pouvoirs de l’autorité de régulation des jeux en ligne. L’octroi de la personnalité morale lui permettrait, sur le modèle de l’Autorité des marchés financiers, de gagner une pleine capacité juridique et d’asseoir sa crédibilité vis-à-vis des opérateurs. J’ajoute que cette position est conforme à la doctrine élaborée depuis quelques années par la commission de la culture, ce qui l’a conduite à soutenir l’octroi de la personnalité morale à l’Agence française de lutte contre le dopage et à la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet, la HADOPI.

Mes chers collègues, la commission de la culture a accompli un travail sérieux et approfondi, guidé par le double souci de préserver la filière équine, essentielle en termes d’aménagement du territoire, et l’éthique sportive. J’espère que le texte final que nous adopterons portera sa marque, tout en conservant – j’y serai très attentif, monsieur le ministre – les grands équilibres de votre projet de loi.

Sous réserve de l’adoption des amendements que je vous présenterai, la commission de la culture est favorable à l’adoption du projet de loi. §

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