Cette explication de vote vaut pour l’amendement n° 55, mais également pour toute la série des amendements que nous avons présentés et qui ont été jugés sans intérêt, aussi bien par M. le rapporteur que par M. le ministre.
Monsieur le ministre, vous avez indiqué dans la discussion générale qu’il fallait réguler le marché, parce que celui-ci ne respectait pas toujours les règles. Il faut donc, selon vous, distinguer le légal de l’illégal, votre ambition étant de faire passer le jeu illégal vers le champ du jeu légalisé.
J’attire votre attention sur le fait que le secteur des jeux dégage actuellement, dans notre pays, un chiffre d’affaires d’environ 25 milliards d’euros. Sur ce total, 22 milliards d’euros sont liés à l’activité du PMU, de la Française des jeux et des casinos, donc à une activité totalement régulée. Selon les estimations, 3 milliards d’euros seraient dégagés sur les jeux en ligne, dont 1 milliard d’euros par les opérateurs reconnus. Par conséquent, seulement 2 milliards d’euros sur 25 milliards d’euros correspondraient à une activité non régulée.
Dès lors, votre constat selon lequel le marché ne serait plus régulé n’est valable que pour 10 % de l’activité. Pour les 90 % restants, la régulation existe.
Ce n’est donc pas en essayant d’attirer notre attention sur l’illégalité qui sévirait sur l’ensemble du secteur et sur la nécessité de faire entrer ces activités dans un cadre légal que vous pourrez nous convaincre, puisque cela ne correspond pas à la réalité.
En revanche, nous comprenons très bien que cet a priori, en quelque sorte, vous pousse à refuser les huit amendements présentés par notre groupe. Pour vous, en définitive, la question de la publicité n’est pas posée. Celle-ci accompagne implicitement le passage dans le champ légal. Elle est nécessaire et permettra d’attirer le public vers les jeux légaux, dans le cadre d’une logique mercantile que mon collègue Bernard Vera vient de démontrer. Cela n’est pas du tout vérifié !
À court terme, il est clair qu’une vague publicitaire considérable va déferler sur la France. Je le répète, un chiffre de 200 millions d’euros a été évoqué à très courte échéance, sur l’exercice annuel – c’est considérable ! –, et tous les moyens vont être utilisés.
Prenons le cas des journaux gratuits – je ne m’étendrai pas sur les autres exemples –, qui ont fait l’objet d’un amendement défendu par notre collègue Michel Sergent. Qui les lit ? Les personnes qui ont quelques difficultés à acheter des journaux, les familles, les enfants, … Ces journaux gratuits font partie du quotidien, et les publicités qui y apparaissent toucheront donc tout le monde !
Cet exemple permet de très bien saisir les conséquences que la vague publicitaire attendue pourrait avoir sur des lecteurs lambda, soumis à des messages, parfois agressifs, les incitant à jouer. Mais cela est vrai pour l’ensemble des médias qui ont été évoqués.
Les amendements présentés tendent à offrir une sécurité supplémentaire dans le processus qui va se développer. Nous ne sommes pas en accord avec la philosophie qui guide la mise en place de ce dispositif, mais si, malheureusement, celui-ci est implanté, il faut au moins l’encadrer davantage. À cet égard – je me permets d’insister, monsieur le ministre –, le point essentiel à nos yeux est la question de la publicité, du caractère agressif de cette dernière et du conditionnement des esprits qui découlera de ces messages publicitaires agressifs.
Tous ces amendements ont donc du sens et s’inscrivent dans la philosophe qui est la nôtre aujourd’hui. Mais encore une fois, je souligne, monsieur le ministre, que 90 % du marché est régulé et qu’une démarche valant uniquement pour 10 % de l’activité des jeux ne peut pas légitimer le déferlement publicitaire attendu.