Intervention de Annie David

Réunion du 16 octobre 2008 à 9h45
Logement et lutte contre l'exclusion — Article 1er

Photo de Annie DavidAnnie David :

Cet amendement tend à préserver la mixité sociale.

Le paragraphe IV de l’article 1er nous invite à l’expérimentation. Mais de quelle expérimentation s’agit-il ?

Il s’agirait tout simplement de pratiquer, pour certains groupes d’immeubles déterminés, une politique de loyers marquée par un dépassement « raisonnable » des plafonds autorisés par la loi.

On attend sans doute de cette expérimentation qu’elle conduise, à moyen terme, les locataires relativement aisés concernés par ces loyers modulés à solliciter le consentement de leur bailleur à leur vendre l’appartement qu’ils occupent, afin de se libérer d’un loyer de moins en moins « social ».

Ces dispositions sont parfaitement inacceptables de notre point de vue. Elles visent, concrètement, à accentuer encore un peu plus certains des défauts des conventions d’utilité sociale, que présentent déjà les actuelles conventions globales de patrimoine.

En effet, le classement des immeubles, au motif de la remise en ordre des loyers, conduit naturellement à créer une forme de sélection des locataires en fonction de leurs ressources.

Cette sélection aboutit à reléguer les plus modestes et les plus défavorisés d’entre eux dans les groupes d’immeubles offrant la moins bonne qualité de service et permet, par le biais d’ajustements à la hausse des loyers, de loger les ménages les moins vulnérables dans les ensembles les mieux situés ou les plus demandés.

S’il s’agit de faire cohabiter dans le même ensemble d’immeubles ménages modestes et ménages plus aisés, nous ne pouvons que rappeler que des dispositifs ad hoc existent déjà et que leur mise en œuvre est étroitement dépendante de la capacité des bailleurs à en supporter le coût.

En outre, nous observons qu’aucune incitation n’est prévue par l’article pour favoriser la mise en place de l’expérimentation, le Gouvernement se contentant d’en définir les conditions et de fixer les règles.

Vous espérez sans doute, madame la ministre, que la capacité d’autofinancement des organismes bailleurs sociaux sera encore renforcée par la fixation de loyers d’un montant injustifié au regard du service rendu.

Même s’il peut apparaître de bonne gestion de pratiquer une forme de modulation des loyers, vous attendez surtout de ces dispositions qu’elles permettent à l’État de s’affranchir de la charge du financement des aides au logement.

Sans doute eût-il été préférable, en l’espèce, de rechercher de nouvelles sources de financement – on en a trouvé pour les banques, mais c’est apparemment plus difficile pour les logements sociaux ! –, qui permettent d’alléger les contraintes liées aux opérations de construction neuve et de réhabilitation.

N’oublions jamais, mes chers collègues, que, en l’état actuel des aides publiques accordées au logement social, un logement relevant d’un prêt locatif à usage social ou d’un prêt locatif social demeure aujourd’hui une source de déficit structurel pour l’organisme qui le fait construire.

De plus, ce déficit est, pour l’heure et de manière exclusive, gagé sur la perception des loyers des logements plus anciennement construits ou réhabilités.

Pour ces motifs, nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement.

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