Intervention de Françoise Laborde

Réunion du 19 mars 2009 à 9h30
Libertés et responsabilités des universités — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Françoise LabordeFrançoise Laborde :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme je l’ai déjà dit lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2009, les faits sont là. En très peu de temps, notre pays a cédé énormément de terrain. II a quitté le cercle des dix nations les plus dynamiques en matière de recherche et de développement.

Troisième pays scientifique en 1970, encore septième en 1995, la France se place désormais au quatorzième rang mondial pour la dépense intérieure de recherche et de développement rapportée à son produit intérieur brut. Cette dépense représente aujourd’hui à peine plus de 2 % du PIB, ce qui est bien évidemment très insuffisant !

Notre pays reste donc très en deçà de l’objectif ambitieux que s’est fixé l’Union européenne de consacrer 3 % du PIB communautaire à la recherche d’ici à 2010.

Le système universitaire français se dégrade. Les chiffres parlent d’eux-mêmes, qu’il s’agisse du montant des dépenses par étudiant, des bourses, mais aussi des crédits d’équipement et de recherche, sans oublier le surpeuplement des amphithéâtres.

Par ailleurs, nous devons aussi faire face à une concurrence internationale de plus en plus vive. Les classements des universités mondiales se font bien trop souvent à nos dépens, malgré les nombreuses imperfections des critères qui les régissent.

Dans ce contexte, c’est la lutte contre l’échec à l’université qui doit être l’objectif premier de la réforme de l’enseignement supérieur français.

De quelle façon y parvenir, madame la ministre ? Comment donner ce nouveau souffle tant attendu ? Certainement pas dans la précipitation, l’urgence et l’absence de concertation !

Une réforme est indispensable. Sur ce point, nous sommes tous d’accord, d’autant que les enjeux de la recherche, de l’enseignement supérieur et de l’innovation sont déterminants pour sortir de la crise actuelle.

Mais l’adoption en urgence de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités est très loin d’être une réponse satisfaisante. La preuve en est que, faute d’avoir été entendu, le malaise des universitaires, des chercheurs et des étudiants s’exprime dans la rue depuis de nombreuses semaines.

Dans un tel climat de défiance, comment imaginer la mise en œuvre efficace et positive d’une réforme déjà bancale ?

Le statu quo n’est pas envisageable, mais c’est bien en écoutant dans la sérénité les principaux acteurs concernés que l’on pourra améliorer les dispositifs inadaptés qui ont été imposés il y a près de deux ans.

La nomination, un peu tardive, de la médiatrice, Mme Claire Bazy-Malaurie, va dans le bon sens et j’ai hâte de lire la nouvelle mouture du décret tant décrié.

Lutter contre l’échec à l’université nécessite, d’abord et avant tout, de créer de nombreux postes d’enseignants-chercheurs, et non de recourir à des heures supplémentaires, qui alourdiraient le service des maîtres de conférences et nuiraient à la qualité de leurs enseignements et de leurs travaux de recherche.

La réforme pour le moins cavalière du statut des enseignants-chercheurs que vous avez tenté d’imposer ne résoudra aucun des problèmes dont nous sommes tous parfaitement conscients.

Une remise à plat du statut des universités et des moyens humains mis à leur disposition doit intervenir rapidement. II est absolument nécessaire pour cela de tenir compte aussi bien des exigences de l’autonomie des universités que de l’indépendance et du statut national des enseignants-chercheurs.

Le passage aux compétences élargies et les nouvelles missions confiées aux universités justifient pleinement de continuer à porter l’exigence d’un plan pluriannuel de recrutement.

L’autre levier incontournable pour lutter contre l’échec à l’université est l’orientation, la motivation et l’accompagnement des étudiants.

Ainsi, la question du logement est cruciale. En premier cycle, elle constitue l’une des principales causes de l’échec des étudiants. À cet égard, deux problèmes se posent et vont de pair : le niveau trop élevé des loyers et l’insuffisance de l’offre de logements universitaires.

Il découle de ces problèmes que la moitié des étudiants sont obligés de travailler pour financer leurs études, souvent au point de les sacrifier.

Le « plan campus », fondé sur la mise en concurrence des universités, aboutit à privilégier une petite dizaine de sites au détriment des autres. On crée ainsi clairement un système universitaire à deux vitesses, alors qu’il existait déjà une inégalité de traitement profonde entre les grandes écoles et les universités.

L’égalité des chances pour l’accès aux études supérieures, objectif républicain primordial, n’est pas près de devenir une réalité ! La réussite en licence était mise en avant dans ce grand projet : vous devez y consacrer les moyens nécessaires !

Dans cet hémicycle, j’ai déjà eu l’occasion de souligner, madame la ministre, l’excellence du département de la Haute-Garonne dans le secteur de la recherche et de l’enseignement supérieur, ainsi que le grand nombre d’étudiants, qui représentent 10 % de la population de l’agglomération toulousaine.

Pourtant, je suis particulièrement préoccupée de leur qualification et de leur devenir sur le marché de l’emploi. À ce propos, madame la ministre, j’aimerais vous exposer un cas concret, sur lequel j’aimerais obtenir une réponse de votre part.

Il s’agit d’une initiative locale innovante et unique en France. L’IUT de Toulouse-Blagnac propose actuellement une formation inédite. On y a créé un diplôme universitaire de technologie, ou DUT, intitulé « Aide et assistance pour le monitoring et le maintien à domicile » – aussi appelé « 2A2M » –, dédié au service à la personne.

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