Nous le voyons, nous sommes dans une totale incohérence juridique. Que vous optiez pour la suppression de la viabilité ou pour sa consolidation, vous ne pouvez pas ne pas décider ! À défaut, la notion de viabilité sera définie par les praticiens : un médecin pourra fixer le critère de viabilité à quinze semaines, comme à dix-sept, à vingt ou à vingt-deux semaines…
L’absence de décision politique place les obstétriciens, les officiers d’état civil que sont les maires, l’ensemble des familles, qui ne connaissent pas forcément leurs droits, et même les gestionnaires, dans une situation de vide juridique.
Par conséquent, je souhaiterais que vous puissiez fixer un seuil, ouvrir un droit général à l’inhumation des corps des enfants, quel que soit le stade du développement – je rappelle que ces corps font autrement partie des « déchets hospitaliers » – et clarifier les droits sociaux.
J’attire également votre attention sur la bioéthique, dans la perspective des lois dont vous serez bientôt saisis. Nous commençons à entendre des réclamations, de la part, entre autres, des médecins, sur une problématique un peu douloureuse.
Nous devons, me semble-t-il, réfléchir aux questions soulevées par les quelque 18 000 amputations qui sont dues au diabète chaque année. Comme vous le savez, compte tenu de leurs croyances religieuses, des personnes de confession musulmane souhaitent être enterrées en entier. Dès lors, quel est le statut du membre amputé ? De même, dans certaines cultures africaines, on demande à récupérer le placenta pour l’enterrer. Quelle réponse pouvons-nous y apporter ?
En l’absence d’analyse juridique, des questions éthiques lourdes se posent. Nous ne pouvons pas laisser les gestionnaires hospitaliers et les médecins totalement désemparés. Si la pratique n’est pas encadrée, les réponses à de telles questions seront différentes selon les convictions des personnes ou les établissements.
Il revient au politique de se saisir de tels enjeux, quitte à ne pas prendre de décision, mais il doit alors expliquer pourquoi. Et, s’il tranche, il doit préciser les conditions dans lesquelles il le fait.
Je tiens à vous remercier des amendements que vous déposez en matière de santé et j’attire votre attention sur l’absence de décrets relatifs à l’indemnisation des victimes du sang contaminé. Vous aviez pris des dispositions afin que l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, l’ONIAM, indemnise les personnes transfusées dans les petits établissements sans transferts d’actifs. Or le décret n’est toujours pas paru. Je souhaiterais que vous puissiez user de votre pouvoir en la matière.