L’article 27 ter AB vise à créer un comité scientifique œuvrant auprès de l’observatoire de la pénibilité, qui lui-même assiste le comité permanent, lequel siège au sein du Conseil d’orientation sur les conditions de travail.
Ce comité scientifique aura pour mission d’évaluer les conséquences de l’exposition aux activités identifiées comme pénibles par l’observatoire de la pénibilité sur l’espérance de vie avec ou sans incapacité des travailleurs.
Nous nous opposons pourtant au Gouvernement quant à la composition du comité scientifique, fixée par décret.
L'observatoire de la pénibilité identifiera – peut-être – une activité comme pénible et ayant des conséquences sur la santé des travailleurs. Alors, le comité scientifique pourra – peut-être – travailler pour déterminer s’il s’agit effectivement d’une activité ayant des conséquences, même différées, sur la santé !
Nous sommes pour notre part très choqués par cette attitude qui consiste à toujours remettre à plus tard des mesures qu’il faudrait prendre aujourd'hui.
Mettre en place un énième comité scientifique pour prouver ce que chacun sait déjà, c’est presque faire preuve de mépris à l’égard des travailleurs qui, eux, n’ignorent pas que tel travail a des effets très néfastes sur leur santé.
A-t-on besoin d’une nouvelle étude pour prouver que la terre est ronde ? Non, elle l’est ! Il en va de même en matière de pénibilité. Il a déjà été prouvé qu’un travail dur et pénible écourtait la durée de vie, et que la pénibilité avait des effets différés.
En matière de pénibilité et de souffrance au travail, que de temps passé, mes chers collègues, à observer, mais surtout à ne rien faire pour que les choses changent ! Les accords en faveur de la prévention de la pénibilité que vous venez d’adopter ne changeront pas grand-chose pour les salariés des TPE et des PME. On crée des comités, des observatoires, des missions d’évaluation, on édite des rapports et encore des rapports.
Savez-vous que la France est actuellement un des pays au monde où les travaux relatifs aux conséquences de toutes les formes de pénibilité sur la santé des travailleurs – physique et morale – sont les plus nombreux, les plus fiables et les plus diversifiés ?
Oser prétendre que les études scientifiques n’ont pas encore établi qu’un travail pénible peut avoir des conséquences différées sur la santé et qu’elles ne permettent pas de mesurer le seuil à partir duquel la soumission à ces facteurs de risques et de souffrance influe sur l’espérance de vie n’est pas digne, mes chers collègues, de notre société.
Depuis longtemps, nous savons mesurer l’incidence de la pénibilité des conditions de travail sur la santé. C’est d’ailleurs ce qui figure dans les conclusions du rapport de la mission d’information sur le mal-être au travail, présidé par M. Dériot et auquel j’ai participé avec M. Godefroy et d’autres de mes collègues. Personne ne pourra dire qu’on ne le savait pas.
Le seul problème, c’est que vous ne voulez pas agir, car les effets différés de la pénibilité comme les risques psychosociaux sont des épouvantails pour le MEDEF. À l’heure actuelle, il est hors de question que vous avanciez d’un pouce sur ces sujets.
Cela rappelle les affirmations des fabricants de tabac ou d’amiante qui, jusqu’au bout, ont nié que les produits qu’ils fabriquaient et qu’ils faisaient respirer à leurs salariés pouvaient avoir la moindre conséquence néfaste pour la santé.
Il est donc urgent d’attendre, et pour enterrer le problème, vous créez une commission, en l’occurrence, ici, un comité scientifique ! Pis encore, vous prévoyez de laisser passer plusieurs années avant que celui-ci ne puisse intervenir !
Nous espérons que certains scientifiques auront le courage de vous dire que ce comité est un faux-fuyant.
Face à votre proposition, nous avons failli déposer un amendement de suppression. Puis, de manière plus pragmatique, nous avons décidé d’essayer de modifier la composition de ce comité pour le cas où il pourrait avoir une véritable utilité.
Nous interviendrons donc sur la composition de ce comité que vous souhaitez définir par décret, et nous vous proposerons un mode de désignation qui ne sera pas soumis à l’influence politique.