Intervention de Jacky Le Menn

Réunion du 18 octobre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Article 27 ter AC

Photo de Jacky Le MennJacky Le Menn :

Cet article soulève des difficultés de compréhension et d’application dans les domaines d’ouverture de droits concernés. Il présente aussi une intrication avec un dispositif déjà existant : cela aura pour conséquence une inégalité de traitement des assurés sociaux et des coûts pour l’ensemble du système de retraite par répartition.

S’agissant des difficultés de compréhension et d’application dans les domaines d’ouverture de droits concernés, le dispositif de cet article vise les incapacités reconnues « au titre d’une maladie professionnelle mentionnée à l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ou au titre d’un accident du travail mentionné à l’article L. 411-1 et ayant entraîné des lésions identiques à celles indemnisées au titre d’une maladie professionnelle. »

Dans le cadre des maladies professionnelles listées, certaines peuvent faire référence à des lésions que l’on peut voir reconnaître au titre d’un accident de travail et non d’une maladie professionnelle selon le contexte de survenue.

Cependant, il est à noter que la reconnaissance en maladie professionnelle ne vise pas que les maladies listées. Certaines affections ou lésions peuvent être reconnues en maladies professionnelles, dès lors qu’elles sont stabilisées et que le taux d’incapacité est supérieur à 25 %, comme le prévoit l’alinéa 3 de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.

Ce dernier dispositif de reconnaissance est dynamique, sans cesse en voie de construction et d’extension au gré des demandes de reconnaissance instruites par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles. Dans ce contexte élargi, tous les types de lésions peuvent faire l’objet de reconnaissance, ce qui soulèvera des difficultés lors de l’application du texte sur la réforme des retraites.

J’en viens à l’intrication avec un dispositif déjà en place. En effet, l’article L. 351-7 du code de la sécurité sociale ouvre déjà la possibilité de bénéficier d’une retraite dès 60 ans avec application du taux plein, malgré l’absence du nombre requis de trimestres ; l’avis sur inaptitude alors relève du médecin conseil. L’appréciation s’effectue en tenant compte de l’ensemble des incapacités lésionnelles, quelle que soit leur origine légale : droit commun, accident de travail, maladies professionnelles, maladies, etc.

Le fait de laisser subsister deux dispositifs visant des taux d’incapacité différents et des critères de reconnaissance différents pour une même finalité, celle de l’inaptitude au travail, posera donc un problème de cohérence.

Tout cela n’est pas sans conséquence en termes d’iniquité de traitement des assurés sociaux.

La coexistence de deux systèmes de reconnaissance d’une même prestation selon des critères différents sera source d’iniquité.

Le maintien d’un seul système visant à reconnaître le droit à la retraite par inaptitude dès lors que des lésions atteignant un taux d’incapacité seraient obtenues uniquement dans le cadre d’une maladie professionnelle serait également inéquitable pour les assurés porteurs de ces mêmes lésions mais apparues dans un cadre différent, accident de droit commun ou simple maladie.

Il paraît également inéquitable d’exclure du dispositif des lésions de tous types n’entrant pas dans le cadre des maladies professionnelles mais relevant de celui des accidents du travail et atteignant des incapacités de même niveau.

L’ensemble de ce constat pourrait faire l’objet d’une saisine du Conseil constitutionnel.

En conclusion – je vous prie de m’excuser pour la technicité de mon intervention –, le nouveau dispositif de retraite par inaptitude que vous nous proposez, monsieur le ministre, nous paraît inachevé, redondant, inéquitable et coûteux.

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