Intervention de Jean-Pierre Chevènement

Réunion du 20 janvier 2010 à 21h30
Réforme des collectivités territoriales — Demande de renvoi à la commission

Photo de Jean-Pierre ChevènementJean-Pierre Chevènement :

Le Sénat, s’il est le représentant des collectivités territoriales, a aussi – en témoignent tous ces grands personnages dont les statues nous surplombent – le souci de l’État, qui a structuré la France dans la longue durée.

Je sais bien que l’article 72-1 de la Constitution, issu de la révision constitutionnelle de 2003, autorisait, en vertu d’une loi, un référendum local. Il s’agissait alors de l’avenir de la Corse. Je ne m’étendrai pas sur la décision de nos concitoyens de Corse, qui ont refusé d’être mis en coupe réglée au sein d’une collectivité à statut particulier par une minorité violente à forte tendance maffieuse. Cette affaire ayant été tranchée, est-il bon d’y revenir ?

La Constitution, telle qu’elle s’applique depuis 2004, prévoit une loi pour autoriser les référendums locaux. Le projet de loi qui nous est soumis ne contient rien de tel, ne pose aucune barrière de cette sorte. Selon son article 13, un décret en Conseil d’État suffit. C’est une grave atteinte aux prérogatives de la Haute Assemblée et, plus généralement, du Parlement, qui devrait avoir le dernier mot sur l’organisation de la France en départements et en régions.

Menacer les communes, mes chers collègues, c’est renier la Révolution ! Menacer le département, c’est renier la République ! Ouvrir la voie à la création, sur le sol même de la métropole, de collectivités à statut particulier et chambouler notre organisation en départements et en régions en vertu de référendums locaux, c’est porter atteinte à l’unité du peuple français !

Ce projet de loi remettrait en cause le principe d’égalité en creusant les différences entre les territoires et les inégalités entre les citoyens. Il serait, je le crois, un mauvais coup porté à l’unité de la République et au couple républicain communes-département. Bref, monsieur le ministre, il doit être profondément repensé. Le Gouvernement doit prendre le temps de s’expliquer davantage et de revoir son texte, qui, en l’état, porte de graves risques d’inconstitutionnalité.

C’est pourquoi je demande à la Haute Assemblée, en vertu de l’article 44 de son règlement, de décider le renvoi à la commission des lois du projet de loi de réforme des collectivités territoriales. L’organisation territoriale du pays est une chose trop sérieuse, au cœur même des prérogatives du Sénat, pour que celui-ci se laisse bousculer et placer devant le fait accompli !

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