Intervention de Christian Gaudin

Réunion du 28 novembre 2007 à 22h00
Loi de finances pour 2008 — Débat sur l'évolution de la dette de l'état suite

Photo de Christian GaudinChristian Gaudin :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la problématique de la dette et de son évolution a déjà été largement abordée lors du débat d'orientation budgétaire, lors de la discussion générale et de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2008. Il ne faut pas s'en plaindre, car ce sujet mérite que l'on répète les choses avec constance et conviction.

Nous ne devons pas le passer sous silence : il est de notre devoir de prendre les décisions qui permettront de réduire l'endettement et d'informer nos concitoyens de la situation financière de notre pays.

Comment faire croire aux Français que l'on peut vivre en étant surendetté ?

La dette apparaît comme une contrainte de plus en plus forte pour nos finances publiques. Elle limite considérablement les marges de manoeuvre économiques et financières. Elle empêche donc les gouvernements successifs de prendre des mesures de grande ampleur permettant de relancer véritablement la croissance que nous recherchons tant !

Pour 2006, la dette des administrations publiques représentait 64, 2 % du PIB. À la fin de l'année 2007, le poids de la seule dette de l'État devrait atteindre 919 milliards d'euros. Son impact budgétaire direct, c'est-à-dire la charge des intérêts, équivaut aux deux tiers des ressources de l'impôt sur le revenu, soit 40, 8 milliards d'euros.

Ce montant est également presque égal à celui de notre déficit public. En faisant un petit raccourci, on pourrait dire que sans dette, nous n'aurions pas de déficit. Et inversement ! Mais cela présente assez peu d'intérêt, car la dette peut être utile si elle sert à des investissements durables et d'avenir, par exemple dans les domaines de la recherche et du développement.

Ce qui m'inquiète le plus, c'est à la fois l'avenir de nos enfants et l'image que notre pays donne à ses différents partenaires aux échelons européen et mondial.

Concernant ce que nous allons laisser à nos enfants et à nos petits-enfants, des réformes structurelles sont nécessaires et requièrent une forte volonté politique. Lorsque nous acceptons les déficits et la dette publique, c'est à eux que nous devons penser. Nos décisions d'aujourd'hui créent leur dépendance de demain. Les engagements financiers que nous prenons auront des conséquences sur leur mode de gestion du pays. Ils agiront sous contrainte. Nous leur laissons assez peu de choix.

Si encore les déficits que nous accumulons correspondaient à des investissements massifs dans les dépenses d'avenir, notre responsabilité serait sauve, mais nous ne pouvons pas dire que nos efforts en matière d'aménagement, d'innovation et d'enseignement supérieur soient inouïs comparés à ceux de nos partenaires. Nous empruntons encore pour le simple fonctionnement de l'État, pour des dépenses du présent.

Nous sommes liés aux générations futures par un pacte tacite. Ne transformons pas ce lien, qui devrait être constructif, en une dépendance financière pour eux à cause d'un héritage, qu'ils pourraient refuser !

Par ailleurs, notre attitude financière a des conséquences sur nos relations avec nos partenaires européens, principalement ceux de la zone euro. Nous sommes dépendants de tous les pays du marché commun, comme eux le sont de nous.

Les décisions et les attitudes financières de chacun ont des conséquences sur la santé économique des partenaires. Nous ne devons pas tirer les autres pays vers le bas. Nous-mêmes n'accepterions pas d'être placés dans cette situation. Nous devrions être exemplaires. Il y va de notre image, mais surtout de l'avenir de l'Union européenne.

Le respect des critères du Pacte de stabilité, notamment en matière de dette publique, doit sous-tendre nos réflexions sur l'évolution des finances publiques. Les signes que nous envoyons aujourd'hui à nos amis européens ne sont pas très convaincants quant à notre bonne volonté. Pour la plupart de nos partenaires, nous profitons de la zone euro pour amortir la dégradation de nos finances publiques

Nous devons être vigilants sur la position de la France dans le concert européen. Nous nous ferons d'autant mieux respecter et d'autant mieux entendre que notre État sera moins endetté. La voix de la France ne portera pas, ne sera pas crédible si notre niveau de dette ne diminue pas rapidement.

Je dis cela en pensant au second semestre de l'année 2008. Notre pays, qui présidera alors l'Union européenne, aura besoin de peser pour mener à bien les réformes que vous souhaitez mettre en oeuvre. Il est donc nécessaire que la voix de la France soit claire et, surtout, entendue.

S'agissant de l'évaluation et de la diminution de notre dette, je souhaiterais aborder en quelques mots l'estimation des actifs de l'État et leur vente progressive.

La diminution des actifs de l'État, par exemple via la cession d'une partie de son parc immobilier, fait partie de la politique de l'actuel gouvernement, comme du précédent. De telles ventes peuvent se révéler utiles si le coût que ces actifs représentent pour l'État est supérieur au gain qui en est attendu. Néanmoins, il nous est quasiment impossible d'évaluer aujourd'hui l'opportunité de chacune de ces opérations. Il faut noter d'ailleurs que 15 % seulement des 600 millions d'euros de cessions d'immeubles ont été consacrés à la réduction de la dette.

En outre, il est nécessaire d'établir une véritable évaluation des actifs de l'État, afin de mesurer avec plus de rigueur le niveau d'endettement des administrations publiques.

Comme l'indique notre collègue Joël Bourdin dans son rapport d'information sur les perspectives économiques pour 2008-2012, il serait intéressant de calculer les actifs corporels et incorporels produits par l'intervention publique, afin d'établir un niveau de dette nette. Avec ces mesures de forme, le Parlement serait mieux à même d'évaluer la politique financière menée et le Gouvernement pourrait assurer une meilleure gestion à long terme.

Comme l'ont fait précédemment mes collègues du groupe UC - UDF Jean Arthuis et Denis Badré, je souhaite à présent évoquer l'article 7 du projet de loi de finances.

Sans doute sommes-nous un peu obstinés, mais je voudrais tout de même poser la question suivante. Pourquoi vouloir dépenser 200 millions d'euros supplémentaires l'année prochaine et près de 800 millions les années suivantes, en doublant l'effet d'une mesure dont l'objectif escompté est déjà atteint grâce à l'adoption par le Parlement de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ? L'effet d'entraînement à l'accession à la propriété qui en découlerait me paraît limité. Si la première instauration de l'aide était réellement incitative, un tel doublement apparaît purement et simplement comme un cadeau fiscal.

À mon tour, je le répète, la suppression de l'article 7 serait tout à fait opportune pour notre dette.

Pour conclure, j'aimerais poser une question simple. La nouvelle programmation des finances publiques prévoit un retour à l'équilibre du solde public pour 2012, avec une croissance moyenne de 2, 5 %. Or, chaque année ou, du moins, tous les deux ans, la programmation est revue. Les gouvernements successifs repoussent systématiquement d'un an ou deux le moment où nous pourrons célébrer un déficit nul.

Comme le souligne le rapport de la commission, nous n'en sommes pas à moins de dix programmations successives, avec des prévisions économiques similaires et des conclusions identiques. Toutes les courbes de retour à l'équilibre sont parallèles. À chaque nouvelle programmation, nous trouvons de bonnes raisons de ne pas avoir pu suivre la précédente.

Dans ces conditions, quelle crédibilité accorder à la programmation pour 2012, qui ne semble pas être en rupture avec les précédentes ?

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