Intervention de Rémy Pointereau

Réunion du 8 juillet 2011 à 15h00
Certificats d'obtention végétale — Article 14, amendements 10 4

Photo de Rémy PointereauRémy Pointereau, rapporteur :

L’amendement n° 10 rectifié s’inscrit dans le prolongement de l’amendement n° 4 rectifié bis déposé à l’article 4 et soulève un réel problème.

Il vise à suspendre le paiement de l’indemnité lorsque l’agriculteur produit à la ferme ses semences à partir de semences protégées, pour ensuite alimenter son bétail, effectuer ses couverts végétaux, ou encore se prémunir contre une éventuelle rupture d’approvisionnement en semences certifiées en cas de sécheresse ou de gel.

Bien que les obligations agro-environnementales puissent être respectées en recourant à des variétés qui ne sont plus protégées et sont tombées dans le domaine public, la mesure proposée me paraît toutefois aller trop loin à cet égard.

Quant à la rupture d’approvisionnement, on pourrait admettre que soit créée, au titre de l’article 10, une nouvelle licence d’intérêt public permettant de remédier à une telle situation.

Pour ce qui concerne l’autoconsommation, il est difficile d’accepter en l’état la proposition que vous nous soumettez, monsieur Raoul. J’en conviens, les éleveurs subissent des crises répétitives et sont confrontés à des difficultés toujours plus nombreuses. J’en veux pour preuve la sécheresse qui sévit cette année. Toutefois, ils se livrent à un acte commercial lorsqu’ils vendent leur bétail. Si une variété d’aliment permet d’améliorer la qualité du lait ou de la viande, ou encore d’engraisser plus vite les animaux, pourquoi l’obtenteur ayant permis une telle avancée ne recevrait-il pas une rémunération pour son travail ?

On pourrait aussi considérer qu’il existe une distorsion de concurrence entre les éleveurs qui achètent des semences certifiées et ceux qui reproduisent les mêmes semences à la ferme : les uns financeraient la recherche à travers les royalties versées pour chaque sac de semences, à l’inverse des autres. Ainsi, un exploitant pratiquant seulement l’élevage sans faire aucune culture et qui, par conséquent, achète la totalité de ses céréales à un fabricant d’aliments pour bétail se verrait répercuter, par celui-ci, la CVO.

Je souligne au passage que deux espèces, les pois et l’orge fourragère, posent problème. En effet, l’autoconsommation étant importante, la recherche est complètement sinistrée, faute de rémunération pour les obtenteurs. En conséquence, il ne reste plus beaucoup de variétés qui évoluent. Il faut donc protéger les droits de l’obtenteur, car ces filières pâtissent de la situation actuelle.

Enfin, ni la convention UPOV de 1991 ni le droit européen ne permettent une telle exonération du paiement de l’indemnité d’utilisation de semences de ferme.

Si nous adoptions l’amendement n° 10 rectifié en l’état, nous serions confrontés à deux problèmes. Tout d'abord, il serait impossible de déposer les instruments de ratification de la convention UPOV, car la loi française serait contraire à cette dernière. En outre, notre périmètre de protection du droit de propriété intellectuelle serait totalement différent selon que les COV sont nationaux ou européens. Le risque serait alors que plus aucun obtenteur ne dépose de COV au niveau national, tous s’orientant vers la protection européenne, plus onéreuse mais plus large.

Pour autant, je réitère l’ouverture que j’avais faite lors de la discussion de l’article 4. En effet, même si la question de l’autoconsommation est une question sensible, j’estime qu’il faut la régler dans un cadre négocié. Du reste, cela a été possible concernant le blé tendre, puisque l’accord interprofessionnel de 2001 permet d’exonérer l’autoconsommation. Pourquoi ne pourrait-on en faire de même pour d’autres variétés ? Je rappelle que le coût pour l’agriculteur, 0, 50 euro par tonne de blé vendue, équivaut à environ 3 ou 4 euros par hectare. Il ne s’agit donc pas de sommes considérables

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