Le débat qui s'est engagé le prouve, ces amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 5 bis posent évidemment un certain nombre de questions.
L'idée est assez nettement précisée dans l'objet de ces amendements : il s'agit de créer les conditions d'une sorte d'alimentation en ligne directe des fournisseurs alternatifs d'électricité par les producteurs alternatifs d'électricité, en vertu de contrats spécifiquement passés entre les uns et les autres.
Cette démarche remet de fait en question toute la problématique de l'obligation d'achat telle qu'elle est conçue depuis la loi de 2000. En effet, celle-ci représente un coût particulièrement significatif pour EDF, coût évidemment répercuté sur la facture de l'ensemble des usagers du service public de l'électricité et qui a atteint, soulignons-le de nouveau, 994 millions d'euros pour 2005, montant à comparer aux 50 millions d'euros de la prise en charge de la tarification spéciale « produit de première nécessité ».
Cette obligation d'achat repose sur une motivation fondamentale : l'énergie provenant d'autres sources que celle produite par Électricité de France est, encore aujourd'hui, plus chère que cette dernière. Il est en effet plus coûteux de produire de l'énergie en utilisant la cogénération, le gaz ou les éoliennes que de le faire à l'aide des modes de production les plus utilisés par EDF, c'est-à-dire le nucléaire, l'hydroélectricité et la combustion des énergies fossiles.
Au demeurant, comment ne pas relever, là encore, que le processus de formation des prix de la production énergétique est d'ores et déjà durablement installé ?
Au fil des ans, plus une centrale hydroélectrique ou une centrale nucléaire produit d'énergie, plus le coût marginal représentatif de l'investissement de départ consacré à sa construction diminue dans le prix global de la production. Il s'agit là d'une règle économique tout à fait classique.
Avec le temps, on amortit les coûts de recherche et de développement. Seuls les coûts variables de production -salaires, maintenance des installations, emplois, fournitures de combustibles, etc - progressent, et encore cette progression est-elle parfois limitée ...
En matière de production alternative d'électricité, de manière générale, les coûts de production n'ont pas encore atteint le point d'équilibre, c'est-à-dire celui où le prix de production devient comparable aux coûts de production de l'opérateur historique.
De fait, l'obligation d'achat, qui, je le rappelle, est prise en charge in fine par tous les usagers, y compris les particuliers, repose sur la rentabilisation économique sur fonds publics des insuffisances de l'initiative privée. C'est l'application du vieux principe de la socialisation des pertes.
En vérité, il conviendrait dans les faits de s'interroger sur la faisabilité économique réelle du développement des autres sources de production énergétique et sur la nécessité, entre autres, de réduire de manière sensible les coûts « en amont », qui grèvent lourdement les prix de sortie.
Le fait d'invoquer le recours possible à l'argent public pour prendre en charge les surcoûts constatés et de consacrer la CSPE au financement de la rentabilité des producteurs alternatifs n'est pas acceptable sans cette nécessaire mise en question, et ce d'autant plus que les conditions d'exploitation de certaines sources d'énergie ont été quelque peu facilitées, ces derniers temps, grâce à un allégement sensible des obligations administratives d'établissement mises à la charge des exploitants.
Une telle démarche n'étant pas susceptible de recueillir notre approbation, nous voterons contre ces amendements.