Intervention de Annie David

Réunion du 20 octobre 2006 à 15h15
Secteur de l'énergie — Article 6, amendements 25 13 9 2004

Photo de Annie DavidAnnie David :

En 2004, en transposant la directive européenne, vous aviez jugé bon de vous en tenir à une stricte séparation comptable, à une application rigoureuse de la directive européenne.

Or vous estimez aujourd'hui que vous aviez mal fait votre travail, puisque vous revenez sur l'ouvrage pour franchir une nouvelle étape, nullement nécessaire au regard de cette directive. Y aurait-il eu une nouvelle directive qui nous aurait échappé et qui vous obligerait à agir de la sorte ? Il ne nous semble pas.

Pour autant, votre capacité d'interprétation des directives est féconde. Vous nous en avez fait la démonstration depuis 2002, en bradant de façon éhontée notre patrimoine public. Vous filialisez ou, plus exactement, vous séparez juridiquement le gestionnaire de réseau de la maison mère. Vous cassez donc l'outil existant en deux morceaux, pour que GDF ne prenne plus aucune décision en termes stratégiques sur le réseau. Mais l'éclatement n'est pas achevé ; vous ouvrez ainsi la porte à d'autres démantèlements, puisque la création de sous-filiales est possible.

Avec ce paragraphe II, vous accordez plus d'importance à l'aspect prétendument juridique - en appliquant de façon zélée, et même en extrapolant, une directive européenne - qu'à la réalité économique de cette entreprise GDF, qui fonctionne très bien et n'a aucunement besoin de se saborder de la sorte.

Votre projet n'est conditionné que par des considérations boursières. Vous n'avez pas compris ce que les Français vous ont dit le 29 mai, en rejetant le projet de constitution européenne, en refusant ce type de société où la concurrence libre et non faussée serait la seule règle de vie. Vous vous obstinez à transposer des directives dont nous ne voulons pas.

Le texte proposé par l'amendement n° 25 pour le paragraphe II de l'article 13 de la loi du 9 août 2004 va beaucoup plus loin qu'il n'y paraît. Il aborde la question des réseaux sous l'angle non pas seulement du transport du gaz, mais également de l'électricité. Vous avez ainsi la possibilité de déterminer une règle qui sera applicable à EDF. Il est effectivement précisé dans le texte qu'« un gestionnaire de réseau de distribution d'électricité ou de gaz naturel est notamment chargé de définir et mettre en oeuvre les politiques d'investissement et de développement des réseaux de distribution, d'assurer la conception, la construction des ouvrages et la maîtrise d'oeuvre des travaux... »

La distribution est aujourd'hui assurée par GDF et des distributeurs non nationalisés, les DNN, par le biais de concessions. Il n'y a donc pas de monopole proprement dit de la part de GDF ou des DNN. Aucune disposition du texte ne mentionne le maintien de ces concessions.

Je le redis, c'est une politique à l'aveuglette que vous nous proposez, sans que l'on sache précisément ce qu'il adviendra de ce système de gestion des réseaux. En tout cas, nous avons bien saisi que vous souhaitez libéraliser tout le système de distribution, qu'il soit électrique ou gazier, et que cela ne sera pas sans conséquences sur les tarifs.

En vous attaquant au réseau de distribution du gaz, vous ouvrez dans cet article une brèche pour démanteler le réseau de distribution de l'électricité. Vous ne faites que mettre en application les théories libérales du maître à penser Jack Welch, le patron de General Electric, qui disait ceci : « Je ne reste que dans les métiers où je peux être numéro un ou deux mondial. » Désormais, il faut y ajouter une interrogation : « Mes activités créent-elles plus de valeur à l'intérieur ou à l'extérieur du groupe ? »

Cette citation, extraite d'un journal économique, devrait nous amener à plus de prudence et nous inciter à rejeter le paragraphe II de l'amendement n° 25, illustration de la mise en application de ces théories, qui n'ont en ligne de mire que les seuls résultats boursiers.

Comme le disait si bien Victor Hugo, « c'est de l'enfer des pauvres qu'est fait le paradis des riches ». Vous militez dans ce sens en approuvant ce texte de loi !

C'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter ce sous-amendement.

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