Intervention de Robert Bret

Réunion du 20 octobre 2006 à 15h15
Secteur de l'énergie — Article 7

Photo de Robert BretRobert Bret :

Cet amendement porte, en apparence là aussi, sur la simple rédaction de cet article 7. Il fournit néanmoins, au-delà de son caractère apparemment rédactionnel, l'occasion de rappeler quelques vérités quant à la logique même qui inspire ce projet de loi.

En effet, les éléments principaux du texte qui nous préoccupe peuvent assez aisément se résumer en quelques mots.

Le premier fondement du texte est la transposition pure et simple des plus récentes directives européennes en matière d'énergie, directives qui ont d'ailleurs une philosophie quasi dogmatique fondée sur la primauté de la qualité et de la validité du marché au-delà de toute considération sociale ou économique.

Les pays qui expérimentent, dans l'Union européenne, la mise en oeuvre des directives européennes relatives à l'énergie ou aux services publics de manière générale font aussi l'expérience de la médiocre qualité de service, comme l'ont montré les accidents ferroviaires survenus à Londres, les ruptures de service observées dans les pays nordiques dans le domaine de l'électricité, ou bien d'autres exemples encore.

Les directives européennes sur les services publics - et cela ne concerne pas que l'énergie -, c'est chaque fois moins de service public, moins de lisibilité et de visibilité sur le long terme des stratégies d'entreprises. C'est donc la porte ouverte aux gâchis financiers, aux retards d'infrastructures, aux désastres sociaux et aux inégalités de traitement entre usagers.

Le second fondement du texte, qu'on le veuille ou non, c'est de procéder à la quasi-disparition des termes et des attendus de la loi de nationalisation de 1946.

L'esprit qui a guidé le législateur à l'époque est donc quasiment totalement estompé, ce qui pose au demeurant une question essentielle dont je ne peux manquer de rappeler les termes.

Les directives européennes découlent, comme chacun le sait, de la déclinaison du traité de Rome, maintes fois modifié et que nos compatriotes ont, d'une certaine manière, laissé en l'état en votant « non » au référendum du 29 mai 2005 sur le traité constitutionnel européen.

Ce vote - on ne cesse de le rappeler - pose clairement la question, aujourd'hui et jusqu'à plus ample informé, de la transposition, comme si de rien n'était, de l'ensemble des textes européens qui nous sont proposés au travers de tel ou tel projet de loi.

Quand les électeurs de notre pays ont voté « non », monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, ils ont entre autres raisons et pour un certain nombre d'entre eux, voté « non » à la déréglementation des services publics, à l'ouverture à la concurrence de l'énergie, des télécommunications, des transports publics.

On voit par là même, soit dit en passant, que ce qui peut motiver, chez les agents mêmes le rejet du projet de loi - ne l'ont-ils pas fait savoir par la voie d'un référendum mis en place par les organisations syndicales majoritaires de l'opérateur public du gaz ? - se retrouve et se confond avec ce que ressentent nombre de nos concitoyens.

Ma seconde observation, s'agissant de la loi de 1946, est qu'elle a été votée par le Parlement élu de la IVe République, réalisant au demeurant l'un des objectifs du programme du Conseil national de la Résistance, découlant - devons-nous le rappeler ? - de la Constitution adoptée par l'électorat.

Nous avons donc d'un côté un texte - votre texte - dont la légitimité est pour le moins fragile, et de l'autre un texte dont la légitimité n'est pas discutable.

Pour ces raisons nous ne pouvons, mes chers collègues, que vous inviter à adopter cet amendement.

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