Monsieur le président, monsieur le grand chancelier, monsieur le chancelier, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, l'examen du budget des ordres de la Légion d'honneur et de la Libération est un moment particulier de la discussion du projet de loi de finances.
Certes, au regard du volume des crédits en discussion, il ne s'agit pas de bousculer les grands équilibres budgétaires ! Toutefois, le caractère traditionnellement consensuel des échanges qui ont eu lieu lors de cette discussion illustre la considération que portent l'ensemble des parlementaires et le Gouvernement à nos ordres nationaux.
Vous le savez, les ressources du budget annexe de la Légion d'honneur sont constituées par ses recettes propres ainsi que par la subvention versée par le ministère de la justice.
En 2005, le budget annexe atteindra 18, 3 millions d'euros en recettes et en dépenses, soit une augmentation de l'ordre de 2 % par rapport à l'exercice précédent. Les recettes propres, d'un total de 1, 4 million d'euros, soit une augmentation de plus de 1 %, sont constituées principalement de la perception des droits de chancellerie, des pensions et des trousseaux des élèves des maisons d'éducation.
Parallèlement, la subvention budgétaire qui vous est proposée s'élève à 16, 8 millions d'euros, soit une hausse de 2, 2 % par rapport à l'année précédente, qui résulte essentiellement de l'augmentation de la dotation relative aux charges de personnel, ainsi que des crédits de paiement afférents aux opérations en capital des maisons d'éducation. Le règlement des traitements des 113 200 membres du premier ordre national et des 197 700 médaillés militaires mobilisera notamment un peu plus d'un million d'euros.
Les nominations et promotions dans l'ordre de la Légion d'honneur et l'ordre national du Mérite et les concessions de la médaille militaire constituent la mission première de la grande chancellerie. Elles ont concerné, cette année, 13 026 citoyens français, hommes et femmes, - peut-être l'effort de rééquilibrage devra-t-il être poursuivi - civils et militaires, de tous statuts et de toutes conditions sociales et professionnelles, reflétant fidèlement l'image de la société française dans sa diversité.
Ces chiffres s'inscrivent dans la politique de maîtrise des effectifs voulue par le général de Gaulle, assurée, avec autorité et constance, par les grands maîtres successifs de la Légion d'honneur et destinée à conforter le prestige de notre premier ordre national.
Pour les étrangers, il convient de souligner l'effort particulier demandé par le Président de la République à l'occasion du soixantième anniversaire des débarquements et de la Libération du territoire. Ces cérémonies ont permis d'honorer des combattants des forces alliées représentant treize nationalités, notamment des Américains, des Britanniques, des Canadiens, des Néerlandais, des Australiens, des Polonais ; beaucoup de ces récipiendaires ont reçu leurs décorations lors des manifestations du 6 juin 2004 sur les plages de Normandie.
Ont été honorés également, le 15 août, lors des cérémonies commémorant le débarquement en Provence, des Britanniques, des Américains, des Algériens, des Marocains, des Tunisiens et des représentants de tous les pays d'Afrique noire qui prirent part, avec courage, aux combats de la Libération. Au total, 1 830 étrangers ont été nommés ou promus cette année dans les ordres nationaux.
Plus que jamais, notre société, notamment les jeunes générations, a besoin de références et la Légion d'honneur, grâce à la diversité des mérites qu'elle reconnaît, permet de distinguer des modèles et des exemples.
Mais, l'ordre de la Légion d'honneur exerce la pédagogie plus directement encore dans ses deux maisons d'éducation de Saint-Denis et de Saint-Germain-en-Laye, qui ont pour mission d'assurer l'éducation de plus de 1 000 élèves, filles, petites-filles et arrière-petites-filles, comme l'a rappelé le rapporteur spécial, des membres des deux ordres. Selon une habitude bien établie, les résultats obtenus aux examens, à la fin de l'année scolaire 2003-2004, par les élèves des maisons d'éducation ont été excellents. Ces résultats, fondés sur la qualité de l'éducation et de l'enseignement qui y sont prodigués, sont le meilleur gage de la pérennité de ces institutions.
L'ordre de la Légion d'honneur ne pourra plus bénéficier du statut de budget annexe à partir du 1er janvier 2006, comme l'a rappelé le rapporteur spécial, ainsi que Mme Joëlle Garriaud-Maylam, en raison de l'application de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances.
Pour les raisons que vous avez développées, monsieur le rapporteur spécial, il serait difficile de transformer l'ordre en établissement public. Mais je crois que la qualité d'opérateur pourrait lui être reconnue afin de lui garantir une pleine autonomie de fonctionnement au sein de la mission « justice ».
Je rappelle que les opérateurs, disposant d'une personnalité juridique distincte de l'Etat, mettent en oeuvre des politiques publiques et assurent des missions de service public pour le compte de l'Etat. La majorité des établissements publics administratifs bénéficiera de cette qualité. L'ordre de la Légion d'honneur me paraît donc répondre à cette définition.
De son côté, l'avenir de l'ordre de la Libération sera assuré à travers le Conseil national des cinq communes « Compagnon de la Libération », établissement public administratif qui verra le jour lorsque le temps ne permettra plus de réunir les quinze membres de l'actuel Conseil de l'ordre.
Le Gouvernement et plus particulièrement le ministère de la justice mettront en effet leur expertise juridique à la disposition de l'ordre de la Libération afin d'affiner les modalités de la transition. Je ne doute pas que l'ensemble des parties prenantes, notamment les villes « Compagnon de la Libération », auront à coeur de réussir au mieux le renouvellement de l'ordre.
Pour 2005, il vous est proposé d'accorder à l'ordre de la Libération un budget annexe de 685 000 euros, soit une progression de recettes de 1 % par rapport au budget de l'année 2004.
Le prestige de nos ordres nationaux appelle la célébration de leur histoire. L'année 2002 a vu la célébration du bicentenaire de l'ordre de la Légion d'honneur et du cent cinquantième anniversaire de la médaille militaire. La fin de l'année 2003 a vu la commémoration du quarantième anniversaire de l'ordre national du Mérite. En 2004, ont été rappelées solennellement les premières remises d'insignes par Napoléon aux Invalides, le 15 juillet 1804, et au Camp de Boulogne, le 16 août 1804. L'année 2004 a surtout été marquée par une forte mobilisation des institutions, mais aussi de l'ensemble des Français et plus particulièrement des jeunes, autour des célébrations du soixantième anniversaire de la Libération du territoire national. En Normandie, en Provence ou à Paris, nombre de nos concitoyens ont assisté à ces commémorations qui, plus que jamais, ont entendu placer les acteurs et les témoins, au centre des cérémonies.
Il était et il est important que ces anniversaires soient célébrés. C'est sans doute la plus belle leçon que nous a donnée la célébration du bicentenaire de l'ordre de la Légion d'honneur que de nous permettre de constater, après deux siècles d'existence, la modernité d'une des plus anciennes institutions républicaines.