Monsieur le sénateur, s'agissant du secret de l'instruction, les textes existent et j'interviens pour les faire appliquer lorsque cela s'avère nécessaire.
Par exemple, dans la sinistre affaire Alègre, à Toulouse, j'ai demandé au procureur général d'engager une enquête sur les conditions dans lesquelles un certain nombre de fuites ont pu se produire. Cette enquête est sur le point d'aboutir. Au demeurant, il appartient à tout un chacun d'exiger que la loi soit appliquée lorsqu'elle ne l'est pas.
Il y a peut-être aussi un travail à faire en matière de déontologie de la presse. Nous le savons bien, lorsqu'une personne est mise en cause à la suite d'une fuite au cours d'une instruction ou d'une enquête préliminaire, cela fait la « une » des médias, mais, lorsque cette même personne est mise hors de cause, quelques semaines plus tard, ce n'est plus qu'une « brève » de quelques lignes en bas de page !
Sans doute puis-je, en tant que garde des sceaux, assumer toute ma part dans ce travail, voire en prendre l'initiative, mais avouez que cela ne relève plus tout à fait du niveau de la loi au sens strict. Il s'agit plus d'un problème de comportement général et de déontologie des médias. Il faut simplement essayer de rééquilibrer la situation, pour faire en sorte qu'une information donnée dans un sens puisse réellement être corrigée dans l'autre.
Quant au transfert de la garde des détenus et des escortes, je vous le redis : je suis d'accord sur le principe, et je suis sans doute le premier garde des sceaux à le dire. Encore faut-il que nous parlions des moyens, et je pense que le Parlement peut m'aider. Car on ne peut pas tout à la fois, comme vous venez de le faire, soutenir que la garde de ces personnes à l'hôpital occupe des fonctionnaires de police, et me demander d'assurer ce service sans moyens supplémentaires : il y a là un véritable problème de cohérence dans la pensée.
Je suis tout à fait d'accord pour engager une expérimentation, mais sur une région, parce qu'il faut prendre en compte le fait que l'administration pénitentiaire n'est pas répartie sur le territoire d'une manière aussi homogène que peuvent l'être les services de police et de gendarmerie.
La solution pourrait consister à répartir la tâche entre les services pénitentiaires, d'une part, et les services de police et de gendarmerie, d'autre part, les services pénitentiaires ne pouvant être présents dans un certain nombre de petits tribunaux de grande instance qui ne sont pas situés a proximité d'établissements pénitentiaires.
Je suis donc très favorable à cette expérimentation, mais je souhaite qu'il y ait au préalable une discussion sérieuse sur les moyens. Si les missions de garde des détenus hospitalisés et d'escorte « plombent » la police, que l'on ne vienne pas me demander de les assumer gratuitement. Ce n'est tout simplement pas possible !