Intervention de Gérard Roujas

Réunion du 13 décembre 2004 à 9h30
Loi de finances pour 2005 — Justice

Photo de Gérard RoujasGérard Roujas :

Vous affichez, monsieur le garde des sceaux, un budget en augmentation de 4 %. A supposer même qu'à la différence des budgets précédents celui-ci soit totalement exécuté, ce qui reste à prouver, il reste très insuffisant.

Il est insuffisant, car il est loin de respecter les engagements annoncés dans la LOPJ. Il est insuffisant également au regard des mesures engagées depuis 2002 : les juges de proximité, le renforcement des droits des victimes, le recours à de nouvelles techniques d'investigation, la personnalisation des peines, les expertises et enquêtes de personnalité, les repentis, sont autant de mesures qui augmentent lourdement les besoins financiers de votre ministère.

Je n'évoquerai aujourd'hui que le cas des tribunaux administratifs.

La LOPJ du 9 septembre 2002 a prévu la création dans ces tribunaux de 210 postes de magistrats entre 2003 et 2007, correspondant à cinq tranches annuelles de 42 postes. L'objectif commun pour les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel est de réduire, en 2007, le délai moyen de jugement à un an, en première instance comme en appel.

Si les deux premières tranches ont été entièrement respectées, le projet de budget pour 2005 prévoit la création de seulement 21 postes de magistrats, soit la moitié de la tranche initialement prévue.

Or l'année 2004 a vu les demandes déposées en première instance augmenter de plus de 27 %, et cela après une année 2003 qui avait elle-même connu un accroissement de 14 %.

Cette explosion s'explique, d'une part, par le succès indiscutable de la loi du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives, qui a réformé les procédures d'urgence, d'autre part, par le très fort accroissement du contentieux portant sur les étrangers, lié au renforcement de la politique du Gouvernement en matière de lutte contre l'immigration illégale, par l'essor du contentieux de la fonction publique, notamment relatif aux retraites, et du contentieux créé par l'activité des collectivités territoriales.

Les délais de jugement étaient de un an et onze mois en 2002. En dépit de la hausse des demandes et de la vacance de nombreux postes dans les tribunaux administratifs, il a pu être réduit à un an et dix mois en 2003.

Devant l'explosion du contentieux, ce mouvement va être immanquablement inversé en l'absence d'un renforcement véritable des effectifs.

Dans les cours administratives d'appel, la situation de départ était encore plus préoccupante : le délai moyen atteignait trois ans en 2002 ! Le Conseil d'Etat a donc décidé de consacrer l'essentiel des premières années de mise en oeuvre de la LOPJ au renforcement des cours administratives d'appel et a conclu avec leurs présidents des contrats d'objectifs qui ont permis d'abaisser le délai moyen de jugement de cinq mois.

Le non-respect de vos engagements, monsieur le ministre, va réduire à néant ces contrats d'objectifs, qui nécessiteraient l'affectation de 21 nouveaux magistrats, soit la totalité des créations prévues pour 2005. Or, comme nous venons de le voir, il est également urgent d'affecter des moyens dans les tribunaux administratifs.

Ainsi, la division par deux du nombre des créations de postes, alors même que le contentieux explose, va conduire à abandonner l'objectif même de la LOPJ, qui était de parvenir à ramener à un délai raisonnable le délai moyen de jugement.

Pourquoi, monsieur le ministre, le nombre de postes est-il ainsi diminué ? Quelles solutions proposez vous pour résoudre cette difficulté et honorer vos promesses ?

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