Intervention de Claude Guéant

Réunion du 11 mai 2011 à 21h30
Immigration intégration et nationalité — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici au terme des débats sur le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité. La commission mixte paritaire s’est réunie et un accord a été trouvé entre les deux chambres.

À cet instant, je voudrais saluer tout particulièrement l’implication de votre rapporteur, François-Noël Buffet. J’associe à ces remerciements le président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest, qui a conduit les travaux de la commission avec l’autorité et la clairvoyance qui lui sont coutumières, ainsi que tous ceux d’entre vous qui ont participé aux débats.

Le texte qui est aujourd’hui soumis à votre vote est tourné, avant tout, vers l’efficacité : l’efficacité de notre politique d’éloignement des clandestins, bien sûr, mais aussi l’efficacité de notre politique d’intégration et d’accueil dans la nationalité, ainsi que l’efficacité de notre système d’asile, dont nous souhaitons réduire les délais procéduraux.

C’est un débat particulièrement dense qui s’achève aujourd’hui. Nous avons échangé pendant près de soixante-dix heures en séance publique sur ce projet de loi. Vous avez d’ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, largement contribué à son évolution et à son enrichissement. Vous avez pu, légitimement, faire valoir la sensibilité propre de la Haute Assemblée.

Sur bon nombre des points discutés en commission mixte paritaire, c’est finalement la rédaction du Sénat qui a été retenue. Je pense notamment aux dispositions sur les zones d’attente temporaires ou encore à la pénalisation des mariages avec tromperie sur l’intention matrimoniale.

Ces débats sont maintenant derrière nous. Après le temps de la délibération vient le temps de l’action. Les défis auxquels nous confronte l’actualité internationale, tout autant que la nécessité de transposer les directives communautaires, imposent que ce texte entre maintenant en vigueur.

La commission mixte paritaire est parvenue à un bon point d’équilibre. J’illustrerai cette appréciation en mentionnant les deux sujets qui ont suscité les débats les plus intenses.

Quelques mots, d’abord, concernant la réforme du contentieux de l’éloignement.

Cette réforme est nécessaire pour parvenir à une meilleure administration de la justice. Je veux à nouveau saluer la qualité des débats, d’abord au sein de la commission des lois, puis dans cet hémicycle, qui vous ont amenés à valider, en deuxième lecture, le principe de la réforme.

Restait une nuance sur les modalités de cette réforme : le débat sur un report de l’intervention du juge des libertés et de la détention à quatre jours ou à cinq jours a finalement été tranché en commission mixte paritaire. La solution retenue est proportionnée à l’objectif que nous nous sommes fixé.

Le second sujet est celui du titre de séjour « étrangers malades ».

Le projet de loi ne remet évidemment pas en cause ce titre de séjour ; au contraire, il vise à appliquer purement et simplement, à la lettre, la loi du 11 mai 1998 – j’insiste sur cette date : 1998 – relative à l’entrée et au séjour des étrangers en France et au droit d’asile, qui en fixe le principe.

Simplement, nous avons voulu éviter les effets d’une jurisprudence très récente du Conseil d’État qui impose la prise en compte, parmi les critères, du coût des traitements dans le pays d’origine. L’application concrète de cette jurisprudence pourrait donner lieu à des prises en charge indues par notre système de sécurité sociale.

Sur ce sujet, la commission mixte paritaire a adopté une rédaction équilibrée : celle-là même que vous avez vous-mêmes adoptée en deuxième lecture, sur l’initiative de votre rapporteur.

D’abord, elle clarifie le cadre juridique : le titre « étranger malade » peut être attribué en cas « d’absence » du traitement dans le pays d’origine.

Ensuite, elle introduit une souplesse en prévoyant que le préfet puisse prendre en compte des « circonstances humanitaires exceptionnelles » pour attribuer à l’étranger le titre même si les critères ne sont pas remplis, après avis d’un expert de la santé publique. Cette rédaction est donc à la fois claire, responsable et humaine.

D’ailleurs, ce dispositif ne remet pas en cause les directives données par le ministère de la santé depuis plusieurs années.

Dans une circulaire de la direction générale de la santé de 2005, confirmée en 2010, il est indiqué que « dans l’ensemble des pays en développement, il n’est pas encore possible de dire que les personnes séropositives peuvent avoir accès aux traitements antirétroviraux ni à la prise en charge médicale nécessaire pour les porteurs d’une infection par le VIH ». Cette circulaire reste d’actualité. Les personnes atteintes de lourdes pathologies infectieuses, notamment le SIDA, auront ainsi toujours accès au titre « étranger malade » et continueront donc d’être accueillies et protégées par notre pays.

Tel qu’il est aujourd’hui proposé à votre approbation, le projet de loi apporte des améliorations concrètes et directement opérationnelles sur l’ensemble des volets de notre politique d’immigration.

En matière de nationalité, il conditionne la naturalisation à la signature d’une charte des droits et devoirs qui formalise l’engagement du nouveau citoyen français à respecter les valeurs de la République.

Dans le domaine de l’entrée et du séjour des étrangers, il facilite la création de zones d’attente temporaires pour traiter les situations où un groupe de migrants entre sur le territoire de manière inopinée, en dehors d’un point de passage frontalier.

En matière d’éloignement des clandestins, le projet de loi allonge de trente-deux à quarante-cinq jours la durée maximale de rétention administrative. Je souligne néanmoins que celle-ci reste malgré tout la plus courte d’Europe.

Nous avons prévu une exception pour les personnes condamnées pour des actes terroristes, lesquelles pourront être placées en rétention pour une durée maximale de six mois, en vue de leur expulsion.

Enfin, le projet de loi introduit plusieurs dispositions qui permettront de réduire la durée d’instruction des demandes d’asile. J’ai parfois entendu des critiques aux termes desquelles nous voulions limiter le droit d’asile. Mais c’est tout le contraire : en luttant efficacement contre les demandes abusives, nous améliorerons le traitement réservé aux personnes qui méritent réellement la protection de notre pays.

Ce matin même, le Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, que je rencontrais, me disait le prix qu’il attachait à une évolution des législations européennes dans ce sens.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte aujourd’hui soumis à votre vote est un texte complet et équilibré. En assurant la transposition des directives, il permet à la France d’honorer ses engagements européens. Il nous donne les moyens de mener une politique d’immigration efficace et juste, conforme aux attentes de nos concitoyens.

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