Le principe fondamental du droit du dommage corporel est celui de la réparation intégrale du préjudice. Il implique notamment que la victime puisse librement disposer de l'indemnité qui lui est allouée pour réparer ce préjudice avec, comme corollaire, un principe de non-affectation des dommages et intérêts accordés. Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, la victime d'un dommage corporel doit pouvoir utiliser comme elle l'entend le montant des indemnités reçues en réparation, sans qu'il puisse lui être imposé ni l'emploi qu'elle en fait ni un contrôle sur l'utilisation des fonds qui lui sont alloués.
En permettant aux assureurs d'indemniser les besoins en tierce personne des victimes de dommages corporels au moyen de chèques emploi service universels, l’alinéa 11 de l'article 14 ter contrevient à ce principe, puisqu'il permet d'affecter directement une fraction de l'indemnisation à une prestation donnée.
L’adopter en l’état pourrait avoir les conséquences suivantes.
Premièrement, cela viderait de son sens le principe de non-affectation et de libre disposition des dommages-intérêts contraire à l'intérêt des victimes.
Deuxièmement, cela reviendrait à autoriser un contrôle sur l'utilisation des sommes très importantes versées au titre du poste de préjudice « tierce personne ».
Troisièmement, cela aggraverait le déséquilibre des relations existant entre les victimes et les assureurs, au profit de ces derniers, en leur permettant, de fait, de contraindre les victimes à accepter l'indemnisation au moyen d'un chèque emploi service, sauf à se voir offrir une somme moindre si elles le refusaient.
Quatrièmement, cela empêcherait de pouvoir moduler et personnaliser le salaire versé à la tierce personne dès lors que le montant du CESU est prédéterminé,
Cinquièmement, cela reviendrait à exonérer les assureurs du paiement des cotisations sociales qui ne peuvent être réglées au moyen du CESU préfinancé et devront, par conséquent, être payées séparément par la victime.
Sixièmement, enfin, cela reviendrait à intervenir dans le projet de vie de la victime et à compliquer la mise en œuvre de l'indemnisation de ce poste de préjudice en empêchant la victime de recourir à plusieurs modalités d'aide humaine : salariée, familiale ou amicale.
Je propose donc de supprimer l’alinéa 11 de l’article 14 ter.