Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2008 est le premier de la législature censé traduire les engagements de campagne du nouveau Président de la République. Or force est de constater qu'en réalité ce budget n'est que la poursuite de la politique menée depuis 2002.
La loi TEPA, votée cet été, en est également l'illustration. Elle prive nos finances publiques de 15 milliards d'euros, le Gouvernement faisant le pari très risqué que les contribuables « allégés » réinjecteront leur argent dans la consommation. Mais le taux d'épargne des Français, qui devrait atteindre cette année plus de 15 %, est l'un des plus élevés de l'Union européenne, nos concitoyens ayant un comportement d'accumulation patrimoniale. Il s'agit pour eux, en quelque sorte, d'« épargner plus pour dépenser moins » : c'est le risque que vous prenez, madame le ministre.
Le choc de croissance que le Gouvernement espère pourrait ne pas être au rendez-vous. D'ores et déjà, les prévisions pour 2008 sont contestées par de nombreux instituts indépendants. Le projet de loi de finances est bâti sur l'hypothèse d'une croissance de 2, 25 %, alors que les conjoncturistes s'accordent plutôt sur le chiffre de 2 %. La flambée du pétrole et, dans une moindre mesure, la crise des subprimes aux États-Unis affecteront notre économie. La croissance pour 2007 devrait se contracter pour n'atteindre que 1, 8 %, alors que vous annonciez ici même, l'année dernière, madame la ministre, un taux de 2, 25 %.
Au terme de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, que constate-t-on ? Finalement, il ne s'y trouve que peu de mesures nouvelles puisque le « paquet fiscal » avait été voté en juillet. Ce qui est certain, c'est que les choix du Gouvernement sont constants ! Les diminutions d'impôt ciblent toujours les mêmes catégories de personnes, comme en témoignent les aménagements de l'ISF adoptés ces derniers jours par votre majorité. Quant à la fiscalité des entreprises, la suppression de l'impôt de bourse était-elle vraiment opportune ?
Doit-on poursuivre dans une voie, qui, depuis cinq ans, n'a pas donné les résultats escomptés ? Certes, nous pouvons en convenir, la norme « zéro volume » limite les marges de manoeuvre budgétaires et donc financières de l'État. Mais la diabolisation du déficit ne doit pas être le prétexte, dans notre pays, à la rationalisation de nos services publics.
Je ne suis pas en train de remettre en cause le pacte de stabilité et de croissance, qui nous oblige depuis 1997, mais je regrette que celui-ci soit avant tout une question de discipline. À force de discipline, en effet, notre politique budgétaire n'est plus suffisamment réactive. Déjà, l'année dernière, j'invitais le Sénat à méditer sur les travaux de la délégation pour la planification, que préside notre excellent collègue Joël Bourdin. Celle-ci recommandait alors la nécessaire coordination des politiques financières et budgétaires européennes.
Aujourd'hui plus que jamais, nous pensons que la conduite de politiques nationales de compétitivité et d'attractivité, au détriment de politiques coopératives, nuit à la croissance de la zone euro.
De plus, est-il durablement supportable que l'Europe n'ait pas plus d'influence sur sa banque centrale, s'agissant des taux d'intérêt, des taux d'inflation et des taux de change ?
Cette politique monétaire, dont on perçoit l'absence de réactivité aux évolutions de l'euro, par contraste avec la politique menée par les États-Unis, est d'autant plus préoccupante que le niveau et la variation du taux de change pénalisent notre tissu industriel.
Contrairement à une idée reçue, plus que la mondialisation, c'est la rigidité des règles de gouvernance que s'imposent les États membres qui affaiblit l'économie européenne. Contraints par le principe de l'unanimité, nous nous interdisons la possibilité de décisions immédiates qui nous permettraient de répondre rapidement aux aléas monétaires.
Actuellement confrontées au problème d'un euro fort, nos entreprises perdent chaque jour en compétitivité. Même l'Allemagne, qui semblait jusqu'alors moins pénalisée, souhaite aujourd'hui un assouplissement des règles monétaires. Il est urgent, madame la ministre, que l'Europe se dote d'outils permettant véritablement de coordonner sa politique pour plus d'efficacité.
En attendant, puisqu'il ne s'agit ici que de l'échelon national, je jugerai le projet de loi de finances à l'aune de ce que nous propose le Gouvernement. Les conditions ne me semblent pas réunies pour donner à nos concitoyens, sinon un choc de confiance, au moins un peu d'espérance. C'est la raison pour laquelle mes collègues radicaux de gauche et moi-même ne voterons pas cette première partie du projet de loi de finances. Mais je tiens à préciser que les autres membres du RDSE, qui en font sans doute une autre lecture, accorderont leur confiance au Gouvernement.