Je souhaite intervenir en faveur de l’approbation du montant de la compensation des exonérations ciblées.
Le droit français des prélèvements destinés à financer la sécurité sociale est assorti de nombreux dispositifs d’allégements de charges, visant à diminuer le coût de la main-d’œuvre. Pour la première fois depuis l’application de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, il n’y aura pas de nouvelles exonérations de cotisations de sécurité sociale non compensées dans ce projet de loi. Elles sont évaluées à 3, 4 milliards d’euros pour 2011.
En octobre dernier, la Cour des comptes a décortiqué les exonérations ciblées dont bénéficient, notamment, les entreprises. Celles-ci seraient trop nombreuses, peu efficaces, coûteuses : à cet égard, son rapport est accablant. Selon cette étude, ces dispositifs représentent pour les finances publiques un manque à gagner de la bagatelle de 31 milliards d’euros en 2011, un montant colossal dénoncé de longue date.
En effet, entre 2002 et 2010, près de douze niches fiscales ont été créées chaque année. De même, le nombre de dispositifs d’exonérations sociales a augmenté, « pour une efficacité qui reste parfois à démontrer », précise la Cour des comptes. La Cour indique aussi que cette « inflation considérable n’apparaît pas maîtrisée et contraste fortement avec les efforts engagés en matière de dépenses budgétaires ».
Passant en revue cette panoplie de dispositifs, la Cour des comptes a souligné les trois effets pervers majeurs de ces compensations d’exonérations.
Premier enseignement : ni les dépenses fiscales ni les niches sociales n’ont de définition claire, ce qui complique le chiffrage de leur coût direct, tandis que leurs coûts et gains indirects ne sont pas mesurés.
Deuxième enseignement : alors que leur nombre va croissant, les niches encouragent des formes d’optimisation qui confinent à l’évasion fiscale. Le rapport de la Cour des comptes préconise donc de « prendre en compte en amont les pratiques d’optimisation non souhaitées qui pourraient être suscitées par la création ou la modification d’un dispositif dérogatoire et d’analyser ces pratiques dans le cadre de l’évaluation des dispositifs » ; c’est la proposition n° 23.
Enfin, troisième enseignement : l’efficacité des dispositifs « n’est pas toujours efficace ». La Cour des comptes note ainsi que le développement d’intermédiaires spécialisés conduit à une captation de l’avantage fiscal, que « certaines mesures s’avèrent trop peu ciblées par rapport à leur objectif » ou « du fait de l’évolution de l’objectif dans le temps », quand ces dispositifs ne poursuivent pas « des objectifs différents », éventuellement contradictoires. Par exemple : « la plupart des dispositifs dérogatoires en matière de prélèvements sociaux poursuivent soit un objectif de réduction du coût du travail, soit un objectif de soutien du pouvoir d’achat ».
Une autre niche ciblée est l’exonération des plus-values à long terme sur la cession de titres de participation, plus couramment appelée « niche Copé ».
Ce dispositif coûteux – 6 milliards d’euros en 2009 ! – s’est accompagné de forts effets d’aubaine, est-il expliqué dans le rapport. Il en va de même pour le coût des avantages fiscaux et sociaux liés à la participation, à l’intéressement, à l’épargne salariale, qui s’élève à 25 milliards d’euros, et à la protection sociale complémentaire, qui représente 12 milliards d’euros. Pour ne prendre que cette référence, l’épargne salariale, qui entraîne un manque de recettes à hauteur de 9 milliards d’euros, a une efficacité « considérablement amoindrie », selon la Cour des comptes.
À partir de ce constat, les sages de la Cour ont dressé toute une liste de propositions de rationalisation et de suppression. Ils appellent à une lisibilité accrue, en alignant les taux et en clarifiant les objectifs, et identifient un certain nombre de « pistes d’évolution », dont l’incidence dépasserait 15 milliards d’euros.
Il nous faut donc suivre avec détermination les sages recommandations de la Cour des comptes en la matière.