Nous attachons beaucoup d’importance à cet amendement.
L’article 71 tend lui aussi à lutter contre la fraude, en l’espèce au minimum vieillesse. Il résulte de l’adoption, par l’Assemblée nationale, d’un amendement du député Yves Bur et vise en fait à étendre aux anciennes allocations composant le minimum vieillesse la condition de résidence sur le territoire national exigée pour le bénéfice de l’allocation de solidarité aux personnes âgées.
Les membres du groupe CRC-SPG considèrent que cela n’est pas acceptable. Alors que vous permettez aux capitaux de se déplacer d’un pays à un autre, voire d’un continent à un autre, vous entendez restreindre les conditions d’accès à des mécanismes de solidarité destinés à permettre aux plus modestes de survivre une fois l’âge de la retraite venu.
En réalité, derrière ce qui nous est présenté comme une mesure de coordination, se dissimule une nouvelle disposition contre ceux qui, dans les années soixante, sont venus travailler en France, parce que l’on avait besoin d’eux. Ces étrangers, souvent originaires d’Afrique, plus particulièrement du Maghreb, étaient venus chez nous occuper des emplois dont personne ne voulait.
Autour de ces femmes et de ces hommes, que l’on appelle « chibanis », c’est-à-dire anciens, s’est constitué un formidable élan de solidarité, soutenu par différents collectifs.
Pour ces chibanis, qui sont venus en France pendant la période de reconstruction et celle des Trente Glorieuses, la retraite se partage entre leur pays d’accueil – la France – et leur pays d’origine, où souvent sont restées leurs familles mais où ils n’ont, la plupart du temps, guère d’attaches autres que culturelles ou affectives.
L’application de cet article les placerait devant une alternative : soit ils seraient contraints à une résidence prolongée en France, qui accroîtrait considérablement leurs dépenses, alors qu’ils perçoivent des retraites minimes, pour ne pas dire de misère, ce qui explique qu’ils perçoivent les prestations en question ; soit ils devraient faire le choix de vivre durablement dans leur pays d’origine, et donc renoncer aux prestations vieillesse qui constituent leurs seules ressources.
J’insiste, mes chers collègues, sur le fait que ces personnes ont reconstruit la France ! Elles ont joué, notamment dans le secteur industriel, un rôle incontestable. On en rencontre beaucoup, par exemple, dans ma ville de Vénissieux, de tradition industrielle.
Notre pays a fait un pas certain dans la voie de la reconnaissance du rôle de l’immigration dans l’économie et dans la construction de notre pays, notamment avec la création de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, chère à M. Jacques Toubon. Toutefois, ce mouvement ne doit pas s’arrêter là : il convient d’adopter cet amendement de suppression, car il serait injuste de priver de leurs allocations celles et ceux qui, par leurs efforts, ont contribué à la reconstruction de notre pays, au seul motif qu’ils résideraient moins de six mois par an en France.