Les deux assemblées ont donc exigé que soit inscrite dans la loi la nécessité de trouver une solution concernant la dette que porte RFF, cette injonction ayant d’ailleurs été renforcée à l’Assemblée nationale.
Je souhaite néanmoins rappeler que nous avions proposé en première lecture un amendement qui tendait non pas à ce que le Gouvernement fasse des propositions au Parlement dans un horizon de temps plus ou moins long, mais tout simplement à ce que l’État s’engage à reprendre la dette de l’entreprise publique.
À travers cette intervention, nous souhaitons revenir sur une question qui nous semble essentielle, notamment pour le développement de l’offre de transport dans notre pays.
Ainsi, je vous le rappelle, l’enjeu principal pour le secteur ferroviaire est non pas l’instauration d’une concurrence libre et non faussée, mais bien le financement des infrastructures de transport.
En effet, le sous-financement se fait sentir depuis de nombreuses années.
En 2005, déjà, les auteurs d’un audit réalisé par l’École polytechnique de Lausanne estimaient que, si rien n’était fait, de 30 % à 60 % des lignes ne seraient plus utilisables à très brève échéance. Ils affirmaient que les subventions de l’État devraient augmenter de 400 millions d’euros par an pendant dix ans pour que le réseau ferré national soit remis à niveau.
Malgré les effets d’annonce du Gouvernement, aucune somme n’est réellement consacrée à cette problématique. Le projet de loi de finances pour 2010 est encore en recul dans le domaine des transports ; pis, il prévoit d’imposer aux entreprises de réseau une nouvelle cotisation pour compenser la suppression de la taxe professionnelle.
D’autres pays ne font pas ce choix. L’Allemagne, en particulier, s’est engagée dans un processus de désendettement de son système ferroviaire.
En outre, au moment où l’engagement porté par les lois sur le Grenelle de l’environnement est censé permettre l’essor des transports collectifs, notamment ferrés, nous estimons qu’il est grand temps que le Gouvernement s’engage à reprendre la dette de RFF, afin de permettre à l’établissement de réaliser les investissements nécessaires dans les infrastructures.
Monsieur le secrétaire d’État, il s’agit d’un préalable à toute ouverture à la concurrence, dans votre logique libérale, que nous ne partageons pas ! En effet, le dynamisme des opérateurs ferroviaires, mais aussi, bien plus largement, de l’ensemble du tissu économique, dépend de la qualité des infrastructures ferroviaires et de leur accessibilité.
Par ailleurs, le désengagement massif de l’État au regard des besoins de financement de RFF a conduit l’entreprise publique à mettre en œuvre une hausse exponentielle – et non une modulation, contrairement à ce qui est soutenu dans le rapport – des péages, financée par la SNCF, et à céder son patrimoine immobilier. Nous connaissons tous les conséquences que cela a pu avoir sur le budget des régions et sur les usagers.
Le rapport d’information du Sénat qui a été remis l’année dernière a également dressé un constat unanime et alarmant de la situation. Mes chers collègues, permettez-moi d’en citer un passage particulièrement éclairant :
« Votre mission d’information rappelle [...] que RFF comptabilisait en 2006 une dette nette de 26 milliards d’euros. Celle-ci a pesé très lourd sur les comptes de l’établissement dès sa création, et a même progressé de 30 % depuis 1997.
« Dès lors, il n’est guère étonnant de constater que, sur les 2, 5 milliards d’euros de dépenses en capital de l’État versés en 2004 à RFF et à la SNCF, seuls 320 millions d’euros étaient destinés à de nouveaux investissements (TGV Est notamment).
« Le poids de la dette de RFF et les coûts d’entretien d’un réseau ferré à bout de souffle obèrent les capacités d’investissement de l’établissement public. Il en résulte que RFF est réduit à n’être qu’un simple compte d’enregistrement de la dette, ce qui l’empêche en fait de jouer son rôle de constructeur et de gardien du réseau ferroviaire français. Cette situation ne peut perdurer et nécessite qu’une solution soit rapidement apportée par les pouvoirs publics. »
Nous souhaitons donc que cette position de la commission des affaires économiques, qui semble faire consensus dans la classe politique, se traduise concrètement. Nous serons extrêmement vigilants lors de la remise de ce rapport dans quelques mois. Nous attendons de vous, monsieur le secrétaire d’État, un acte significatif, conforme à l’esprit du Grenelle de l’environnement, pour que soient, enfin, dégagées des marges d’investissement dans les transports publics, qui en ont tant besoin !