Intervention de Louis Souvet

Réunion du 16 décembre 2004 à 15h00
Cohésion sociale — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Louis SouvetLouis Souvet, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, réunie le 8 décembre dernier à l'Assemblée nationale, est parvenue à un accord sur une rédaction commune du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale.

Les divergences entre nos deux assemblées étaient, à vrai dire, peu nombreuses. L'Assemblée nationale a, en effet, accompli un travail législatif de grande qualité, qui a enrichi le texte sans lui faire perdre la cohérence d'ensemble que nous avions instaurée au Sénat en première lecture.

Je ne m'attarderai aujourd'hui que sur les principales modifications introduites par la commission mixte paritaire.

Concernant le volet « emploi », nous n'avons pas jugé utile, à l'article 1er, de préciser qu'il appartient aux maisons de l'emploi de mener des actions de sensibilisation des employeurs sur la lutte contre les discriminations. Cette fonction, pour utile qu'elle soit, ne correspond pas à leur coeur de métier. De plus, elle risque de faire doublon avec les responsabilités qui seront prochainement conférées à la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, la HALDE, et à ses délégués régionaux.

Dans le même article, la commission mixte paritaire a supprimé la disposition prévoyant que les députés siègent de droit dans le conseil d'administration des maisons de l'emploi. Cette disposition aurait créé une différence de régime juridique peu justifiée entre les députés et les autres élus, vous le comprenez bien, monsieur le ministre.

A l'article 2, elle a adopté un amendement précisant que l'interdiction de vendre des offres ou des demandes d'emploi ne fait pas obstacle à leur insertion dans des publications ou d'autres moyens de communication payants. Cette précision a pour principal objectif d'éviter que les sites internet diffusant des offres d'emploi ne soient entravés dans leur développement.

Elle a également supprimé l'article 11 bis, introduit par l'Assemblée nationale, qui visait à permettre aux adolescents d'effectuer des « stages de découverte » en entreprise. Bien qu'elle soit favorable à une meilleure connaissance du monde de l'entreprise par les jeunes, la commission mixte paritaire a en effet estimé que cette disposition trouverait mieux sa place dans la future loi d'orientation sur l'école.

S'agissant du volet « apprentissage », nous avons confirmé les initiatives heureuses prises à l'Assemblée nationale. Il s'agit notamment de l'allégement des formalités réglementaires pour les entreprises employant des apprentis, de l'évaluation des compétences de l'apprenti en présence de ses parents, de l'aménagement des conditions de travail des apprentis, de la prise en compte de la situation des apprentis étrangers ou encore de la considération particulière qui a été accordée aux apprentis handicapés.

Ce n'est donc que sur des points mineurs, mais essentiels à la clarté de ce projet de loi, que la commission mixte paritaire a modifié le texte.

Ainsi, elle a décidé, parce qu'elle le considérait satisfait par le droit actuel, de supprimer l'article 13 bis B introduit par l'Assemblée nationale et qui portait sur l'information du maître d'apprentissage débutant.

S'agissant des contrats aidés, nous avons approuvé les dispositions additionnelles ajoutées par l'Assemblée nationale que votre rapporteur a trouvées pertinentes à de nombreux égards et compatibles avec les positions votées au Sénat. Il a apprécié la considération ainsi portée à l'égard du travail de notre Haute Assemblée.

En conséquence, le texte issu de nos travaux relaie les inquiétudes des départements d'outre-mer en repoussant d'une année la suppression des contrats emploi-solidarité et des contrats emploi-consolidé, pour leur laisser le temps de s'adapter.

Nous avons également tenu à ce que la gestion du contrat d'avenir puisse être déléguée aux plans locaux pour l'insertion et l'emploi, les PLIE, aux maisons de l'emploi et aux missions locales et, par ailleurs, nous avons tenu à ce que sa durée puisse être portée à trois ans pour les seniors.

Des mesures ont également été prises pour renforcer l'attractivité financière des contrats aidés. Ainsi, les contrats d'accompagnement et les contrats d'avenir seront désormais exonérés de la taxe sur les salaires.

L'Assemblée nationale avait, en revanche, souhaité revenir sur notre volonté de permettre aux entreprises d'insertion par l'activité économique, de pouvoir conclure des contrats d'accompagnement dans l'emploi et de bénéficier d'une aide non dégressive dans le cadre du contrat d'avenir. Mais je comprends qu'un tel traitement de faveur ne puisse se justifier complètement, dans la mesure où ces entreprises revendiquent leur appartenance au secteur marchand. Nous n'avons donc pas rétabli ce dispositif.

Globalement, donc, la commission mixte paritaire n'a pas bouleversé l'équilibre du texte. Notons tout de même qu'un amendement important, proposé par nos collègues de l'opposition, a été adopté, prévoyant que le contrat d'accompagnement dans l'emploi dure au minimum six mois. Il a également été décidé de confier la présidence du comité de gestion du contrat d'avenir conjointement au président du conseil général et au préfet.

En ce qui concerne le volet « accompagnement des licenciements », qui avait été joint au texte par lettre rectificative et rapporté, au Sénat, par notre collègue Alain Gournac et, à l'Assemblée nationale, par M. Dominique Dord, un consensus s'est instauré entre nos deux assemblées pour préserver l'équilibre du texte négocié par les partenaires sociaux. Par conséquent, les amendements adoptés par l'Assemblée nationale ont reçu l'assentiment du Sénat, par exemple, sur le soutien psychologique à accorder aux salariés licenciés, sur l'extension de certains délais de recours ou encore sur l'allégement des obligations qui pèsent sur les petites entreprises.

De fait, les modifications apportées ont été inspirées par le souci de se caler sur le résultat des consultations menées auprès des partenaires sociaux. Ainsi, la commission mixte paritaire a convenu de la nécessité de leur laisser le soin de fixer la durée de la convention de reclassement des salariés licenciés et de confier à la convention d'assurance chômage la détermination des sommes dues au titre du droit individuel à la formation dans le cadre de cette convention.

La commission mixte paritaire a également repris à son compte le souci exprimé par notre assemblée d'alléger les charges financières des petites entreprises : celles qui ne mettront pas en oeuvre une convention de reclassement au profit de leurs salariés devront payer non plus six mois de salaire, ce qui a paru abusif, mais deux, ce qui permet d'aligner leur régime de sanction sur celui des grandes entreprises.

En contrepartie, la commission mixte paritaire a approuvé la proposition formulée par M. Alain Gournac qui consiste à demander aux petites entreprises, non soumises à l'obligation de revitalisation des bassins affectés par les licenciements, de participer à l'élaboration de l'étude d'impact social et territorial des mesures de revitalisation. C'est là, je crois, un point important qui met en jeu la responsabilité morale des entreprises qui licencient, fussent-elles petites.

Pour le volet « logement », dont Mme Valérie Létard était le rapporteur, la commission mixte paritaire a confirmé les avancées introduites par le Sénat, notamment celles qui sont relatives au surendettement et au règlement prioritaire des créances locatives, ainsi qu'au prolongement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, jusqu'en 2011 pour répondre aux besoins de la rénovation urbaine.

L'Assemblée nationale avait également apporté plusieurs éléments nouveaux qui ont été conservés, la commission mixte paritaire ayant jugé qu'ils allaient dans le sens d'un accès plus facile et plus juste au logement.

Elle a en revanche, et à juste titre, supprimé l'article 48 bis introduit par l'Assemblée nationale, prévoyant que des accords collectifs locaux pourront, dans le parc social comme dans le parc privé, déroger à la liste des charges récupérables pour des dépenses de sécurité et de développement durable.

Cette disposition n'est, en effet, pas apparue opportune. En réalité, les conséquences financières et juridiques n'en avaient pas été évaluées et les associations de locataires, informées tardivement de cette initiative, n'avaient pas été consultées. La commission mixte paritaire a donc souhaité en reporter l'examen jusqu'à la discussion du projet de loi « Habitat pour tous », dont la présentation nous est annoncée pour 2005.

Par ailleurs, la commission mixte paritaire a préféré supprimer l'article 52 quinquies introduit par l'Assemblée nationale, qui visait à assouplir les règles comptables applicables aux copropriétés de petite taille. Elle a estimé, à cet égard, que la comptabilité d'engagement était un gage de sécurité et de transparence pour l'ensemble des copropriétés et qu'elle devait s'appliquer à chacune d'entre elles.

S'agissant enfin du volet « intégration des personnes immigrées ou issues de l'immigration », l'Assemblée nationale ayant suivi nos préconisations, la commission mixte paritaire a peu modifié le texte, hormis la demande qu'elle a formulée sur la remise d'un rapport annuel du Gouvernement au Parlement sur l'exécution du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale.

Au total, la commission des affaires sociales considère que le présent projet de loi constitue une étape essentielle de la politique sociale de notre pays, en rénovant le service public de l'emploi, en adaptant le droit du licenciement dans le respect du dialogue social, en donnant un nouvel élan à la construction de logements sociaux et en garantissant à chacun le droit à l'égalité des chances.

La commission vous propose donc d'adopter ce projet de loi tel qu'il résulte des travaux de la commission mixte paritaire.

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